jeudi 31 décembre 2015

Message reçu

Je vais visionner cette video dès que j'aurai un moment (car elle dure un certain temps), découverte en ouvrant un mail et qui me semble très intéressante, (j'ai pris cinq minutes pour voir le début) :

https://www.youtube.com/watch?v=XdsAHMOX3IA&feature=youtu.be

J'ai eu le temps, heureux temps !, de m'émerveiller de ce court texte de Madame Bebe, ici : http://jubilatedeo.hautetfort.com/archive/2015/12/31/morceaux-choisis-412-pauline-bebe-5726019.html

mercredi 30 décembre 2015

Que recouvrent les mots....



Que recouvrent les mots "enfant-dieu" du poème mis en ligne le post précédent ?  Parce que toute personne, du bébé au vieillard,  se trouvant en dieu et dieu se trouvant en elle pour un croyant, "enfant-dieu" dans l'absolu est heureusement banal. Mais le poète a voulu faire allusion peut-être à la focalisation faite sur un enfant, dans une sorte de culte de la personne, au détriment des autres. Focalisation  destructrice.  Il aura voulu faire allusion à cela à mon sens.

mardi 29 décembre 2015

Le poème du jour : Animals d'Alfred Kreymborg

 Quel animal tu es
ou si tu es un animal,
je suis trop stupide pour le dire.
Certains moments
je pense que tu es issu de la terre,
de quelque froide pierre blanche du fin fond de la terre.
Ou l'idée m'effleure
et persiste dans un coin de ma tête
que tu as glissé d'un arbre
quand la terre a cessé de tourner,
que tu t'es amenée dans une coquille bleue
quand la mer a été fatiguée de valser.
Tu pourrais être une souris,
la dryade d'un pivert,
ou un pur rêve de poisson minuscule ;
tu pourrais être quelque chose tombé du ciel,
pas un enfant-dieu —
je ne te voudrais pas en cela —
non plus un nuage —
bien que j'aime les nuages.
Tu n'as rien d'un oiseau,
je peux le dire.
Si je pouvais te trouver quelque part
au dehors
 de moi, je pourrais dire —
mais dedans ?

Animals - Poem by Alfred Kreymborg

What animal you are
or whether you are
an animal, I
am too dumb to tell.
Some moments,
I feel you've come out of the earth,
out of some cool white stone
deep down in the earth.
Or there brushes past
and lurks in a corner
the thought
that you slipped from a tree
when the earth stopped spinning,
that a blue shell brought you
when the sea tired waltzing.
You might be a mouse,
the dryad of a woodpecker,
or a pure tiny fish dream;
you might be something dropped from the sky,
not a god-child-
I wouldn't have you that-
nor a cloud-
though I love clouds.
You're something not a bird,
I can tell.
If I could find you somewhere
outside
of me, I might tell-
but inside?

lundi 28 décembre 2015

Le texte de ce matin

J'ai lu un texte ce matin, de Claire d'Assise s'adressant à Agnès, sur Jubilate Deo ; ce texte parle de contemplation. Il en émane une quiétude immense. Moi qui disais dans le post précédent "parmi les autres et avec les autres" je réalise après cette lecture  que je m'adressais essentiellement aux jeunes, contre le recroquevillement. Mais j'imagine Claire écrivant les lignes que j'ai lues. Elle devait être, pour écrire ce qu'elle a écrit, dans son monde, en compagnie d'êtres transparents, pour de bon ceux-là, dans une solitude n'étant qu'apparente.  On sent une assurance dans ces lignes, elle ne doute pas, elle est en présence. C'est très beau.

Ici  : http://jubilatedeo.hautetfort.com/archive/2014/08/22/morceaux-choisis-118-claire-d-assise-5432494.html


dimanche 27 décembre 2015

Impression

Ce matin Patrick et moi avons vu un jeune homme tout seul à la gare d'eau, ce qui n'est pas rare, sauf que celui-ci avait l'air hésitant de quelqu'un qui se demande ce qu'il fait là. Il était black, peut-être nouvellement arrivé dans la ville. J'ai tenu à lui dire bonjour et il a marmonné un "bonjour" un peu timide et grognon en retour. Il semblait ne pas savoir quoi faire,  donnait l'impression de n'être pas  à l'aise. Enfin, comme beaucoup de monde le fait à la gare d'eau où nous nous trouvions, il s'est mis à courir, c'est un lieu en effet où la plupart des gens viennent pour s'adonner au jogging. "Mon bonjour l'aura mis plus à l'aise mine de rien et voilà, maintenant il court", j'ai dit ce genre de chose à mon ami qui m'a répondu que c'était possible. Il courait le petit père et, faisant plusieurs fois le tour de la gare d'eau, nous l'avons régulièrement rencontré encore et encore en l'espace d'une heure car il courait vite. Chaque fois qu'il nous croisait, je lui souriais ostensiblement, et je pense que sous ses paupières moitié baissées il voyait ce sourire. "Cours petit père, sois à l'aise."  pensai-je... m'était venu à l'esprit cette chose anodine à première vue : les jeunes s'agglutinent dans leurs quartiers, qui deviennent parfois des zones de non-droit raconte-t-on,  à force de ne pas oser se mettre à l'aise partout ailleurs. Figés dans un cocon et finissant par y macérer. Par impression de n'être pas à leur place partout ailleurs ?  D'où le mal être. À méditer. Enfin, celui-là, ce matin, s'est lancé et ça avait l'air de lui réussir de se défouler comme ça parmi les autres et avec les autres.   

Histoire ce matin

Visitant le site Livre Audio, je choisis de réviser l'histoire avec l'assassinat du duc d'Enghien.

Je n'ai jamais trouvé Bonaparte sympathique, parce qu'il a instauré un régime très autoritaire après que les gens qui avaient cru en la Révolution eurent espéré un régime plus démocratique. Révolution maladroite par ailleurs, faite de violence et de démesure....  celle de Ghandi  étant tellement  ardue à faire qu'elle semble réservée à un peuple de résistants hors norme, dotés de nerfs d'une solidité à toute épreuve.

Partout la violence, c'est pourquoi sans doute la politique dégoûte, ne réussissant pas à sortir du bourbier sanglant de cette violence.

Tu proverai si come sa de sale
Il pane altrui, e com' è duro calle
Lo scendere e'l salir per l'altrui scale.
E quel che piu ti gravera le spalle,
Sarà la compagnie malvagia e scempia,
Con la qual tu cadrai in questa valle ;
Che tutta ingrata, tutta matta ed empia
Si farà contra te.
..............................................
Di sua bestialitate il suo processo
Sarà la pruova : si ch'a te sia bello
Averti fatta parte, per te stesso.

" Tu sauras combien le pain d'autrui a le goût du sel, combien est dur le degré du monter et du descendre
de l'escalier d'autrui. Et ce qui pèsera encore davantage sur tes épaules, sera la compagnie mauvaise et hérétique avec laquelle tu tomberas et qui toute ingrate, toute folle, toute impie, se tournera contre toi.
" (...) De sa stupidité sa conduite fera preuve ; tant qu'à toi il sera beau de t'être fait un parti de toi−même. "


Bonaparte règle son compte au duc, c'est ici :

http://www.litteratureaudio.com/livre-audio-gratuit-mp3/chateaubriand-francois-rene-de-memoires-d%E2%80%99outre-tombe-deuxieme-partie-livre-16.html

 

samedi 26 décembre 2015

Le livre lu

J'ai terminé la lecture de Déodat et la transparence. Un bon livre ! Sur le plan philosophique il dit beaucoup de choses. Michel Zink rejoint quelque peu Cervantès dans sa perception du chevalier  vivant dans un conte. En quête d'aventures, du Graal notamment, quête étrangement fantasque, réservée à quelques chevaliers de haut lignage  selon les uns,  mais allez savoir avec le christianisme, un obscur peut prendre la place d'un légitime, si les chevaliers n'y prennent garde !

La question des enfants issus d'unions jugées illégitimes est abordée sous plusieurs angles. En découle celle du mépris, largement traitée dans cette histoire avec l'expérience de la transparence justement, où l'on se trouve dans l'au-delà du mépris.

Pourquoi le "bâtard" number one, fils illégitime d'un roi,  tient-il tant à la gloire, à cette quête du Graal ? Besoin de reconnaissance, d'amour pourrait-on dire, sinon d'amour, alors de considération. Or ici,  les "bâtards", tout fils de roi qu'ils fussent, ne sont rien dans le milieu où ils évoluent. Rien de rien, au point que personne ne les regarde, on les voit sans les voir, si bien qu'ils se vivent comme des êtres transparents.

Dans ce livre sublime, l'on découvre comment la situation  se retourne pour Déodat, grâce à une prise de conscience, et le privilège qu'il va tirer de sa transparence.

C'est le livre de la consolation par excellence, sublime.    

Le punch

Du punch à chasser les démons, avec Chuck Berry et Tina Turner :

https://www.youtube.com/watch?v=F1LZuQ9E4JQ

vendredi 25 décembre 2015

Enthousiasme + le message de Jean Paul en fin de post

Enthousiasme des enfants aujourd'hui, ouvrant leurs cadeaux ! C'est d'abord la fête des enfants Noël. Il faut dénicher chacun, où qu'il soit ... dans une tente boueuse de réfugiés, dans un appart pas aux normes, au fin fond d'un handicap. J'ai vu à la télé que ces démarches étaient sinon totalement accomplies, du moins les gens autorisés ont-ils fait le maximum. Car en Europe il vaut mieux avoir l'aval des autorités pour démarcher auprès des enfants... sinon c'est plus que risqué, si sincères soient  les intentions.

