mercredi 29 septembre 2010

Extrait Récits de la maison des morts - La fête de Noël


"Joachim Akymytch, lui aussi, se préparait activement à la fête. Il n’avait pas de souvenirs familiaux, puisqu’il avait grandi orphelin dans une demeure étrangère et depuis l’âge du quinze ans, je crois, l’avait quittée pour le dur service militaire ; il n’avait pas eu non plus de grandes joies, puisque toute son existence s’était écoulée régulière, monotone, dans la crainte de s’écarter ne fût-ce que d’un cheveu des obligations une fois indiquées. Il n’était pas non plus particulièrement religieux, puisque les règles de bonnes conduites avaient, semblait-il, englouti chez lui tout le reste, les dons et les originalités de l’homme, toutes les passions ou les désirs, bons ou mauvais. Pour ces raisons, il se préparait à accueillir le jour de fête sans agitation, sans émotion, sans être troublé par des regrets ou des souvenirs absolument inutiles, mais avec cette calme et méthodique sagesse dont il possédait exactement la dose nécessaire pour s’acquitter d’un devoir ou d’un rite prescrit une fois pour toutes. Et d’ailleurs, d’une façon générale, il n’aimait pas les longues réflexions. La signification d’un fait, aurait-on dit, n’avait jamais intéressé son cerveau, mais les règles qui lui avaient été une fois prescrites, il les exécutait avec une scrupuleuse exactitude. Si le lendemain on lui avait commandé de faire précisément le contraire, il l’aurait fait avec la même soumission et le même soin qu’il faisait l’opposé la veille. Une fois, une unique fois dans sa vie, il avait essayé de se conduire d’après son esprit à lui, et il avait échoué au bagne. La leçon n’avait pas été perdue pour lui. Et bien qu’il ne lui eût pas été donné par le sort de comprendre en quoi il avait fauté, il avait retiré de son aventure cette règle salutaire de ne raisonner jamais ni en aucune circonstance, parce que raisonner « n’était pas dans ses cordes », comme disaient entre eux les détenus.
Aveuglément dévoué au rite, même son cochon de lait de Noël, qu’il avait farci de bouillie de gruau et fait rôtir, - de sa propre main, car il savait aussi cuisiner, - il le considérait avec une sorte de respect préalable, comme si ç’avait été non point un ordinaire porcelet qu’on pouvait toujours acheter et faire cuire, mais un porcelet spécial, un porcelet de fête. Peut-être que, dans son enfance déjà, il avait pris l’habitude de voir ce jour-là un cochon de lait sur la table et en avait conclu que ce cochon de lait était indispensable en ce jour ; et je suis sûr que si seulement une fois, en ce jour, il n’avait pas eu de cochon de lait à manger, il lui serait resté pour toute sa vie un certain remords de conscience pour un devoir non accompli.
Avant la fête, il portait sa vieille vareuse et ses vieux pantalons, convenablement raccommodés bien sûr, mais quand même tout à fait usés. Maintenant, on put voir qu’il avait soigneusement conservé dans son coffre, sans y toucher, le nouveau costume reçu de l’administration quatre bons mois auparavant, dans la pensée alléchante de l’étrenner pour la fête. Ce fut bien ce qu’il fit. Déjà la veille il le sortit, le déplia, l’examina, le brossa bien, souffla dessus, et, tout cela dûment exécuté, l’essaya préalablement. Il se trouva qu’il était parfaitement à sa mesure ; tout était comme il faut ; il se boutonnait étroitement jusqu’en haut ; le col, comme de carton, poussait haut le menton ; il y avait même à la ceinture un je ne sais quoi qui marquait la taille, comme dans une tunique d’uniforme. Joachim Akimytch eut même un large sourire de satisfaction et, non sans crânerie, se retourna devant son minuscule petit miroir, qu’il avait de sa main et depuis longtemps garni, dans un moment de liberté, d’une bordure dorée. Il y avait seulement une petite agrafe du col de la vareuse qui avait l’air de n’être pas à sa place. L’ayant constaté, Joachim Akimytch décida de déplacer cette agrafe : il la déplaça, essaya de nouveau, et il se trouva que maintenant c’était tout à fait bien. Alors il replia le tout comme il était et, l’esprit tranquillisé, le serra jusqu’au lendemain dans son coffre.
