mardi 24 novembre 2015

La sympathie des cœurs

 Il y a les espoirs, la fleur dont la beauté ne saurait être décrite sans la gâter ; trop belle, trop délicate, trop sacrée pour les mots, ils ne devraient être connus que par la sympathie des cœurs.
Charles Dickens
There are hopes, the bloom of whose beauty would be spoiled by the trammels of description; too lovely, too delicate, too sacred for words, they should only be known through the sympathy of hearts.

Comme promis, le premier extrait de Poétique de l'espace de Gaston Bachelard :

"Notre but est maintenant clair : il nous faut montrer que la maison est une des plus grandes puissances d'intégration pour les pensées, les souvenirs et les rêves de l'homme. Dans cette intégration, le principe liant, c'est la rêverie. Le passé, le présent et l'avenir donnent à la maison des dynamismes différents, des dynamismes qui souvent interfèrent, parfois s'opposant, parfois s'excitant l'un l'autre. La maison, dans la vie de l'homme, évince les contingences, elle multiplie ses conseils de continuité. Sans elle, l'homme serait un être dispersé. Elle maintient l'homme à travers les orages du ciel et les orages de la vie. Elle est corps et âme. Elle est le premier monde de l'être humain. Avant d'être "jeté au monde" comme le professent les métaphysiques rapides, l'homme est déposé dans le berceau de la maison. Et toujours, en nos rêveries, la maison est un grand berceau. Une métaphysique concrète ne peut laisser de côté ce fait, ce simple fait, d'autant que ce fait est une valeur, une grande valeur à laquelle nous revenons en nos rêveries. L'être est tout de suite une valeur. La vie commence bien, elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron de la maison.

De notre point de vue, du point de vue du phénoménologue qui vit des origines, la métaphysique consciente qui se place à l'instant où l'être est "jeté dans le monde" est une métaphysique de deuxième position. Elle passe par-dessus les préliminaires où l'être est l'être-bien, où l'être humain est déposé dans  un être-bien, dans le bien-être associé primitivement à l'être. Pour illustrer la métaphysique de la conscience, il faudra attendre les expériences où l'être est jeté dehors, c'est-à-dire dans le style d'images que nous étudions : mis à la porte, hors de l'être de la maison, circonstance où s'accumulent l'hostilité des hommes et l'hostilité de l'univers. Mais une métaphysique complète, englobant la conscience et l'inconscient  doit laisser au dedans le privilège de ses valeurs. Au-dedans de l'être, dans l'être du dedans, une chaleur accueille l'être, enveloppe l'être.  L'être règne dans une sorte de paradis terrestre de la matière, fondu dans la douceur d'une matière adéquate. Il semble que dans ce paradis matériel, l'être baigne dans la nourriture, qu'il soit comblé de tous les biens essentiels.

Quand on rêve à la maison  natale, dans l'extrême profondeur de la rêverie, on participe à cette chaleur première, à cette matière bien tempérée du paradis matériel. C'est dans cette ambiance que vivent les êtres protecteurs.  Nous aurons à revenir sur la maternité de la maison. Pour l'instant, nous voulions indiquer la plénitude première de l'être de la maison. Nos rêveries nous y ramènent. Et le poète sait bien que la maison tient l'enfance immobile "dans ses bras" *

Gaston Bachelard

Maison, pan de prairie, ô lumière du soir
Soudain vous acquérez presque une face humaine
Vous êtes près de nous, embrassants, embrassés."

* Rilke, trad. Claude Vigée, apud Les Lettres

Métaphysique définition du dictionnaire de la Connaissance : Philos. Science des vérités premières, de la connaissance de l'être et des causes essentielles.
latin scolastique  métaphysica,  du grec  meta phusika , "après les choses de la nature"

scolastique, du grec skholastikos "propre à l'école"


Mon commentaire : dans les Évangiles nous est raconté que Jésus est né dans la précarité, sur le plan matériel il n'y avait en effet pas grand chose. La présence de deux êtres  comme Joseph et Marie, sans compter celle d'un bovin et d'un âne et aussi d'un mouton, plus les esprits bienveillants tout autour et les visiteurs ensuite,  compensait le reste. Au-dessus le ciel faisait presque office de toit, tant il était étoilé, de bon augure. Néanmoins l'étable était précieuse comme une maison pour la protection d'un nouveau-né,  que les animaux réchauffaient aussi matériellement.  Je vais continuer la lecture de la Poétique de l'espace.  

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