Et puis Noël, c'est la fête aussi de tous les enfants que nous avons été, avec qui chacun se doit d'être encore en lien, sinon de faire effort pour l'être, question de mémoire et d'humanité.

Mon cadeau de Noël, en plus d'une BD que je partage avec mon compagnon, c'est aussi le roman médiéval Déodat ou la transparence puisque je le découvre en cette période de Noël et qu'il m'enthousiasme. J'avais dit que je ne mettrais que deux extraits mais le livre est  riche en informations de toutes sortes sur le Moyen-Age, son concept philosophique concernant la foi l'est aussi, si bien que voici le troisième extrait. Trois extraits, pas plus, sinon il y aurait abus.

Avant la lecture de cet extrait, il faut savoir que Déodat a eu la surprise de rencontrer un vrai lion dans la forêt (de Brocéliande, sûrement),  le fauve est le serviteur du chevalier Yvain, fils de Roi. La première confrontation du lion et de Déodat est à lire, mais l'extrait aura  trait à la seconde, plus explicite quant à la condition de Déodat, qui est maintenant au service d'Yvain, fils de roi. Troisième et dernier extrait :

"Le sentier se perdait d'abord dans une coupe envahie de hautes ronces et d'alisiers nains, puis il pénétra à nouveau sous le couvert des arbres. C'étaient des sapins touffus. Le sous-bois était mort. Des aiguilles brunes, parfois la tache blanche d'un grand champignon mauvais, suintant son lait amer. Il faisait sombre comme si le jour avait baissé d'un coup. Frôlant silencieusement les troncs rougeâtres  qui parfois le cachaient, le lion semblait être redevenu sauvage. Il n'avait plus rien de la bête indifférente et bonasse qui somnolait entre les jambes du cheval. Quand Déodat l'approchait de trop près, il s'arrêtait net et grondait, puis regardait le chevalier, comme s'il quêtait l'autorisation d'attaquer. Sans tourner la tête, d'un geste ou d'un murmure, Yvain l'apaisait. Le sentier s'élargit, le cheval allongea le pas, disparut au tournant. Le lion, qui le précédait l'instant d'avant, surgit soudain devant Déodat, lui barra le passage, les yeux toujours à demi clos, mais à présent attentifs et brillants. Comme lors de leur première rencontre, Déodat se figea, retenant son souffle. Il aurait voulu appeler Yvain, mais il craignait de voir le lion bondir au son de sa voix. Le temps s'était arrêté dans le silence crépusculaire du sous-bois immobile. Une branche craqua et Yvain reparut.

— N'essaie pas de te glisser entre lui et moi. Marche à quelques pas derrière. Ne lui dispute pas sa place à côté de son maître.

Déodat se sentit mortifié, non pas tant d'avoir été surpris une fois de plus terrorisé par le lion que de devoir lui céder le pas et de se voir assigner une place inférieure à celle d'une bête dans le service du chevalier. N'était-ce pas pire encore que d'avoir été, à Camaalot, le serviteur des écuyers ? Il ne lui restait que la satisfaction d'avoir assez d'existence aux yeux du lion pour que celui-ci fût jaloux de lui. Il lui fallait bien se contenter de cette existence, puisque c'était la seule qui lui fût consentie.

Ils descendaient un pendant assez raide. Aux sapins avait succédé une hêtraie où les bruits de la forêt se faisaient à nouveau entendre : le chant d'un oiseau, la cascade d'un ruisseau. Mais il y faisait à peine plus clair, car à présent le soir tombait. Dans une clairière, un minuscule potager, une cabane de branchages, la croix de bois d'un oratoire signalaient un ermitage. Déodat devina qu'ils y passeraient la nuit. Il se demanda si la providence l'avait placé sur leur chemin ou si Yvain avait prévu cette étape et connaissait, pour les avoir déjà parcourues en tous sens, ces forêts où il semblait errer à l'aventure. Faisait-on seulement semblant de se perdre dans ce monde de signes et de reconnaissances ? Si tel était le cas, la règle de ce jeu, qu'il ignorait, l'excluait sans doute pour toujours.

Ce soir-là, dans la cabane, Yvain et l'ermite parlèrent de la quête du Graal. Déodat écoutait dans un coin d'ombre. Il avait pris soin de laisser au lion la meilleure place, aux pieds du maître et au coin du feu."

Michel Zink  Déodat ou la transparence


Vient ensuite une analyse de l'auteur, toujours sur le mode du récit, de l'ermite en question qui, comme le moine que Déodat a  rencontré à la chapelle de saint Augustin, se montre d'une extrême méchanceté à l'encontre de Déodat, sous couvert de ses principes religieux.  Déodat est bâtard, il n'a donc pas le droit d'exister, Dieu l'a maudit. Mais Déodat a une autre conception de Dieu, bien plus belle.

Et je n'oublie pas Jean Paul, le lion généreux qui n'a pas vraiment à voir avec le lion de Déodat. Ce qu'il dit ici est tout à fait justifié : "En ces temps de fêtes, il faut de l'inédit, de l'insolite, du sensationnel.
Alors après votre foie gras issu d'un gavage forcé immonde, vous prendrez bien un steak de crocodile, de kangourou ou de zèbre !"

Merci à toi Jean Paul, bon Noël quand même.     

 

jeudi 24 décembre 2015

Bon Noël !


L'histoire de la décoration de ce sapin de Noël vaut la peine d'être signalée. Les petites choses dorées, que l'on prendrait facilement pour une guirlande, sont en fait des emballages de pralines, que j'ai récupérés auprès d'une animatrice Auchan qui présentait aux clients ces chocolats qu'ils dépouillaient sur le champ, j'imagine, du papier doré dans lequel ils étaient entortillés. L'animatrice avait une poubelle à ses côtés, uniquement remplie de ces papiers.  Une oie sauvage en origami, à gauche, confectionnée à partir d'un triangle  découpé dans une feuille de papier A4, à droite, une grue "en plein vol" elle aussi : idem, à partir d'une feuille de papier A4 ;  les boules, nommées "Pommes d'ambre" par l'origamiste qui les inventa, je les ai confectionnées dans des chutes de papier cadeau et les flocons de neige sont constitués  de boules de ouate ( "de toutes les matières c'est la ouate que j'préfère"... vieille chanson des années 80) ou alors à partir d'une feuille A4 découpée en hexagone. Deux étoiles superposées pour n'en faire qu'une à branches plus nombreuses, au sommet du sapin : toujours de l'origami. Vive le papier récupéré ! 

J'ai pris plaisir à recycler tout ça... chacun, à un moment donné,  se choisit ou se construit son Noël. Pour les uns le recueillement, pour les autres, bombance.
 L'origami exige, pour être réalisé comme il faut,  une sorte de recueillement, au calme à la maison. Recueillement tout à fait bienvenu pour moi que l'agitation frénétique au dehors fatigue.

Bon Noël !


 



mercredi 23 décembre 2015

Rectificatif du post précédent

Dans le court résumé du post précédent, il y aurait comme  une erreur. Le roi Arthur  souffrant de quelque chose qui ressemble à de la neurasthénie, — il n'est pas même bipolaire, mais constamment abattu — en tant que roi,  ne cherche pas aventure comme les chevaliers, si sacrées sont-elles censées être. En fait il demande que Cahus le serve durant un court pèlerinage, (pouvant être aussi  une aventure, au sens sacré du terme) à la chapelle de saint Augustin, à une demi-journée de là à cheval, en vue de sa guérison. Le choix de Cahus comme serviteur est étrange, car comme son frère Déodat, Cahus, bien que travaillant  au château du roi Arthur souffrait assez d'être ignoré de tous.

Deuxième et dernier extrait :

"Il [ Déodat ] ne devait plus confronter son rêve à ceux des autres [la quête du Graal], son double à leur passé. Il devait suivre sa propre route, garder les yeux ouverts et mener son enquête.

Jusque-là, elle ne l'avait pas mené bien loin. À peine l'avait-on laissé voir le corps de son frère. Sur le pavement de la grande salle, il avait vu des traces de pas boueux et du sang. C'était le sang de Cahus. Étaient-ce aussi ses traces ? Avait-il marché, sanglant, sur ces dalles ? Était-il sorti du château ? Était-il vraiment allé à la chapelle de saint Augustin ? Avait-il menti, s'était-il trompé en prétendant avoir rêvé ? C'était impossible. Le château était fermé, gardé. Il fallait plusieurs heures de chevauchée pour gagner la chapelle de saint Augustin et pour en revenir. Une journée. Jamais Cahus n'aurait eu le temps de couvrir autrement qu'en rêve sa journée vers la mort. Traces de pas, traces de sang : tous avaient marché dans la salle, tous s'y pressaient, venant de tous les recoins du château et de tous les logis du bourg. Le corps avait été soulevé, retourné, transporté dans la chapelle.

Non, Cahus n'avait pu quitter le château. Quelqu'un  était entré dans la salle, s'était approché de lui pendant son sommeil, avait glissé le chandelier dans sa botte, lui avait porté le coup mortel. Personne ne prenait garde à Cahus vivant, personne ne le regardait vivre, mais il s'était trouvé quelqu'un pour juger qu'il devait mourir.