Son crâne était rasé de façon satisfaisante. Mais s’étant considéré attentivement dans sa petite glace, il remarqua qu’il n’était quand même pas absolument lisse : il y avait de petits poils à peine perceptibles qui pointaient. Il se rendit immédiatement chez « le major », pour se faire raser tout à fait comme il faut et à l’ordonnance. Personne ne l’aurait examiné le lendemain : mais il se fit raser uniquement pour la tranquillité de sa conscience, pour enfin, en un pareil jour, avoir accompli tous ses devoirs. Le respect religieux du bouton , de l’épaulette, de la patte de col s’était gravé dès l’enfance dans son cerveau comme une obligation indiscutable, et dans son cœur comme l’image du plus haut degré de beauté auquel un homme comme il faut puisse atteindre.
Ayant tout réglé, en sa qualité de responsable de la chambrée, il donna l’ordre d’apporter du foin et veilla avec soin à sa répartition sur le plancher. La même cérémonie avait lieu dans les autres casernes. Je ne sais pourquoi, mais pour la Noël on étendait toujours du foin d’un bout à l’autre de la caserne.
Ensuite, ayant mené à bien tous ses travaux, Joachim Akimytch fit sa prière, se coucha et aussitôt s’endormit d’un sommeil paisible de nouveau-né, afin de se réveiller le plus tôt possible le lendemain. De la même façon, d’ailleurs, agirent tous les forçats. Dans toutes les casernes on se coucha beaucoup plus tôt que d’habitude. Les travaux ordinaires du soir furent laissés de côté ; de
maïdane il n’était pas question non plus. Tout était dans l’attente du lendemain matin.
Il arriva enfin, ce matin. Très tôt, avant le jour, aussitôt sonné le réveil, les casernes furent ouvertes, et le sous-officier de garde entré pour compter les forçats leur souhaita à tous une bonne fête. Ils lui répondirent de même, et cela avec affabilité et gentillesse. La prière vite expédiée, Joachim Akimytch et beaucoup d’autres, qui avaient des oies et des cochons de lait à eux à la cuisine, se hâtèrent d’aller voir ce qui se passait avec eux, comment on les faisait rôtir, où chaque chose était et ainsi de suite. À travers l’obscurité, par les petites fenêtres, obstruées par la neige et la glace, de notre caserne, on voyait, dans les deux cuisines et dans les six poêles, brûler un feu vif allumé avant le jour. Dans la cour, dans l’obscurité, circulaient déjà des détenus dans leurs vestes fourrées soit enfilées, soit jetées sur le dos : tout cela s’affairait vers la cuisine. Mais quelques-uns, d’ailleurs très peu nombreux, avaient déjà rendu visite aux « cabaretiers ». C’étaient, ceux-là, les plus impatients. D’une façon générale, tout le monde se conduisait décemment, paisiblement, avec une espèce de gravité inaccoutumée. On n’entendait ni les jurons habituels, ni les habituelles disputes. Tout le monde comprenait que c’était un grand jour et une grande fête. Il y en avait qui se rendaient dans d’autres casernes, pour saluer quelqu’un des leurs. Il y avait dans l’air une sorte d’amitié."
Dostoïevski Extrait de Récits de la Maison des morts, au chapitre intitulé - La fête de Noël ·

