dimanche 16 mars 2014

Transgenre

Le téléfilm d'hier sur la 3, y jouaient Line Renaud, Alexandre Styker, ainsi que Valérie Ancel ;  je l'ai trouvé plein d'enseignements, mais une fiction comme celle-là apprend plus au spectateur que ne pourrait  le faire aucun documentaire, ou la meilleure enquête.  L'art du scénario et le bon jeu des comédiens est allé, comme il se doit, au-delà de simples informations sur la complexité d'une situation donnée en touchant la corde sensible, celle qui évacue la petite taupe en soi, et ouvre l'intelligence du cœur,  faite ici  d'émotion devant la découverte, et ce, concernant ce téléfilm, sans compassion inutile même si désarroi il y a dans le vécu des transgenres. Ce n'est  pas de compassion dont ils ont besoin, mais de reconnaissance ou au moins de respect. 
 
 On comprend  Bélinda avec les tripes quand elle dit "Je suis une femme piégée dans un corps d'homme". L'acteur a été bien choisi avec son esthétique proche de celle de David Bowie et sa voix neutre, pas particulièrement virile, ni non plus spécifiquement féminine. Le corps de l'acteur n'est pas petit, il est plutôt grand, assez mince, mais les épaules sont plus carrées peut-être que celles des corps de femme  (hormis les athlètes en natation). Les grosses dames en général ont les épaules arrondies, qui les font aussi appeler "femmes rondes". Bélinda, avec ce léger carré des épaules, a un corps d'homme fin. Ce n'est pas sa hauteur qui déstabilise au premier regard, mais ce carré, si léger soit-il, que d'ailleurs beaucoup de femmes autrefois se créaient avec des vestes munies d'épaulettes... sauf que Bélinda ne porte pas de veste. Les mannequins femmes, hautes d'un mètre quatre vingt parfois, sont femmes au premier regard, parce que les longues jambes, sont en accord avec tout le reste, notamment la carrure. Pour autant il existe des hommes au corps frêle, qui se sentent hommes et à  raison, forts d'une sexualité qui le leur confirme ils n'ont pas de problème avec le regard des autres, en général.

  Le transgenre est une personne à priori en désaccord profond avec l'aspect de son corps dont le genre sexuel n'est pas accordé à sa sexualité intérieure, un peu comme une voix éraillée chez une femme à l'aspect de minette fait étrange impression sur le moment, lui, ou elle, fait et se fait, étrange impression. Tout alors réside dans l'acceptation de soi, mais aussi celle des autres qui se fera dans le dépassement de ce moment plus ou moins long d'instabilité de la part de ceux que ce décalage  à première vue dérange. Malaise qui perdure chez le transgenre s'il met du temps à convaincre les autres de l'identité dont il se sent investi,  un malaise plus fort,  à moins que similaire en certains cas, à celui qu'éprouve une femme grosse qui a en tête de devenir mince (l'inverse est rare mais sait-on jamais). Malaise  dû  alors à la seule puissance du regard de l'autre et qui risque de mettre durablement mal dans sa peau celui ou celle qui en souffre. Il faut comprendre : l'autre, le normal, se voit chamboulé dans ses repères ancrés depuis si longtemps concernant le féminin et le masculin, allant de pair avec le physique.
 
Qui plus est, absence d'esthétique à mon sens, dans les cas où un homme bâti comme Jean Yanne se vit néanmoins comme une femme à l'intérieur et porte un robe affriolante. Le téléfilm a évité le grotesque, qui guette toujours plus ou moins quand le décalage est trop fort, par le choix d'un acteur au physique facile. Car c'est bien un certain grotesque qui pourrait désespérer les transgenres qui créent involontairement  un décalage trop important...  Et quoi de pire que de n'être pas crédible lorsque que l'on veut être reconnu pour ce que l'on se sent au plus profond de soi ? 
 
À mon avis, seul l'amour peut amener au respect de l'autre ; de celui ou celle qui veut se faire reconnaître pour ce qu'il, ou elle, se sent, au fond de lui, ou elle,  malgré des apparences parfois trop insistantes où il est difficile de vaincre, sans amour, ce qui paraît contraire à l'harmonie.
 
Le téléfilm a très bien parlé de tout ça, je lui tire mon chapeau, les acteurs et actrices étaient crédibles donc bons,  j'ai d'ailleurs perçu  Bélinda au féminin.  

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