Mais le rêve ? Comment expliquer le rêve ? Tous avaient entendu le récit de Cahus. Tous le lui avaient rapporté dans les mêmes termes. Tous lui auraient-ils menti ? Il se savait trop insignifiant pour qu'on  prît la peine d'élaborer à son intention un tel mensonge.

Des chevaux au grand trot sur le chemin, de l'autre côté du mur. Cinq, six chevaliers revêtus de toutes leurs armes, la lance droite dont le long gonfalon flotte légèrement. Le roi Arthur se rend à la chapelle de saint Augustin. Non pas seul, suivi d'un seul écuyer. La mort de Cahus fait planer sur lui un danger, une menace. On lui a imposé une escorte.

Déodat escalada le mur du cimetière et sauta sur le chemin. Une fois de plus il suivait en cachette et à pied des chevaliers en route vers l'aventure. Il y parvint sans difficulté. À peine atteint le couvert des arbres [...] Un peu avant le jour ils atteignirent la chapelle.

Sur le seuil, trois moines blancs attendaient le roi. Arthur se tourna vers l'un de ses chevaliers et lui prit des mains le chandelier que Cahus avait tiré de sa botte. Il le remit aux moines avant même de mettre pied à terre.

À présent, sur l'autel, les deux chandeliers d'argent étaient garnis de cierges allumés. L'un disait la messe que les deux autres servaient. [...] Quand il [Déodat] était entré, son épaule avait heurté le chapiteau d'une colonne engagée et la courbure de la voûte ne lui aurait pas permis de se tenir debout contre le mur.  En franchissant le porche, il avait d'instinct baissé la tête.

[...] La messe s'achevait. Il sortit pendant que le célébrant expédiait la lecture du dernier Évangile et se mêla dehors au petit groupe des écuyers. Certains le connaissaient un peu. Aucun ne parut surpris de le voir. Aucun ne prit la peine de lui adresser la parole. Il crut devoir prendre les devants, répondre aux questions qu'on ne lui posait pas : il était venu là à cause de ce que son frère avait dit avant de mourir."

Michel Zink,  Déodat ou la transparence  Un roman du Graal, paru aux Éditions du Seuil

mardi 22 décembre 2015

Un extrait de Déodat ou la transparence - Un roman du Graal, de Michel Zink



Petit résumé avant l'extrait : Cahus et Déodat sont deux frères. L'aîné, Cahus, vient de mourir  à peine le roi Arthur venait-il de l'avoir choisi pour le servir dans une aventure, "aventure" utilisé ici selon le sens sacré qu'accordaient à ce mot les Chevaliers de la Table Ronde. Cette mort est plus que mystérieuse, puisqu'un "rêve avéré" semble l'avoir causée.

L'extrait :

"Cahus avait été enterré dès l'aube, dans la hâte, après le bredouillement pressé d'une brève absoute. Déodat connaissait à présent les circonstances de sa mort et la teneur de son rêve, mais seulement parce que tous en parlaient et qu'il lui avait suffi d'écouter les conversations pour en surprendre le récit, non parce qu'il avait obtenu qu'on le lui fît à lui-même. Du départ de leur père, nul ne soufflait mot.

Leur père. Ils étaient les fils d'Yvain l'Avoutre. Ils étaient les fils du bâtard. Pas de n'importe quel bâtard, hélas ! mais du bâtard qui portait le même nom que l'un des chevaliers les mieux nés de la Table Ronde, Yvain, fils du roi Urien, l'époux de la belle Laudine. Ils étaient les fils d'un bâtard qui semblait vouloir se parer d'une dignité usurpée. Leur père n'était pas Yvain Fils de Roi. Il était réputé n'être le fils de personne. Son surnom le rappelait à chaque instant. Ils étaient les fils de celui qui n'a pas de père, pire, de celui que son père n'a pas avoué. Ils avaient une famille, puisqu'ils avaient un père, mais ils n'avaient pas de lignage. Ils étaient nobles. la mère de leur père l'était et celui dont leur père était né, on le savait bien, l'était aussi. Mais ils étaient nobles sans reconnaissance de leur noblesse. Ils ne s'adossaient pas à cette suite des générations, à cette lignée, à ce lignage, qui donnaient à chacun autour d'eux une assurance qu'ils enviaient, le sentiment d'être à sa place au premier rang, parmi les grands, auprès du roi, non par un mérite personnel qui l'aurait distingué, mais parce qu'il se fondait dans la succession de ses aïeux et qu'il était le dernier de leur lignée. Cet orgueil du nom et du lignage, qui est, sinon une sorte d'humilité, du moins une forme d'oubli de soi-même, leur était interdit.

Quelle fierté et quel modèle auraient-ils tirés d'un passé qui ne remontait qu'à une grand-mère, et une grand-mère marquée par la faute ? Et que peut-on être sans passé, sans la mémoire des morts qui nourrit les pensées, les goûts, la conscience des vivants ? Pourtant, le passé qui remonte à une grand-mère n'est-il pas le plus lointain des passés ? Un lignage ancien se perd dans une mémoire morte. Son histoire, qui peut-être apprise par tous, appartient à tous. Le vrai passé, le passé vivant de chacun, celui qui a pour lui une saveur, celui qui résonne en lui, n'est jamais que le passé proche, mais assez enfoui pour paraître lointain, le passé que son propre souvenir peut atteindre, mais au prix d'un effort et de retrouvailles, le passé de sa propre enfance, dont la mémoire vive se mêle aux récits entendus et retenus. Un passé qui ne remonte pas plus loin que l'enfance. Pas plus loin que la deuxième génération, celle des grands-parents. Les contes immémoriaux sont ceux d'une grand-mère. Ce passé-là, c'est le passé des contes, le passé d'un grand-âge tout proche des petits enfants.

Le passé des contes, voilà tout l'apanage de Cahus et de Déodat. Des rêves d'enfance. Déodat se dit soudain que c'était de cela que Cahus était mort, qu'il était mort dans un rêve et qu'il était mort dans un conte. Mais il se reprocha cette pensée. Elle le détournait, lui semblait-il, de la vérité. La vérité était que Cahus avait été tué et que son devoir, à lui, son frère, était de démasquer son meurtrier et le venger.

Trouver la vérité cachée sous cette histoire absurde de rêve avéré, dont le bruit emplissait le château. Y parviendrait-il jamais ?  Venger son frère. Était-il chevalier pour pouvoir exercer une vengeance ?  Chevalier, le serait-il jamais ? Cahus brûlait de le devenir. Il aurait voulu du moins être attaché au service  de l'un des chevaliers de la Table Ronde. Il l'aurait suivi et secondé  dans ses aventures. Il aurait tranché à table devant lui. Il aurait été le confident de ses espoirs et de ses amours. Mais il n'avait jamais été plus que l'un des écuyers employés au service commun du château, le plus jeune et le plus obscur. On lui jetait, sans le voir, les rênes des chevaux pour qu'il les menât boire, on le réprimandait si leur poil n'était pas assez brillant. Il avait fallu, pour le distinguer et pour le choisir, la fantaisie malade du roi Arthur, et voilà qu'il en était mort, mort à sa première aventure, mort avant même sa première aventure, mort d'un rêve d'aventure. Tel avait été le pauvre destin de Cahus. Or Déodat avait envié son frère aîné d'exercer cet obscur service, lui qui était trop jeune pour être un véritable écuyer, fût-il le plus humble, lui qui était encore presque un enfant."

Michel Zink

Les contes de la grand-mère auraient-ils mal disposé, les en imprégnant trop, dans l'entourage hostile où ils se trouvaient, les deux frères ? Consolation énorme et plus que consolation même : les deux frères s'aimaient. Ils n'étaient pas frères ennemis, cette situation  banale et consternante. Ils s'aimaient... du coup le roman de Michel Zink prend pour moi beaucoup d'intérêt. Je verrai si cet auteur rejoint dans sa perception des chevaliers, Cervantès. Mais cela est de moindre importance à mes yeux.


   

samedi 19 décembre 2015

La maison faite de glace

Les hommes ne sont pas faits pour ne pas avoir de toit au-dessus de la tête (sauf les nobles nomades des déserts chauds, et les nobles amérindiens, dotés de tipis)... d'où que le phénomène qui perdure, que l'on évoque en trois lettres :   "SDF" soit totalement contre nature, — comme le sont  les ouragans si l'on admet que la nature puisse produire des phénomènes contre nature ("contre nature" pris dans le sens de cruauté extrême), — surtout l'hiver.
L'arrivée de réfugiés produira peut-être un sursaut de dignité,  quant au fait qu'aucun homme n'ait à subir une telle épreuve.

Pour les ours protégés des dieux nordiques, il en va heureusement autrement...  leur toit à eux c'est la voûte céleste,  et leur fourrure, la couverture idéale pour vivre dans leur maison de glace. Les nomades de mon conte, n'avaient guère besoin de toit eux non plus, parvenus au stade de baladins au grand cœur, statut qui n'existe que dans les contes ou dans les pays chauds.  Voici une réminiscence de Zébra lorsqu'elle était grande (puisque, dans mon conte, zébra, sur le plan physique,  décrut une fois arrivée au sommet du doute (tandis que la gloire produirait l'effet inverse)) :



Zébra me souffle à l'oreille "I am on an extended leave of absence." ce qui signifie peut-être que, si petite qu'elle est devenue, elle se trouve coincée dans le crin de Phil. "Pas du tout." vient-elle de me re-souffler... j'en déduis, eh bien qu'elle ne manque pas de souffle, quel toupet de fiche le camp de cette façon ! Bon vent à eux, après tout !.... et à un de ces jours peut-être. 