mardi 28 septembre 2010

Une nouvelle d'Edgar Poe

Extrait :
" ... Ses tentatives pour me sortir de la condition de mélancolie anormale dans laquelle j'étais tombé, furent frustrées, en grande partie, par certains volumes que j'avais trouvés dans sa bibliothèque. Ceux-ci étaient d'un caractère à forcer la germination de quelque graine de superstition héréditaire gisant en latence dans mon cœur. J'avais lu ces livres sans qu'il le sache, et ainsi il restait souvent perplexe quant à la raison des impressions qui s'étaient imposées dans mon imagination.
L'un de mes sujets favoris était la croyance populaire dans les augures - une croyance que, à cette même époque de ma vie, j'étais presque sérieusement disposé à défendre. Sur ce sujet nous avions de longues et animées discussions ; lui maintenant le malfondé total d'une croyance en de tels sujets, moi contestant qu'un sentiment populaire apparaissant avec une absolue spontanéité - c'est-à-dire, sans traces apparentes de suggestion - avait en lui-même les éléments évidents de la vérité, et avait le droit à beaucoup de respect.
"

mercredi 22 septembre 2010

Qu'y a-t-il donc au-dessus de l'argent, pour un prisonnier ...


"L’argent avait au bagne une valeur, une puissance énormes. On peut affirmer catégoriquement que le forçat qui avait un tant soit peu d’argent souffrait dix fois moins que celui qui n’en avait pas du tout, bien que ce dernier fût défrayé de tout par l’administration. Quel besoin, semble-t-il avait-il d'argent ? Ainsi raisonnaient nos chefs. Je le répète une fois de plus : si les prisonniers étaient privés de toute possibilité d‘avoir de l'argent à eux, ou bien ils perdraient la raison, ou bien ils mourraient comme des mouches (quoique défrayé de tout), ou bien, enfin, ils se lanceraient dans des forfaits inouïs, les uns de désespoir, les autres pour être au plus vite, d'une façon ou de l'autre, exécutés ou anéantis, ou encore, tout bonnement, pour "changer de vie" (c'est l‘expression technique). Et si le prisonnier, qui a obtenu ses kopecks au prix, dirai-je, de sueurs de sang ou bien en se livrant pour cela à des ruses extraordinaires compliquées souvent de vol ou de filouterie, les dépense cependant aussi inconsidérément, avec une absurdité aussi enfantine, cela ne prouve nullement qu’il ne les apprécie pas, même si à première vue il en donne l’impression.
L’argent, le prisonnier en est avide jusqu’aux convulsions, jusqu’à l’obscurcissement de la raison, et si, véritablement, il le jette par les fenêtres quand il fait la fête, il le jette pour acquérir ce qu’il estime un degré encore au-dessus de l’argent. Qu’y a-t-il donc au-dessus de l’argent pour un prisonnier ? - La liberté, ou tout au moins un rêve de liberté. Les prisonniers sont de grands rêveurs. J’en dirai quelque chose plus tard, mais puisque j’en suis arrivé là : le croira-t-on, mais j’ai vu des condamnés à vingt ans de bagne qui m’ont dit à moi-même, très tranquillement, des phrases comme par exemple celle-ci : «Tenez, attendons un peu ; si Dieu le veut, je finirai mon temps, et alors …» Tout le sens du mot «prisonnier» se réduit à «un homme privé de son libre arbitre» : eh bien, en dépensant son argent, il jouit de son libre arbitre. En dépit de tout, les marques, les fers, les pieux détestés de la prison, qui lui cachent le monde du bon Dieu et l’enferment comme une bête dans sa cage, il peut se procurer de l’alcool, c’est-à-dire un plaisir sévèrement interdit, goûter à la femme, même parfois ( quoique pas toujours ) soudoyer ses chefs immédiats, les invalides et même le sous-officier, qui fermeront les yeux sur ces contraventions à la loi et à la discipline ; il peut même, par-dessus le marché, crâner encore à leurs dépens, et crâner, c’est ce qu’aime à la folie le bagnard, je veux dire faire le fendant devant les camarades et se convaincre soi-même, au moins un instant, qu’il a infiniment plus de pouvoir et de libre arbitre qu’il n’y paraît ; bref, il peut à satiété faire la fête, tempêter, traîner dans la boue n’importe qui, et lui prouver que tout cela, il le peut, que tout cela «est en notre pouvoir», en d’autres termes se convaincre soi-même de choses dont le rêve même est interdit à qui n’a pas d’argent.
À propos : voilà pourquoi, peut-être, chez les prisonniers, même non en état d’ivresse, se remarque un universel penchant à la fanfaronnade, à la vantardise, à l’exaltation comique et archinaïve de leur propre personnage, fût-elle illusoire. Enfin, toute cette ripaille comporte un risque : donc il y a là au moins un fantôme de vie, au moins un lointain fantôme de liberté. Or que ne donnerait-on pas en échange de la liberté ? Quel millionnaire, si on lui serrait un lacet sur la gorge, ne donnerait tous ses millions pour une gorgée d’air ?
Les chefs s’étonnent parfois : tel prisonnier a été plusieurs années si soumis, si exemplaire, on l’a même fait dizenier pour sa bonne conduite, et soudain, absolument de but en blanc, comme si un diable l’avait possédé, il a fait les quatre cents coups, a fait la noce, est devenu violent, parfois même, tout bonnement, s’est risqué jusqu’à un crime capital : ou manque de respect manifeste envers un grand chef, ou meurtre, ou viol, et le reste. Ils le regardent et s’étonnent. Pourtant, de cette soudaine explosion, chez cet homme dont on pouvait le moins l’attendre, toute la cause est peut-être une manifestation convulsive, désespérée, de sa personnalité, un instinctif regret de soi-même, le désir de révéler son être, sa personne humiliée, surgissant brusquement et atteignant à la haine, à la rage, à la déraison, à la crise, aux convulsions. Ainsi peut-être l’enterré vivant, se réveillant dans son cercueil, tape sur le couvercle et s’efforce de le rejeter, quand, bien entendu, sa raison pourrait le convaincre que tous ses efforts resteront vains. Mais c’est justement qu’il ne s’agit pas ici de raison : il s’agit de convulsions. Prenons encore en considération que presque toute manifestation libre de sa personnalité, pour un prisonnier, est qualifiée crime : dans ces conditions, pour lui, naturellement, tout se vaut, manifestation grave ou minuscule. À tant faire que de s’amuser, on s’amuse ! Si on risque, on risque tout, même jusqu’au meurtre. Il ne s’agit que de commencer : ensuite l’homme s’enivrera, vous ne l’arrêterez plus ! Aussi vaudrait-il mieux user de tous les moyens pour ne pas le pousser jusque-là. Tout le monde aurait la vie plus tranquille.
Oui, mais comment faire ?"
Récits de la Maison des morts de Dostoïevski Éd.Garnier p.127-128

lundi 20 septembre 2010

Un extrait de Récits de la Maison des morts

Un petit extrait du livre que je suis en train de lire en ce moment : Récits de la Maison des morts de Dostoïevski. Le titre n'est déjà pas anodin, le contenu du livre encore moins. On constate dès le début une vive curiosité de la part de l'auteur à l'encontre des bagnards, motivée par son désir de les comprendre et la quête d'une guérison possible des âmes de ces réprouvés. L'empathie de Dostoïevski à l'égard des malheureux est palpable. Il vécut quatre ans dans la promiscuité d’un bagne de Sibérie.
 
"Un prisonnier est docile et soumis jusqu’à un certain point ; mais il y a une limite qu’il ne faut pas dépasser. À propos : rien ne peut être plus curieux que ces bizarres flambées d’impatience et de rébellion. Souvent un homme supporte des années durant, se soumet, subit les plus cruels châtiments, et soudain éclate à propos d’un détail, d’une bagatelle, presque sans raison. D’un certain point de vue, on peut même le traiter de fou ; et c’est ce qu’on fait.
J’ai déjà dit que, tout au long de bien des années, je n’ai pas vu chez ces hommes le moindre signe de repentir, ni la moindre pensée pénible à propos de leurs crimes, et que la plupart se juge dans leur for intérieur absolument irréprochable. C’est un fait. Sans doute la vanité, les mauvais exemples, le désir de crâner, la fausse honte en sont en grande partie la cause. D’un autre côté, qui pourrait affirmer qu’il a sondé la profondeur de ces cœurs réprouvés et qu’il y a lu ce qui est caché au monde entier ? Pourtant, il était possible, en tant d’années, de noter, de saisir, d’attraper au vol, dans ces cœurs, au moins un trait quelconque qui eût témoigné d’un regret intérieur, d’une souffrance. Or rien de tel, absolument rien. Oui, le crime, il le semble bien, ne saurait être compris à partir de points de vue tout prêts, donnés une fois pour toutes, et sa philosophie est un peu plus difficile qu’on ne le suppose. Naturellement, les geôles et le système des travaux forcés ne corrigent pas le criminel ; ils se bornent à le châtier et à préserver la société de nouvelles atteintes du malfaiteur à sa tranquillité. Mais pour ce qui est du criminel, la prison et les travaux les plus renforcés ne développent chez lui que la haine, la soif des jouissances interdites et une effrayante insouciance. Je suis fermement persuadé d’ailleurs que le fameux système cellulaire, lui aussi, n’obtient qu’un résultat superficiel, mensonger et trompeur. Il exprime le suc vital de l’homme, énerve son âme, l’affaiblit, l’épouvante ; après quoi, cette momie moralement desséchée, ce demi-dément est présenté comme un modèle d’amendement et de repentir. Évidemment, le criminel qui s’est dressé contre la société la hait, et presque toujours il la juge dans son tort, et lui dans son bon droit. De plus, il a reçu d’elle sa peine, et par suite s’estime presque purifié : il est quitte. On peut considérer enfin, de ces points de vue, qu’il faudrait presque acquitter le criminel.
Cependant, malgré tous les points de vue possibles, tout homme admettra qu’il existe des crimes qui, toujours et partout, d’après toutes les lois possibles et imaginables, sont regardés depuis la création du monde comme des crimes incontestables et le seront toujours tant que l’homme sera homme. C’est seulement au bagne que j’ai entendu raconter les crimes les plus horribles, les plus contre-nature, les meurtres les plus monstrueux, avec le plus irrésistible, le plus gaiement enfantin des rires."
p. 15 16 Éd.Garnier

dimanche 19 septembre 2010

... pour chercher la paix et du travail


"Ils étaient venus clandestinement en Europe pour chercher la paix et du travail. L’occident, c’était le rêve, la liberté, la démocratie, loin du chaos afghan et de la guerre. Arrivés en France, certains de ces clandestins seront renvoyés dans leur pays. Des expulsions qui, à l’époque, vont susciter une certaine émotion. Une équipe d’Envoyé Spécial est retournée sur la trace de ces Afghans. Que sont-ils devenus à leur retour dans leur pays ? Le retour forcé de ces clandestins les a-t-il mis en danger ? Ahmad vivait à Kundunz, aujourd’hui il se cache et tente de survivre à Kaboul : « Ici je risque ma vie à chaque instant. » Mohamed est de retour dans la capitale afghane mais il n’a pas abandonné son désir d’occident. Nick a voulu retourner dans sa province (Paktia) au Sud Est de Kaboul, à la frontière du Pakistan, zone considérée comme le repère d’Al Qaïda dans la région. Il a disparu. Conflits claniques, vendetta, problèmes avec les Talibans, tout est compliqué, dangereux pour ceux qui ont goûté à l’occident."
La video : http://envoye-special.france2.fr/index-fr.php?page=reportage&id_rubrique=1703