   

jeudi 17 décembre 2015

La maison faite d'aube

Yves Berger parlait à propos de La maison de l'aube, "d'âpreté des êtres". Je pense que c'est un euphémisme. Parfois ils se montrent crûment cruels si bien que me vient à l'esprit cette expression que j'ai découverte ou peut-être redécouverte en lisant L'homme qui m'aimait tout bas d'Eric Fottorino : "faillite personnelle" ;  cette expression, des  journalistes l'avaient utilisée pour qualifier la situation morale d'un homme... cela ressemble à un jugement sans appel, c'est asséné rudement, comme un coup  éventuellement mortel  pour peu que l'on soit en période de "fragilité personnelle", tandis "qu'âpreté des êtres" dénote une grande délicatesse sans doute née de l'amour porté à ces êtres, et de la compréhension qui en découle. Je parlerai quant à moi, de cruauté des êtres. L'auteur de La maison de l'aube écrit avec une sobriété qui n'a rien du minimalisme, un sens de l'observation qui plonge le lecteur dans l'ici et maintenant : les pieds sur terre, et bien éveillé. Il écrit  la vérité des choses et des êtres à un moment donné de leur existence. Très vite l'auteur décrit une scène de course de fond dans un paysage âpre et beau, donne à observer l'esprit de compétition exacerbé des coureurs et dans l'envolée  signale que le vainqueur de la course, cette même année, avait tué sept cerfs et sept biches. Point.  Nous y voilà. Et là haut volent les aigles. D'une cruauté plus saine peut-on espérer, vu la majesté du vol, ne tuant que par besoin bien naturel de manger de temps à autre. Dans le ciel encore plus haut, ou Nirvana pour les bouddhistes,  j'imagine que l'on se nourrit de lumière...  le vol des aigles est beau, majestueux, seulement leurs yeux manquent un peu de tendresse.
Le livre est écrit de main de maître, dès le début l'on s'aperçoit qu'il s'agit d'un écrivain propre à éveiller le lecteur en le faisant se frotter une dure réalité d'êtres trahis par l'Histoire, que leurs ennemis ont voulu vouer à la déchéance et qui se battent sur le chemin de leur dignité.

mardi 15 décembre 2015

La maison faite d'aube

Extrait de la préface écrite par Yves Berger : "dans ce livre de la sécheresse et du torride, du désespoir et du sauvage, de l'âpreté des êtres, des lieux et des choses, la grâce est dans le ciel avec les aigles."

House Made of Dawn, écrit par l'amérindien N. Scott Momaday, ou  La maison faite d'aube en traduction littérale, mais en français le livre s'intitule La maison de l'aube, paru aux Éditions Du Rocher. J'ai trouvé ce livre, vendu une misère à la bibliothèque de Berck-sur-Mer et il s'agit d'un chef-d'œuvre, j'ai pu m'en apercevoir après lecture des passages cités par l'auteur de la préface Yves Berger.

dimanche 13 décembre 2015

La complainte du vieux marin

C'est ici :

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Complainte_du_vieux_marin

Les mines de phosphate sur le plan humain et écologique + Thérèse de Calcutta + la video des défenseurs des animaux

J'ai entendu parler il y a peu des mines de phosphate où il m'a été dit que les hommes qui y travaillaient mouraient précocement après s'être considérablement amaigris, du moins à l'époque des années cinquante-soixante, du temps de la guerre d'Algérie, car l'homme qui m'en parla commentait aussi cette guerre. Je suis allée pêcher des informations sur les mines de phosphate ce matin  après en avoir réentendu parler au cours de ma lecture de L'homme qui m'aimait tout bas, (l'histoire d'un père adoptif et du fils qu'il a adopté), d'Éric Fottorino,  livre où il est question  par instant de la guerre d'Algérie, le père adoptif, homme d'origine tunisienne ayant combattu pour l'Algérie française. Pour ce qui est de la guerre d'Algérie, elle est à mes yeux une suite hélas logique de la colonisation mais l'homme dans ce livre,  qui s'est battu pour que l'Algérie reste française a vu les choses tout autrement que moi puisqu'il s'est engagé volontairement du côté des défenseurs de l'Algérie française. Ce qui laisse sans voix à force de complexité car cet homme, kinésithérapeute extrêmement compétent, non intéressé par l'argent, presque "sorcier" guérisseur tout en étant athée a cru, pour l'amour de la France, en cette Algérie française .... qu'il ne devait pas voir du coup comme une Algérie colonisée mais sous l'angle purement affectif qui peut aveugler. Je ne dirai pas ici "à vous de juger", et je m'en garderai moi-même.
Par contre je peux affirmer au nom de la planète que l'exploitation des mines de phosphate fait partie des erreurs majeures qu'a commises l'homme,  entre autre, après lecture de ce qui a trait à l'impact des phosphates sur les terres agricoles :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Phosphate    

Voici maintenant une prière-pensée-exhortation  de Thérèse de Calcutta que je viens de lire et qui m'a bien émue je dois l'avouer :

"Seigneur, je suis un petit instrument. Très souvent j'ai l'impression d'être un bout de crayon entre Tes mains. C'est Toi qui penses, qui écris et agis. Fais que je ne sois rien d'autre que ce crayon. Tu m'as envoyée. Ce n'est pas moi qui ai choisi où aller. Tu m'as envoyée non pour enseigner mais pour apprendre: à être douce et humble de cœur. Tu m'as envoyée pour servir et non pour être servie. Servir avec un cœur humble. Et tu me dis: va, pour être cause de joie dans ta communauté. Va chez les pauvres avec zèle et amour. Va servir en hâte, comme la Vierge. Choisis les choses les plus dures. Va avec un cœur humble, avec un cœur généreux. Ne va pas avec des idées inadaptées à ton genre de vie, avec de grandes idées sur la théologie ou sur ce que tu aimerais enseigner; va plutôt pour apprendre et servir. Partage avec un cœur humble ce que tu as reçu. Va chez les pauvres avec une grande tendresse. Sers-les avec un amour tendre et compatissant. Va te donner sans réserve."  
Trouvé chez Jubilate Deo

Et enfin, trouvée chez Jean-Paul, cette video bouleversante : https://www.youtube.com/watch?v=IlfYJ3cvdd0 

lundi 7 décembre 2015

L'image en question

We must look a long time before we can see.

~ Henry David Thoreau

 Nous devons regarder longtemps avant de voir.
 Thoreau.

Lu sur le Daily Ray ce jour : sur la photo, au premier plan, une pierre évidée évoquant l'orbite d'un œil, et dans le cadre ovale que forme la pierre, on aperçoit plus loin des monticules de pierres qui évoquent elles, un charnier.

Lu aussi chez Jean-Paul : des chiens utilisés comme cobayes pour  la recherche.
Je suis de ceux et celles qui pensent que l'on peut faire de la recherche autrement qu'en mettant la vie d'autrui en souffrance. Du fait que je sois croyante ? Supposition insultante pour les athées. Il doit s'agir  en fait d'intuition et de bon sens mêlés. Pour d'aucuns le manque de sensibilité à la vie des animaux rejoint l'observation de Thoreau, comme quoi il faut parfois regarder longtemps pour voir. Mais sur cette photo trouvée sur Pinterest, les choses paraissent assez évidentes par contre :



   

jeudi 3 décembre 2015

Extrait et commentaire

Issue d'un milieu modeste, "les valeurs d'intimité de l'espace intérieur" m'interpellent peut-être plus fort que d'aucuns le sont en ayant joui dans leur enfance d'une chambre pour eux seuls. Car je m'aperçois que cet espace intérieur dont parle Bachelard, cette intimité, se tisse à mesure que la personne jouit d'espace de solitude abritée. Il ne s'agit pas de mettre à la porte un enfant et de le laisser seul dans la nature, sorte de jungle effrayante pour lui. Dans le propos de Bachelard, si j'ai bien compris,  pour que l'enfant  ait "accès à lui-même" (en ce qui serait ses premières méditations finalement),  il faut qu'il se retrouve dans ce que je vois comme de la solitude abritée,  un espace abrité que la personne peut faire sien. Il en va de même pour les personnes plus âgées, mais, à mon sens,  plus cette expérience est précoce et plus vite l'épanouissement se produira pour une personne normalement constituée...  pour des êtres comme Jésus l'éveil était inné, Bouddha quant à lui a dû fuir un château où il n'y avait pas moyen d'être suffisamment seul,  pour découvrir la réalité du monde terrestre,  il fit cette démarche à l'âge d'un tout jeune adulte et son espace intérieur à lui s'est vraisemblablement tissé à mesure qu'il découvrait la laideur de la maladie, de la vieillesse et de la précarité. 

Un extrait de La poétique de l'espace :

"À quoi servirait-il,  par exemple, de donner le plan de la chambre qui  fut vraiment ma chambre, de décrire la petite chambre au fond d'un grenier, de dire que de la fenêtre, à travers l'échancrure des toits, on voit la colline. Moi seul, dans mes souvenirs d'un autre siècle, peux ouvrir le placard profond qui garde encore, pour moi seul, l'odeur unique, l'odeur des raisins qui sèchent sur la claie. L'odeur du raisin ! Odeur limite, il faut beaucoup imaginer pour la sentir. Mais j'en ai déjà trop dit. Si je disais davantage, le lecteur n'ouvrirait pas, dans sa chambre retrouvée, l'armoire unique, l'armoire à l'odeur unique, qui signe une intimité. Pour évoquer les valeurs d'intimité, il faut, paradoxalement, induire le lecteur en état de lecture suspendue. C'est au moment où les yeux du lecteur quittent le livre que l'évocation de ma chambre peut devenir un seuil d'onirisme pour autrui. Alors quand c'est un poète qui parle, l'âme du lecteur retentit, elle connaît ce retentissement qui, comme l'expose Minkowski, rend à l'être l'énergie d'une origine."

plus loin l'auteur dit : "Que de récits d'enfance — si les récits d'enfance étaient sincères — où l'on nous dirait que l'enfant, faute de chambre, s'en va bouder dans son coin !"

Gaston Bachelard La poétique de l'espace p.32

Mon commentaire : "rendre à l'être l'énergie d'une origine !" J'ai une pensée pour les enfants qui auraient  dans leur chambre un ordinateur dont ils sont "addicts" comme on dit. La classe moyenne ayant pris de l'ampleur les gens fauchés sont moins nombreux en France, pour autant, si les chambres personnelles ou les coins "à soi" à priori,  sont trop ouverts sur le monde via la technologie,  il y a appauvrissement de cet espace ou naît l'onirisme du fait de faire sien cet espace tout en assumant et même en jouissant de la solitude.
De même pour faire sien un endroit où l'on peut s'isoler, l'enfant doit se sentir en sécurité avec les siens, sans mauvais jeu de mot.

Bachelard était aussi mathématicien. Il avait une fille qu'il a dû élever seul, sa femme étant décédée jeune. Peut-être de là lui est venu son intérêt pour la poésie qui naît de cet espace d'intimité.

Lecture  enrichissante !  Merci Bachelard.      


  

     

mercredi 2 décembre 2015

Les lapins angora confrontés à une violence inouie

C'est ici : http://e-activist.com/ea-action/action?ea.client.id=45&ea.campaign.id=36647&ea.url.id=497249&forwarded=true

Article à lire chez jean-Paul : http://sans-voixinfos.hautetfort.com/archive/2015/11/29/de-nouveaux-progres-pour-les-lapins-5723673.html

Chateaubriand tire son propre portrait


"Aucun défaut ne me choque, excepté la moquerie et la suffisance que j'ai grand−peine à ne pas morguer ; je trouve que les autres ont toujours sur moi une supériorité quelconque, et si je me sens par hasard un avantage, j'en suis tout embarrassé."

Chateaubriand,  Mémoires d'Outre-tombe

Cela témoigne d'une certaine tolérance et d'une humilité certaine !  

mardi 1 décembre 2015

Le chien loup

J'étais à faire une marche le long du plan d'eau qui accueille cygnes et canards en nombre  à la gare d'eau de Beuvry, quand je vois se dessiner la silhouette d'un gros chien,  une masse à langue pendante s'avance lentement vers moi, un chien loup  d'après moi. L'animal solitaire avait l'air tranquille dans sa lenteur impassible. Peu rassurée néanmoins, je continue d'avancer, craignant que prendre mes jambes à mon cou ne réveille l'instinct prédateur du "loup". Par prudence, j'ai relevé le col de mon anorak jusque mon nez, dissimulant une bouche crispée dont la grimace éventuelle aurait pu être mal interprétée par mon vis-à-vis. J'ai ôté  dans l'envolée mon ample KW, pour pouvoir en envelopper le chien en cas d'attaque, le ceinturer en quelque sorte.  Je m'aperçois bientôt qu'il s'agit probablement d'une femelle, à cause de son ventre lourd,  je me détends alors, entre filles nous allons probablement nous comprendre.  Ça y est, nous nous croisons. Arrivée à son niveau je  tends la main pour une caresse, marmonnant quelque chose qui se perd dans le col de l'anorak. La chienne effleure mes doigts de ses dents,  je n'ai pas commencé d'avoir peur que déjà sa gentillesse me saute aux yeux. Je ne me suis pas retournée.  Je la sens puis la vois  marcher à mes côtés. Je lui dis de s'en aller au bout de quelques pas. La chienne refait demi tour tranquillement. Elle doit avoir pour maître un riverain qui lui fait confiance et elle vient de  lui donner raison.    

"Advienne que pourra et tout sera bien"

J'aime ces mots qui justement parce qu'ils ne me sont pas particulièrement adressés me vont droit au cœur. Trouvés dans Jubilate Deo :

"Dieu vient sans bruit dans nos découragements. Peut-être sommes-nous trop occupés de nous-mêmes pour L'entendre qui frappe à la porte et qui demande un petit coin où demeurer dans notre bergerie? Il est si réaliste qu'Il ne requiert pas au préalable de dispositions mystiques particulières ou de grands élans de générosité. Il lui sera toujours possible plus tard d'en susciter! Pour l'heure, Il ne demande qu'un peu de paille: que nous Lui offrions un espace dans la litière de nos lassitudes, de nos refus, de nos aliénations, de nos divisions intérieures, pour s'y coucher et y trouver accès à nous-mêmes." Philippe Baud


"Je me mets en route pour te chercher un toit" Etty Hillesum

Travaille à maintenir dans ta poitrine cette petite lueur de feu céleste appelée conscience. Georges Washington


   "Disparue à Auschwitz en novembre 1943, à l’âge de 29 ans, Etty Hillesum nous a laissé, avec ses cahiers, un témoignage spirituel majeur. Ce petit feuilleton restitue la trame de sa personnalité hors du commun et de son cheminement intérieur singulier entre foi et angoisse, sensualité débordante et révélation mystique, force et fragilité."

" [...] Ce « mépris de toute valeur extérieure », cette « absence d’exigences face à la vie », se traduit chez Etty par une absence d’attente. « Je crois qu’on doit se départir de tout espoir fondé sur le monde extérieur » (769). « Je ne pense pas en termes de projets ou de risques, advienne que pourra, et tout sera bien » (751).

Même si elle évoque parfois l’après-guerre et la fin de ses tourments, Etty ne le fait jamais en termes d’espoir anxieux, mais sereinement. Quant à un avenir post-mortem, dans un au-delà où elle serait appelée à revivre, elle n’en parle jamais. Bref, ce n’est pas un imaginaire futur qui l’aide à porter ses épreuves mais la richesse du présent ; ce n’est pas l’espoir mais la joie, et c’est, dit-elle, « une force énorme ».

(NP, l'étymologie du mot mystique(misticque) fin XIVè : qui a une signification cachée ; 1704 Trévoux, sens actuel ; n. f. Charron ; latin mysticus, relatif aux mystères, au sens ecclésisastique, du grec mùsticos, de mustês, initié.)

Etty Hillesum :

http://www.trilogies.org/articles/etty-hillesum-rencontre-3  

lundi 30 novembre 2015

dimanche 29 novembre 2015

.... et avant l'action, l'imagination travaille


Bachelard avait lu Thoreau et bien d'autres, c'était un grand lecteur, de poésie notamment. Dans La poétique de l'espace  il s'agit pour Bachelard de faire une "étude phénoménologique des valeurs d'intimité de l'espace intérieur" mais dans cette parenthèse tout à fait intéressante du livre, il parle du dehors. Voici la suite de l'extrait précédemment mis en ligne :

"Dès lors, à la base même de la topo-analyse, nous avons à introduire une nuance. Nous faisions remarquer que l'inconscient est logé. Il faut ajouter que l'inconscient est bien logé, heureusement logé. Il est logé dans l'espace de son bonheur. L'inconscient normal sait partout se mettre à l'aise. La psychanalyse vient en aide à des inconscients délogés, à des inconscients brutalement ou insidieusement délogés. Mais la psychanalyse met plutôt l'être en mouvement qu'au repos. Elle appelle l'être à vivre à l'extérieur des gîtes de l'inconscient, à entrer dans les aventures de la vie, à sortir de soi. Et naturellement, son action est salutaire.  (NP salutaire, à condition que l'analyse soit juste.)  Car il faut donner un destin de dehors à l'être du dedans. Pour accompagner la psychanalyse dans cette action salutaire, il faudrait entreprendre une topo-analyse de tous les espaces qui nous appellent hors de nous-mêmes. Quoique nous centrions nos recherches sur les rêveries du repos (NP : ici le "nous" signifie '"je" : c'est Bachelard qui centre ses recherches dans ce livre sur les rêveries du repos), nous ne devons pas oublier qu'il y a une rêverie de l'homme qui marche, une rêverie du chemin.

Emmenez-moi, chemins !...  

dit Marceline  Desbordes-Valmore, en pensant à la Flandre natale (Un ruisseau de la Scarpe). 

Et quel  objet dynamique qu'un sentier ! Comme ils restent précis pour la conscience musculaire les sentiers familiers de la colline ! Un poète évoque tout ce dynamisme en un seul vers :

O mes chemins et leur cadence

(Jean Gaubère, Déserts, éd. Debresse, p.38)

Quand je revis dynamiquement le chemin qui "gravissait" la colline, je suis bien sûr que le chemin lui-même  avait des muscles, des contre-muscles. Dans ma chambre parisienne, cela m'est un bon exercice de me souvenir ainsi du chemin. En écrivant cette page, je me sens libéré de mon devoir de promenade : je suis sûr d'être sorti de chez moi.