vendredi 17 septembre 2010

Dostoïevski - Récits de la Maison des morts

Extrait de l'introduction, par Pierre Pascal
Les événements premiers
Les Récits de la Maison des morts sont bien différents, à tous égards, de tout ce que Dostoïevski avait écrit jusque-là. Ils sont le résultat d'une expérience qui a coupé sa vie en deux : avant le bagne, après le bagne. Aussi pourrions-nous, à la rigueur, nous dispenser, en étudiant cette œuvre, de rechercher les événements qui l'ont précédée. Cependant il serait trop paradoxal de présenter au lecteur des souvenirs du bagne sans lui dire pouquoi leur auteur a été au bagne ; et surtout la connaissance de Dostoïevski pendant son procès et lors de sa condamnation peut servir à expliquer comment il a pu, au bagne, survivre, s'instruire et devenir meilleur. Enfin, sur bien des points, l'exposé qui va suivre sera le meilleur commentaire des Récits.
C'est à sa participation aux activités du cercle de Petrachevski que Dostoïevski a dû cette exceptionnelle expérience.
En 1848, en face des révolutions qui renversèrent et ébranlèrent tant de monarchies, l'autocratie russe demeura solide comme un roc. Mais le tsar Nicolas Ier n'en redoutait pas moins les répercussions possibles dans son Empire. Depuis plusieurs années d'ailleurs, la fameuse " Troisième section de la Chancellerie de S.M.I." était alertée. Elle savait que diverses réunions se tenaient dans des maisons de Saint-Pétersbourg, où l'on traitait de questions sociales et politiques dans un sens défavorable à l'ordre établi.
Un de ces cercles, le principal sans doute, était celui de Michel Boutachevitch-Petrachevski, un fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères. ...
Tous les vendredis soir, jusque tard dans la nuit, avaient lieu chez lui, depuis le début de 1846, des assemblées organisées où se rencontraient des littérateurs, des professeurs, des officiers, des étudiants, tous jeunes, tous curieux des idées occidentales, tous mécontents du régime et persuadés de la nécessité de réformes radicales en Russie. Le nombre des assistants variait entre vingt et cinquante ; les uns disparaissaient ; de nouveaux venaient. Petrachevski lui-même les recrutait. C'était une personnalité forte, perpétuellement exaltée, capable d'exercer par ses connaissances, son inlassable activité, l'ardeur de ses convictions et l'étendue de ses relations, une large influence. La doctrine qu'il professait était le fouriérisme, mais parmi les assistants beaucoup d'autres idées, au cours des discussions, se faisaient jour.
Des renseignements sur ce qui se passait dans le cercle furent recueillis à partir de mars, et surtout de décembre 1848, date à laquelle y fut introduit l'étudiant Antonelli, agent secret de Liprandi, le fonctionnaire chargé de la surveillance de Petrachevski. La police apprit ainsi les noms des frères Dostoïevski, de Serge Dourov, littérateur, de Jastrzembski, professeur de l'Institut technologique, de Nicolas Spiechnev, ancien élève du Lycée Alexandre, de l'ex-étudiant Alexis Plechtcheev, et d'autres ...
Elle apprit aussi, au fur et à mesure, quelles questions étaient débattues dans les assemblées du vendredi. La religion était présentée comme née de la peur des hommes devant la mort et de la ruse de quelques-uns : faisant appel à des sentiments bas, elle ne pouvait être que nuisible à la société ; d'un exposé sur la statistique, on en venait à la nature de l'État russe, pour traiter son souverain de Bogdykban ou Empereur de Chine ; après des considérations sur l'administration, on discutait de la conduite à tenir pour répandre l'idée que tous ses vices provenaient non des subordonnés, mais des autorités supérieures ; on se demandait laquelle des trois réformes était la plus urgente : la liberté de la presse, l'abolition du servage, ou le renouvellement des institutions judiciaires ; on se proposait d'écrire librement sans souci de la censure, car de dix ou vingt idées libres il en subsisterait sûrement cinq ou six : les censeurs devraient eux-mêmes céder à la vérité, et puis on pouvait faire pression sur eux par relations ; on osait même, tout en la jugeant prématurée, envisager l'insurrection populaire.
Des rapports d'Antonelli, il résultait que le principal objectif de Petrachevski et de ses amis était d'agir sur l'opinion : la désaffectionner du régime, en le montrant comme la cause de tous les maux ; la préparer à accepter les grandes réformes et les "changements" désirés. À cela tous les moyens étaient bons : depuis les conversations dans la rue jusqu'à la littérature, et Petrachevski avait reproché un jour à Dostoïevski d'avoir trop peu fait dans ce sens dans ses romans. Un autre but était de former, en vue de ces "changements", des hommes compétents : de là, ces conférences sur la statistique, ces discussions sur la démocratie américaine d'après Tocqueville, cette bibliothèque d'ouvrages économiques et politiques que Petrachevski mettait libéralement à la disposition de ses visiteurs. De là aussi cet autre reproche fait par un de ces derniers aux littérateurs Dostoïevski et Dourov de n'avoir pas lu "un seul livre convenable : ni Fourier, ni Proudhon, ni même Helvetius"
Extrait de l'introduction par P. Pascal de Récits de la Maison des morts de Dostoïevski