Et l'on trouverait mille intermédiaires entre la réalité et les symboles si l'on donnait aux choses tous les mouvements qu'elles suggèrent. George Sand rêvant au bord d'un sentier au sable jaune voit couler la vie. Elle écrit :  "Qu'y a-t-il de plus beau qu'un chemin ? C'est le symbole et l'image de la vie active et variée." (Consuelo, II, p. 116.)

Chacun devrait alors dire ses routes, ses carrefours, ses bancs. Chacun devrait dresser le cadastre de ses campagnes perdues. Thoreau a, dit-il, le plan des champs inscrits dans son âme. Et Jean Wahl peut écrire :

Le moutonnement des haies
C'est en moi que je l'ai.

(Poèmes, p. 46.)

Nous couvrons ainsi l'univers de nos dessins vécus. Ces dessins n'ont pas à être exacts. Il faut seulement  qu'ils soient tonalisés sur le mode de notre espace intérieur. Mais quel livre il faudrait pour déterminer tous ces problèmes ! L'espace appelle l'action, et avant l'action l'imagination travaille."

Gaston Bachelard  La poétique de l'espace,  éd. Presse universitaires de France, p.29,30.


vendredi 27 novembre 2015

L'espace réconfortant selon Bachelard

Bachelard voit les choses sous un angle positif, c'était un homme heureux. Sa vision de la rêverie évoque selon moi les méditations  prônées par les bouddhistes, ayant vertu d'éveiller et aérer l'esprit. Un extrait de la Poétique de l'espace :

"Alors, face à ces solitudes, le topo-analyste interroge : La chambre était-elle grande ? Le grenier était-il encombré ? Le coin était-il chaud ? Et d'où venait la lumière ? Comment aussi, dans ces espaces, l'être connaissait-il le silence ? Comment savourait-il les silences si spéciaux des gîtes divers de la rêverie solitaire ?

Ici l'espace est tout, car le temps n'anime plus la mémoire. La mémoire — chose étrange ! — n'enregistre pas la durée concrète, la durée au sens bergsonien. On ne peut revivre les durées abolies. On ne peut que les penser, que les penser sur la ligne d'un temps abstrait privé de toute épaisseur. C'est par l'espace, c'est dans l'espace que nous trouvons les beaux fossiles de durée concrétisés par de longs séjours. L'inconscient séjourne. Les souvenirs sont immobiles, d'autant plus solides qu'ils sont mieux spatialisés. Localiser un souvenir dans le temps, n'est qu'un souci de biographe et ne correspond guère qu'à une sorte d'histoire externe, une histoire pour l'usage externe, à communiquer aux autres. Plus profonde que la biographie, l'herméneutique doit déterminer les centres de destin, en débarrassant l'histoire de son tissu temporel conjonctif sans action sur notre destin. Plus urgente que la détermination des dates est, pour la connaissance de l'intimité, la localisation dans les espaces de notre intimité.

La psychanalyse met trop souvent les passions "dans le siècle". En fait, les passions cuisent et recuisent dans la solitude. (NP : je pense qu'ici Bachelard parle de passions constructives) C'est enfermé dans sa solitude que l'être de passion prépare ses explosions (NP : je pense qu'il s'agit, connaissant un peu mieux Bachelard, d'explosions de génie, constructives)  ou ses exploits.

Et tous les espaces de nos solitudes passées, les espaces où nous avons souffert de la solitude, joui de la solitude, désiré la solitude, compromis la solitude sont en nous ineffaçables. Et très précisément, l'être ne veut pas les effacer. Il sait d'instinct que ces espaces de sa solitude sont constitutifs. Même lorsque ces espaces sont à jamais rayés du présent, étrangers désormais à toutes les promesses d'avenir, même lorsqu'on n'a plus de grenier, même lorsqu'on a perdu la mansarde, il restera toujours qu'on a aimé un grenier, qu'on a vécu dans une mansarde.  On y retourne dans les songes de la nuit. Ces réduits ont  valeur de coquille. Et quand on va au bout des labyrinthes du sommeil, quand on touche aux régions du sommeil profond, on connaît peut-être des repos anté-humains. L'anté-humain touche ici à l'immémorial. Mais, dans la rêverie du jour elle-même, le souvenir  des solitudes étroites, simples, resserrées nous sont des expériences de l'espace réconfortant, d'un espace qui ne désire pas s'étendre, mais qui voudrait surtout être encore possédé. On pouvait bien jadis trouver la mansarde trop étroite, la trouver froide l'hiver,  chaude l'été.  Mais maintenant, dans le souvenir retrouvé par la rêverie, on ne sait par quel syncrétisme, la mansarde est petite et grande, chaude et fraîche, toujours réconfortante."

Gaston Bachelard  

jeudi 26 novembre 2015

le conte d'Ésope

Ce conte n'est pas raciste. Il dit simplement "aimez ce que vous êtes." En l'occurrence, dans ce conte,  si le corbeau avait aimé sa couleur, les choses auraient bien mieux tourné pour lui.  Le conte :

Un corbeau, qui comme vous le savez est noir comme le charbon,  enviait le cygne, car ses plumes étaient aussi blanches que la neige la plus pure. Il vint à l'idée de l'oiseau fou que s'il vivait comme le cygne, nageant et plongeant toute la journée,  en se nourrissant d'herbes et de plantes qui poussent dans l'eau, ses plumes vireraient  au blanc, comme celles du cygne.
Ainsi, il quitta son domicile dans les bois et les champs pour s'en aller vivre sur les lacs et dans les marais. Mais bien qu'il se lavât et lavât tout au long de la journée, à presque s'en noyer, ses plumes restèrent plus noires que jamais. Et comme les herbes aquatiques qu'il mangeait ne convenaient pas, il devint de plus en plus mince, et à la fin, il mourut.
Changer nos habitudes ne modifie pas notre nature.


A Raven, which you know is black as coal, was envious of the Swan, because her feathers were as white as the purest snow. The foolish bird got the idea that if he lived like the Swan, swimming and diving all day long and eating the weeds and plants that grow in the water, his feathers would turn white like the Swan's.
So he left his home in the woods and fields and flew down to live on the lakes and in the marshes. But though he washed and washed all day long, almost drowning himself at it, his feathers remained as black as ever. And as the water weeds he ate did not agree with him, he got thinner and thinner, and at last he died.
A change of habits will not alter nature.







Les origamis

Faire des origamis, c'est quand même un peu mon truc... du fait que "ça marche",  mes doigts se dégourdissent et d'une feuille de papier sort quelque chose en trois dimensions. Émerveillement d'enfant à l'occasion. Se mettre en état "d'émerveillement" tout le temps, ce n'est guère convenable ici-bas, à moins de ne pas craindre de se faire prendre pour un "idiot de village".  Sans que le "qu'en dira-t-on"  m'obsède je sens qu'il y a des limites voyez-vous. Il y a des temps pour les origamis, où je côtoie avec ravissement les génies qui  ont inventé les différents pliages. Cette année, par mégarde, j'en ai  moi-même inventé un ! Eh oui, en me trompant. Il est relativement difficile d'expliquer comment le refaire... il s'agit d'une boîte triangulaire qui, grâce à mon "erreur géniale" a pris de la profondeur et donc il est possible d'y loger beaucoup plus de choses. Mes premiers origamis de la période de Noël :

Ici, au premier plan, un "vase" de papier renversé, afin de vous faire admirer sa face postérieure, verrouillée grâce à cette figure géométrique, qui ne laissera filer aucun des petits objets qui y seront déposés


Le voilà couché :


Les boites triangulaires, certaines sont réalisées sans l'erreur, jolies mais ne pouvant pas contenir autant que celles, au premier plan que j'ai "inventées"  par mégarde :





mercredi 25 novembre 2015

Lu ce jour

Si ce n’est pas la volonté qui te fait défaut, mais seulement le pouvoir d’exécution, tu as tout fait aux yeux de Dieu, et personne ne peut t’enlever ton mérite ni t’imputer aucune responsabilité. 
Maître Eckhart, Traités et sermons - Entretiens spirituels (Coll. GF/Flammarion, 1993)


Trouvé chez Jubilate Deo




mardi 24 novembre 2015

La sympathie des cœurs

 Il y a les espoirs, la fleur dont la beauté ne saurait être décrite sans la gâter ; trop belle, trop délicate, trop sacrée pour les mots, ils ne devraient être connus que par la sympathie des cœurs.
Charles Dickens
There are hopes, the bloom of whose beauty would be spoiled by the trammels of description; too lovely, too delicate, too sacred for words, they should only be known through the sympathy of hearts.

Comme promis, le premier extrait de Poétique de l'espace de Gaston Bachelard :

"Notre but est maintenant clair : il nous faut montrer que la maison est une des plus grandes puissances d'intégration pour les pensées, les souvenirs et les rêves de l'homme. Dans cette intégration, le principe liant, c'est la rêverie. Le passé, le présent et l'avenir donnent à la maison des dynamismes différents, des dynamismes qui souvent interfèrent, parfois s'opposant, parfois s'excitant l'un l'autre. La maison, dans la vie de l'homme, évince les contingences, elle multiplie ses conseils de continuité. Sans elle, l'homme serait un être dispersé. Elle maintient l'homme à travers les orages du ciel et les orages de la vie. Elle est corps et âme. Elle est le premier monde de l'être humain. Avant d'être "jeté au monde" comme le professent les métaphysiques rapides, l'homme est déposé dans le berceau de la maison. Et toujours, en nos rêveries, la maison est un grand berceau. Une métaphysique concrète ne peut laisser de côté ce fait, ce simple fait, d'autant que ce fait est une valeur, une grande valeur à laquelle nous revenons en nos rêveries. L'être est tout de suite une valeur. La vie commence bien, elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron de la maison.

De notre point de vue, du point de vue du phénoménologue qui vit des origines, la métaphysique consciente qui se place à l'instant où l'être est "jeté dans le monde" est une métaphysique de deuxième position. Elle passe par-dessus les préliminaires où l'être est l'être-bien, où l'être humain est déposé dans  un être-bien, dans le bien-être associé primitivement à l'être. Pour illustrer la métaphysique de la conscience, il faudra attendre les expériences où l'être est jeté dehors, c'est-à-dire dans le style d'images que nous étudions : mis à la porte, hors de l'être de la maison, circonstance où s'accumulent l'hostilité des hommes et l'hostilité de l'univers. Mais une métaphysique complète, englobant la conscience et l'inconscient  doit laisser au dedans le privilège de ses valeurs. Au-dedans de l'être, dans l'être du dedans, une chaleur accueille l'être, enveloppe l'être.  L'être règne dans une sorte de paradis terrestre de la matière, fondu dans la douceur d'une matière adéquate. Il semble que dans ce paradis matériel, l'être baigne dans la nourriture, qu'il soit comblé de tous les biens essentiels.

Quand on rêve à la maison  natale, dans l'extrême profondeur de la rêverie, on participe à cette chaleur première, à cette matière bien tempérée du paradis matériel. C'est dans cette ambiance que vivent les êtres protecteurs.  Nous aurons à revenir sur la maternité de la maison. Pour l'instant, nous voulions indiquer la plénitude première de l'être de la maison. Nos rêveries nous y ramènent. Et le poète sait bien que la maison tient l'enfance immobile "dans ses bras" *

Gaston Bachelard

Maison, pan de prairie, ô lumière du soir
Soudain vous acquérez presque une face humaine
Vous êtes près de nous, embrassants, embrassés."

* Rilke, trad. Claude Vigée, apud Les Lettres

Métaphysique définition du dictionnaire de la Connaissance : Philos. Science des vérités premières, de la connaissance de l'être et des causes essentielles.
latin scolastique  métaphysica,  du grec  meta phusika , "après les choses de la nature"

scolastique, du grec skholastikos "propre à l'école"


Mon commentaire : dans les Évangiles nous est raconté que Jésus est né dans la précarité, sur le plan matériel il n'y avait en effet pas grand chose. La présence de deux êtres  comme Joseph et Marie, sans compter celle d'un bovin et d'un âne et aussi d'un mouton, plus les esprits bienveillants tout autour et les visiteurs ensuite,  compensait le reste. Au-dessus le ciel faisait presque office de toit, tant il était étoilé, de bon augure. Néanmoins l'étable était précieuse comme une maison pour la protection d'un nouveau-né,  que les animaux réchauffaient aussi matériellement.  Je vais continuer la lecture de la Poétique de l'espace.  

lundi 23 novembre 2015

De la torture exercée sur les animaux, ici, les chevaux

Cliquez sur ce lien : http://sans-voixinfos.hautetfort.com/archive/2015/11/23/du-foetus-de-poulain-dans-nos-barquettes-de-viande-et-de-jam-5720640.html

Gaston Bachelard

Je sais qu'il est impossible de le reconnaître sur le dessin, mais en bas à droite, j'ai dessiné John Lennon et son fils cadet, à partir d'une photo trouvée sur le Web.

Et maintenant, en ce petit matin frisquet, je me plonge dans l'étude que Gaston Bachelard a faite dans son livre intitulé La poétique de l'espace. Un mot qui revient souvent car Bachelard est obligé de l'utiliser pour cette étude : phénoménologie. En effet il s'agit dans ce livre d'étudier les "départs d'images" qui ont lieu intra-muros, plus exactement dans une maison chérie et  dans les différentes maisons qu'un être humain est amené à habiter. Plus loin, dans des chapitres que je n'ai pas encore abordés, Gaston Bachelard parlera de ceux  habitant en appartement, mais pas des sans-abris du fait qu'à son époque cette situation n'existait pratiquement pas, ou alors on était quasiment clochard presque par choix ou plutôt par abandon de quelque chose qui n'était plus supporté.  Je suppose que ceux dont le mode de vie était le nomadisme à l'époque de Bachelard,  les gitans par exemple, leur coin du monde à eux, leur maison, était tout simplement la roulotte. Pour Bachelard, la maison est un rempart, une protection, une sécurité qui permet aux rêves de naître, à l'imaginaire de se développer.

 Je rappelle le sens de Phénoménologie, du dictionnaire de la Connaissance :

Phénoménologie :   Philos. Science des essences ou science eidétique telle qu'elle est, pour Husserl, une description purement psychologique de l'acte de pensée par lequel nous saisissons les objets en eux-mêmes.

Phénoménologie de l'Esprit : l'histoire, selon Hegel, des étapes de l'esprit s'élevant de la sensation individuelle à la Raison universelle.

Description des phénomènes.  Phénomène + logie.

Étymologie de ce mot : Phénomène,  avec le Larousse :

  1554 Ronsard astronomie ; grec Phainomena, pluriel neutre de Phainomenon  participe passé signif.  "ce qui apparaît" ; 1737,  Brunot, sens actuel, en raison de l'empl. du mot pour les manifestations extraordinaires de l'atmosphère.

Phénoménal 1803, Boiste, didact.  ;

1827, Acad., "se dit de l'effet d'une chose merveilleuse ".

Phénoménalisme  1823  dictionnaire médical. 

Phénoménisme  1844, Dictionnaire sciences, philo.

Phénoménalité  1865, Proudhon.

Phénoménologie  1823, Dictionnaire médical, traité des sens ; 1840, revue des Deux Mondes, philo.

Phénoménologique 1835, Raymond.

 Phénoménologue 1855, Mozin.

Épiphénomène 1755, Encycl. ;

fin XIXè s., philos.

Demain, je mettrai sur ce blog un extrait de La poétique de l'espace.



dimanche 22 novembre 2015

Premières lectures ce matin :



"Après les attentats de Paris, sont annulés la plupart des manifestations publiques (événements culturels, sportifs, gastronomiques) pour des raisons de sécurité mais également pour des considérations d’ordre éthique et morale en hommage aux victimes et à leurs familles. De plus les forces de l’ordre sont extrêmement sollicitées, sur l’ensemble du territoire national. Dans un tel contexte, organiser une immense corrida comme celle de Rion des Landes ce week-end nous semble parfaitement déplacé. Les autorités locales, le Maire monsieur Laurent Civiel,  la Préfète des Landes, madame Nathalie Marthien, s’entêtent à privilégier une minorité d’aficionados au détriment de la sécurité de l’ensemble de nos concitoyens. Cela nous apparaît comme particulièrement irresponsable. Il nous est impossible de ne pas faire un parallèle entre la mise à mort dans l’arène du Bataclan, et le spectacle morbide et largement subventionné de Rion des Landes. Il est temps que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités.  Il est vrai que le bain de sang organisé ce week-end, n’est pas ce que l’on attendrait de la part d’élus locaux responsables, et encore moins de représentants de l’Etat. Dans un contexte de carnage, de mise à mort de masse et de deuil national, l’attitude de Rion Les Landes est obscène et égoïste. Une prise de conscience rapide est nécessaire, et cette manifestation doit-être définitivement supprimée."

Lu sur le blog de Jean Paul, qui a mis le lien de la source : https://magaettori.wordpress.com/2015/11/18/terrorisme-a-rion-des-landes/

Et la lettre En Vert et contre tout de GreenPeace :

"Continuer à parler du climat coûte que coûte. Ne céder en rien sur nos demandes pour la justice climatique. Ne pas abdiquer la construction d’un grand mouvement mondial pour la planète et continuer à agir, avec vous. Tel est notre credo, aux lendemains des attentats tragiques qui ont frappé Paris et Beyrouth, après d’autres villes, le 13 novembre 2015."

Intégral :  http://energie-climat.greenpeace.fr/en-vert-et-contre-tout?utm_source=email&utm_medium=newsletter&utm_term=20%20novembre%202015,cop,attentats,newsletter&utm_campaign=greenpeace&__surl__=IgSNL&__ots__=1448175175132&__step__=1

vendredi 20 novembre 2015

Les chiens secouristes

Des chiens qui ont de la compassion envers les hommes, il y en a beaucoup. Jean Paul nous le rappelle. Le lien se trouve sous la citation de Walt Whitman.



 Laisse ton âme se tenir détachée et sereine face à un million d'univers.

Let your soul stand cool and composed before a million universes.

http://sans-voixinfos.hautetfort.com/archive/2015/11/19/une-pensee-a-ces-loulous-5718591.html

mercredi 18 novembre 2015

Après le thème de la possession, avec Stephen King, celui du satanisme avec Solko

"A une théologie du Mal absolu comme celle de l’Islamisme radical, on ne peut pourtant répliquer que par une théologie du Bien véritable. Il ne s’agit pas d’opposer un dieu à un autre, mais de rappeler souverainement qu’après le sacrifice du Fils de Dieu en rémission du péché de tous les hommes, tout sacrifice sanglant de fils et de filles des hommes au nom de Dieu est d’inspiration purement et uniquement satanique, quelque slogan spectaculaire qu’on brandisse stupidement en l’accomplissant. Satanique, et rien d'autre."