lundi 13 septembre 2010

dimanche 12 septembre 2010

"La cérémonie", un film de Claude Chabrol

Musique

Une vérité bonne à entendre

La France est un pays où l’on risque de beaucoup s’ennuyer si l’on n’a pas un peu de recul. Le Français par exemple dénie tout système de caste, l’abjure même dans de grandiloquentes formules - Liberté, Égalité, Fraternité - alors qu'en réalité tout est bel et bien quasiment joué d’avance du point de vue social dans ce pays, selon des codes assez complexes d’apparence mais bien réels. On semble certain en France que vous auriez été résistant si vous êtes confirmé de gauche par les décideurs ; si vous êtes de droite le coup peut se rattraper de diverses façons et dans tous les cas de figure, il en résulte de grands avantages pour votre famille. Par contre, si vous êtes pacifiste en ce doux pays, vous êtes peu ou prou, amalgamé aux collabos de la guerre 40 (même si vous êtes né bien après ces affreux évènements), sauf toutefois, si vous êtes couvert par les mêmes décideurs de la société française qui se portent garants de votre bonne foi, bref tout est quasiment bel et bien joué d’avance, d’où l’ennui que l’on pourrait éprouver à vivre dans un tel pays, et la souffrance pour les enfants du "mauvais côté" si leurs parents "le sont". Mais il arrive que la télé soit intéressante in my land, hier par exemple, j’ai vu sur la chaîne qui prête le moins au zapping les protecteurs des animaux en Inde, appelés les "Bichnoy" (que j’écris en phonétique car je ne connais pas l’orthographe de ce mot), quelle évasion ! C’était magnifique. Sur Arté ensuite, une émission consacrée notamment aux Aztèques, où l’on apprend que même si des sacrifices humains ont bien eu lieu, ils ont été beaucoup moins nombreux que ce qui a été affirmé. Une trentaine de corps découverts dans une fosse … un nombre bien moindre comparé à celui des victimes faites par les conquistadors. J’avais lu un roman dont j’ai presque tout oublié sauf le titre - l’Aztèque -, où l’auteur décrivait des arracheurs de cœurs en série, côté Aztèque … je n’avais à peu près retenu que cela, qui en fait était faux. La vérité est bonne à entendre, pour le coup, non ?

vendredi 10 septembre 2010

Les secrets ...

J’ai terminé la lecture de Chroniques posthumes - Les Secrets d'un village d'Artois au siècle dernier de Gilles Warembourg. Elles se présentent comme des nouvelles, mais reliées entre elles par l’unité des lieux : les deux Fécourt. Les personnages dont il est question étant tous décédés, ils résident tous in eternam dans le même cimetière, l'auteur les ressuscite le temps de raconter leur histoire ; durant leur vie ils ne se sont pas nécessairement tous croisés, mais ont presque toujours entendu les échos de leurs existences respectives. Les histoires sont assez saisissantes, le livre ne va pas se laisser oublier facilement ! "Regrets éternels" quelle absurdité, puisque nous allons tous mourir soufflait l'instituteur, à qui on pourrait écrire en épitaphe : "Il finit par sortir de son puits".

Dictionnaire étymologique

Respect :

Respect 1287, G, "action de prendre en considération" ; Amyot, sens actuel ; lat. respectus, "égard, considération", part. passé subst. de respicere, "regarder en arrière", d’où considérer ...

Responsable :

Responsable 1284, G, n. m. ; 1309, Varin, "admissible en justice" ; XIVe s., Du Cange, sens actuel ; lat. responsus, part. passé de respondere , répondre, au sens de "qui doit répondre de ses actes"...

Répondre :

Répondre 980, Passion (respondre), "dire en retour" ; XIIe s., sens général ; XIIIe s. "se porter garant" ; XIVe s., "être conforme" ...

Garant :

Garant 1080, Roland (guarant), jurid. ; du part. présent du germanique werjan, fournir une garantie ; le premier a est dû à l'attraction de garer, garir, anc. forme de guérir.
Garantir 1080, Roland, "donner pour assuré" ; 1283, Beaumanoir, "assurer contre un évènement fâcheux".
Garantie fin XIe s., Gloses de Raschi.
Larousse - Dictionnaire étymologique et histoire du français J. Dubois, H. Mitterand, A.Dauzat
À propos des gloses de Rachi, voici un site :
http://www.judaicultures.info/Rachi-de-Troyes-une-grande-figure.html

jeudi 9 septembre 2010

Chroniques posthumes de Gilles Warembourg

J'ai commencé à lire un bouquin intitulé Les chroniques posthumes et sous titré Les Secrets d'un village d'Artois aux éditions Le Riffle, dont voici un court extrait du prologue : "À quelques encablures au nord de Béthune, Fécourt souffrant de schizophrénie rurale abrite deux mairies, deux églises, deux écoles, deux cafés ... un cimetière. Les hameaux insignifiants, collés comme deux cellules en parthénogénèse, sont simplement séparés par l'impavide canal d'Aire. " ... Arpentez donc les allées de ces lotissements tranquilles, en vous gardant bien de toute métaphysique absconce ; contentez-vous d'écouter ces potins oubliés, ces anecdotes scrutées derrière les rideaux légèrement écartés, ces petits drames que le temps transforme en farce ..."

lundi 6 septembre 2010

La phrase du jour

"This could not be done under the very nose of police without their knowledge," he added.

The Guardian :

http://www.guardian.co.uk/sport/2010/sep/05/pakistan-cricket-scandal-ipl-betting

dimanche 5 septembre 2010

Video sur TV5 Monde

"Resumé :
"Rafah", c’est le portrait intime d’une ville palestinienne, saisie à vif au cours d’une année de bouleversements (12 septembre 2005 - 12 septembre 2006).
Rafah est située au sud de la bande de Gaza. C’est une ville coupée en deux par la Route Philadelphie, un corridor de sécurité qui marque la frontière entre l’Égypte et la bande de Gaza. Son destin bascule dans la nuit du 12 septembre 2005, quand l’armée israélienne se retire de toutes ses positions de la bande de Gaza. Les Israéliens ont évacué la Route Philadelphie et les colonies qui cernaient la ville ont disparu. Une nouvelle ère peut commencer. Mais Rafah ne sortira jamais de son chaos. Rafah est la capitale du trafic d’armes entre l’Égypte et la bande de Gaza. Depuis le désengagement, ces armes alimentent de sanglantes guerres entre familles. Après la victoire du Hamas aux élections législatives, la ville sombre dans une crise économique majeure. Le 25 juin 2006, le caporal israélien Gilad Shalit est kidnappé depuis un tunnel creusé à partir de Rafah. Tsahal, en représailles, bombarde les maisons des trafiquants d’armes, situées le long de la Route Philadelphie.
Le 12 septembre 2006, un an après le désengagement, tous les espoirs de renouveau se sont envolés."
La video : http://tv5monde.vodeo.tv/documentaire/rafah
Je viens d'écouter Leila Shahid sur TV5 Monde ... admiration. On a raison de se préoccuper de la situation des Roms en France, mais l'on relativise tout, ses propres problèmes y compris, à la vue des reportages sur la Palestine, la Somalie etc. Tant de vanité chez l'homme alors qu'il se produit encore de tels drames !

vendredi 3 septembre 2010

Coopération pertinente

Le volontariat de solidarité internationale répond surtout à une demande des sociétés du Nord. Une bonne volonté inefficace, voire destructrice, quand elle est fondée sur une vision descendante ou erronée des besoins du Sud. Mais avec la conscience que l'on a plus à apprendre qu'à donner peut émerger une coopération plus pertinente.
http://alternatives-internationales.fr/page.php?lg=fr&id_publication=947&id_article=50344&ogn=MODNL_152&prov=&cat=

Frédéric Bastiat - Justice et fraternité

" ... Chacun de ces Décius a un plan qui doit réaliser le bonheur de l’humanité, et tous ont l’air de dire que si nous les combattons, c’est parce que nous craignons ou pour notre fortune, ou pour d’autres avantages sociaux. Non ; nous les combattons, parce que nous tenons leurs idées pour fausses, leurs projets pour aussi puérils que désastreux. Que s’il nous était démontré qu’on peut faire descendre à jamais le bonheur sur terre par une organisation factice, ou en décrétant la fraternité, il en est parmi nous qui, quoique économistes, signeraient avec joie ce décret de la dernière goutte de leur sang.
Mais il ne nous est pas démontré que la fraternité se puisse imposer. Si même, partout où elle se manifeste, elle excite si vivement notre sympathie, c’est parce qu’elle agit en dehors de toute contrainte légale. La fraternité est spontanée, ou n’est pas. La décréter, c’est l’anéantir. La loi peut bien forcer l’homme à rester juste ; vainement elle essaierait de le forcer à être dévoué.
Ce n’est pas moi, du reste, qui ai inventé cette distinction. Ainsi que je le disais tout à l’heure, il y a dix-huit siècles, ces paroles sortirent de la bouche du divin fondateur de notre religion :
« La loi vous dit : Ne faites pas aux autres ce que vous ne voudriez pas qui vous fût fait.
Et moi, je vous dis : Faites aux autres ce que vous voudriez que les autres fissent pour vous. »
Je crois que ces paroles fixent la limite qui sépare la Justice de la Fraternité. Je crois qu’elles tracent en outre une ligne de démarcation, je ne dirai pas absolue et infranchissable, mais théorique et rationnelle, entre le domaine circonscrit de la loi et la région sans borne de la spontanéité humaine."

"À quelque point de vue que je considère la loi humaine, je ne vois pas qu’on puisse raisonnablement lui demander autre chose que la Justice.
Qu’il s’agisse, par exemple, de religion. Certes, il serait à désirer qu’il n’y eût qu’une croyance, une foi, un culte dans le monde, à la condition que ce fût la vraie foi. Mais, quelque désirable que soit l’Unité, — la diversité, c’est-à-dire la recherche et la discussion valent mieux encore, tant que ne luira pas pour les intelligences le signe infaillible auquel cette vraie foi se fera reconnaître. L’intervention de l’État, alors même qu’elle prendrait pour prétexte la Fraternité, serait donc une oppression, une injustice, si elle prétendait fonder l’Unité ; car qui nous répond que l’État, à son insu peut-être, ne travaillerait pas à étouffer la vérité au profit de l’erreur ? L’Unité doit résulter de l’universel assentiment de convictions libres et de la naturelle attraction que la vérité exerce sur l’esprit des hommes. Tout ce qu’on peut donc demander à la loi, c’est la liberté pour toutes les croyances, quelque anarchie qui doive en résulter dans le monde pensant. Car, qu’est-ce que cette anarchie prouve ? que l’Unité n’est pas à l’origine, mais à la fin de l’évolution intellectuelle. Elle n’est pas un point de départ, elle est une résultante. La loi qui l’imposerait serait injuste, et si la justice n’implique pas nécessairement la fraternité, on conviendra du moins que la fraternité exclut l’injustice."