Le Blog de Solko


Avec le poème qui suit,  se pose la question de la violence. Bertolt  Brecht, auteur du poème ne parle pas de tuer, il parle de lutte, mais celle-ci ne se fait pas sans violence bien souvent car ceux qui revendiquent sont dans l'impasse, et les mettre dans cette impasse est en soi une grande violence. Où il nous faut faire preuve de compréhension comme de compassion. Ce poème de Bertolt Brecht, je l'ai trouvé chez Jubilate Deo :
 
Quand ceux qui luttent contre l’injustice
Montrent leurs visages meurtris
Grande est l’impatience de ceux
Qui vivent en sécurité.

De quoi vous plaignez-vous? demandent-ils
Vous avez lutté contre l’injustice!
C’est elle qui a eu le dessus,
Alors taisez-vous.
Qui lutte doit savoir perdre!
Qui cherche querelle s’expose au danger!
Qui professe la violence
N’a pas le droit d’accuser la violence!

Ah! Mes amis
Vous qui êtes à l’abri
Pourquoi cette hostilité? Sommes-nous
Vos ennemis, nous qui sommes les ennemis de l’injustice?
Quand ceux qui luttent contre l’injustice sont vaincus
L’injustice passera-t-elle pour justice?
Nos défaites, voyez-vous,
Ne prouvent rien, sinon
Que nous sommes trop peu nombreux
A lutter contre l’infamie,
Et nous attendons de ceux qui regardent
Qu’ils éprouvent au moins quelque honte.
Bertolt Brecht, Nos défaites ne prouvent rien (poesiemuziketc.wordpress.com)




Le thème de la possession, traité dans le roman intitulé Christine, de Stephen King

Arnie, le bel ado boutonneux, à la personnalité si attachante et à l'humour irrésistible du point de vue de son ami Dennis, présentait une faille en raison du harcèlement qu'il eut à supporter de la part de nombreux autres adolescents, faille par laquelle une entité monstrueuse s'empare peu à peu de lui, par le biais d'abord d'un étrange appât puisqu'il s'agit d'une voiture déglinguée et rouillée des années cinquante, Christine, que son propriétaire LeBay a nommée ainsi et à laquelle Arnie s'est identifié. LeBay : devenu entité monstrueuse, en raison, encore!, d'un harcèlement non digéré alors qu'il était adolescent. Stephen King traite donc franchement d'un cas de possession. Dans cet extrait on voit d'abord Arnie tenter de se débarrasser du monstre qui le parasite de plus en plus, pour communiquer avec Dennis et échouer, laissant la place à LeBay :

"Plus rien pendant quelques secondes, rien à part son corps qui se trémoussait comme si un panier de serpents avait été vidé à l'intérieur de ses vêtements, et ce lent et atroce roulement de son menton contre sa poitrine. Je crus un instant qu'il allait l'emporter sur l'autre vieux salaud, mais quand il releva la tête ce n'était plus Arnie. LeBay était devant moi.

"Ça va se passer comme il a dit. Laisse tomber, petit gars. Il se peut que je ne te passe pas dessus.

— Viens ce soir chez Darnell. Nous jouerons. J'amène Leigh ; amène Christine.

— C'est moi qui choisis le moment et le lieu, répondit LeBay avec la bouche d'Arnie, avec ses dents jeunes et encore bonnes. Tu ne sauras pas quand ça se passera et où. Mais tu sauras quand le moment viendra.

— Réfléchis-y, répliquai-je sur le ton de la conversation. Viens chez Darnell ce soir ; sinon, Leigh ou moi raconterons tout demain."

Il éclata d'un rire hideux et méprisant. "Et où cela vous amènera-t-il ?  À L'asile !

— Certes, au début, on ne nous prendra pas au sérieux. Je te l'accorde.  Mais croire qu'on flanque les gens dans un asile dès qu'ils parlent de fantômes ou de démons, c'était bon de ton temps, LeBay. Aujourd'hui on a L'Exorciste, Amityville et tout ça. Beaucoup de gens croient à cela."

Il ricanait toujours, mais ses yeux trahirent quelque chose, peut-être la première trace de peur. J'ajoutai : "Et ce dont tu ne sembles pas te rendre compte, c'est du nombre de gens qui savent qu'il y a quelque chose de bizarre dans cette histoire."

Son rictus disparut enfin. Il devait certainement avoir pensé à ce que je venais de lui dire. Mais peut-être que tuer finit par devenir une habitude, et qu'au bout d'un moment, on n'est plus capable de s'arrêter et de faire le bilan.

Il poussa une sorte de grognement et se détourna pour s'éloigner.

[...]

"Oui les gens nous riront au nez continuai-je ; je n'en doute pas. Mais j'ai en ma possession deux morceaux de plâtre portant chacun une signature d'Arnie. Sauf que l'une des deux n'est pas la sienne. C'est la tienne, LeBay. Je les montrerai aux flics et je les ferai chier jusqu'à ce qu'ils les fassent examiner par un graphologue spécialisé qui ne manquera pas de confirmer. Alors, les gens se mettront à surveiller Arnie. Et à surveiller Christine aussi. Tu me suis ?

— Petit gars, tu me fais aussi peur qu'une mouche."

Mais ses yeux disaient autre chose. J'avais réussi à l'atteindre."

 Christine, page 368 369 de Stephen King Le Livre de Poche

Je viens de lire une analyse de l'aimable bouddhiste qui m'honore en me comptant parmi ses lectrices  puisqu'elle m'envoie fidèlement ses méditations, ici au sujet de ces événements terrifiants survenus à Paris : http://lejourou130113.hautetfort.com/archive/2015/11/17/j-ai-baisse-les-armes-5717882.html

lundi 16 novembre 2015

Musique médiévale

Je viens d'écouter l'interview d'un musulman qui faisait part de son regret que les "jeunes issus de l'immigration, comme on dit" ne se sentent pas bien en phase pour certains  d'entre eux avec l'occident du fait de se croire exclus de l'histoire de l'occident qui n'est pas, précisa-t-il, que judéo chrétien et grec, les Arabes dans la scolastique notamment ont aussi apporté des choses constructives et il faudrait le  dire à ces jeunes, continua-t-il, afin également de les reconnecter avec l'actualité des religions, qui à mon sens ne devraient être que des véhicules de la paix.

Ma goutte d'eau : certes je trouve belle la musique médiévale, mais si des lecteurs et lectrices du blog la perçoivent comme ramenant trop à un passé d'où ils se sentent exclus, eh bien, en cette période troublée je préfère supprimer la vidéo de musique médiévale qui se trouvait en en-tête de mon blog.  Nous ne sommes plus à l'âge des croisades,  pour ceux à qui cette réalité ne serait pas encore claire.

Par ailleurs, les bouddhistes qui eux n'ont pas vraiment participé à l'histoire de l'occident par le passé, apportent néanmoins leur participation au cheminement spirituel, sans se soucier d'occident ou d'orient et ils ont bien raison.

Vente d'armes en question

La vente d'armes devrait être interdite. Le B, A  BA.

Imaginer ce que doivent ressentir les proches des victimes tuées lors des arrosages à la kalachnikov  m'est assez facile. Une perte si cruelle qu'elle peut rendre momentanément fou de douleur.

Nous avons aussi le droit de nous poser des questions cruciales relatives à ces assassinats.

La première est liée au fait que l'on puisse si facilement se procurer des armes aussi fatales que les kalachnikov. Qui ce livre à ce commerce illicite ? Car je suppose qu'il l'est, c'est aux États-Unis qu'il reste licite ou légal.

Ensuite une fois qu'ils les ont, ces affreux "joujoux" démangent ceux qui les détiennent, perturbés comme ils le  sont, ils ont envie de s'en servir, oubliant qu'eux-mêmes sont de la chair à canon comme le disait si justement la Lensoise qui réchappa des fusillades du Bataclan, lors de l'interview du journaliste black français de la Une.

La colère de ces victimes de manipulations les transforme soudain en bourreaux. En entités qui ne réfléchissent plus, la colère ayant cet effet pervers d'empêcher la réflexion.

Cette colère trouve sans doute son origine dans cette impression d'insouciance et d'indifférence que leur donnent ces autres français qui font la fête le vendredi soir pendant que des populations se font massacrer en Syrie ou en Irak et ailleurs encore. Ils oublient que les double jeux des politiciens de ces pays rendent la situation inanalysable pour ces autres français. Faire la fête permet juste de décompresser après tout, on ne la fait pas pour narguer les autres. De plus,  lorsqu'on ne peut pas appréhender une situation  tragique, on ne peut pas s'engager sans risquer de se faire affreusement  manipuler.

Sur la chaîne LCP un homme a témoigné qu'une moine bouddhiste avait déclaré à propos des guerres de religion : "Quand la foi devient folle, la raison doit l'interpeler."

Parole qui a un fort retentissement  en moi.

Par ailleurs, les manipulateurs des nouveaux adeptes, qui allument leur colère,  sont-ils seulement croyants ?

La colère aveugle et fait tuer éventuellement. Il faut donc absolument prendre de la distance avec elle et ne rien faire quand on se sent sous son emprise.