 
http://fr.wikisource.org/wiki/Justice_et_fraternit%C3%A9

jeudi 2 septembre 2010

Jean Claude Léonard Poisle Desgranges

Poésie et humour avec JC L Poisle Desgranges


LE BLUET
La nature, toujours variée dans ses combinaisons, a su entremêler ses bienfaits de manière à éviter l’uniformité dans les nuances ; ainsi, au milieu d’une nappe dorée d’épis, on retrouve épars çà et là le bluet dont le nom indique suffisamment la couleur. C’est avec son calice azuré, détaché de sa tige, que les habitants des champs se tressent des couronnes que l’ambitieux citadin ne leur envie guère.

Au courage mâle et guerrier
Echoit pour couronne un laurier ;
A tout moderne Démosthène
On offre la feuille de chêne ;
Pour la bergère qui lui plaît
Le berger tresse le bluet.
 
 
 
Si des bords fortunés où coule le Parnasse,
Les enfants d’Apollon ont moissonné les fleurs ;
Il peut être permis aux timides auteurs
De cueillir les bluets que le hasard leur laisse.

LE LIMACON ET LA CHENILLE
Fable
A quoi sert, disait la chenille
A certain limaçon,
De vous cloîtrer d’aussi sotte façon
Dans votre ennuyeuse coquille ?
En vérité, le ciel n’y pensait pas
Quand il vous fit cette triste masure ;
Sans la traîner vous l’osez faire un pas ;
C’est une erreur de l’antique nature.
Bien plus que vous la nature eut raison,
Dit l’escargot à la dame railleuse :
Elle a rendu ma destinée heureuse.
Rien de plus cher que ma simple maison ;
Lors des frimas, elle est mon seul refuge,
J’y brave en paix et chaleurs et déluge.
Aux douceurs de la liberté
Je préfère ma sûreté.
En s’étalant, l’indiscrète commère
Riait tout bas de ses sages raisons,
Et se jouant de diverses façons,
Raillait son lourd et tranquille adversaire
Qui, Diogène nouveau,
N’osait sortir de son tonneau,
Mais tout-à-coup l’atmosphère se couvre,
L’aquilon souffle, un nuage s’entr’ouvre
Et de grêlons blanchit les alentours ;
Or, des rivaux finirent les discours.
Le limaçon rentra dans sa coquille.
Point n’en fut onc pour la pauvre chenille ;
Qui reconnut à son dernier soupir :
Qu’utilité passe avant le plaisir.
Jean Claude Léonard Poisle Desgranges ( Wiki source)

mercredi 1 septembre 2010

En feuilletant le dictionnaire

To stand out from the crowd, ... to follow the crowd ...

Parfois on n'a pas le choix, on aurait aimé se cacher, et un évènement inattendu vous propulse "out", contre votre gré, le destin force les choses et la vie se complique. Le problème du hors norme.

Je suppute que des surdoués ne sont pas toujours flattés de l'être tant ils auraient aimé être des gens ordinaires, sans histoire afin qu'on leur fiche la paix. Une vie rangée où l'on peut vivre ses amours entre époux, amants et enfants, comme c'est enviable ! Dès lors que l'on "se fait remarquer", "pas comme tout le monde", il y a réduction de liberté, on peut vous projeter tout un tas de choses, fantasmes, sur le dos. Une vie rangée, comme on dit, où l'on se fait tout petit, semble souvent être, paradoxalement, source de liberté.

Et puis quand les histoires arrivent parce que quelque chose ne tourne pas rond, au niveau de la santé par exemple, adieu délices du confort, c'est le grand huit, hauts-le-cœur en perspective.

To follow the crowd ... "Emportée par la foule", comme chante Piaf dans sa tragique chanson. La pierre ne roule plus, vous devenez un vulgaire caillou anonyme qui se perd ; dans le pire des cas, instrument de lynchage peut-être. Mais bon, il y a de bonnes foules, un festival en attire de pas mauvaises en général.

Vivre et travailler à sa propre histoire, du mieux possible, avec s'il le faut quelques vagues ... un peu plus loin, que lis-je à la page dico du jour : "You have to be cruel to be kind", équivalent de "Qui aime bien châtie bien", autre configuration à explorer. Je vais étudier cette question sur le chemin tout tracé de la poste, ma lettre arrivera comme d'habitude à bon port, les facteurs sont très réglos dans la région, il n'empêche qu'ils vivent sans doute des choses très intenses pour certains d'entre eux, et très banales à la fois au regard des autres, ce qui ne gâche rien.