J'ai lu un entretien au sujet de Proust qui m'a étonnée : Proust vu comme un être polémique. Il veut s'insérer dans une certaine société, la société du Faubourg mais à mesure découvre que celle-ci menace ruine, il fait la même découverte quant aux sentiments. La réalité se ferait toujours âpre jusqu'à étioler les sentiments chez Proust. La belle émotion du départ au contact des contingences s'étiolerait ? Chez Féval on ne trouve pas cela tant on rencontre de dames que la réalité ne peut détrôner dans son univers, à la manière de la mère de Proust ; bien que n'ayant pas lu ce dernier, j'ai entendu répéter combien il était attaché à sa mère et de façon quasi maladive. Et je crois que de sa maladie Proust a retiré la "substantifique moelle".
Parlant de maladie et de sentiments j'en suis venue à me souvenir du patient hier que de la salle d'attente où je me trouvais j'ai vu débouler accompagné d'une infirmière, tous deux se sont dirigés puis posté devant l'ascenseur, juste à côté de la porte par laquelle ils venaient de sortir. J'étais assise et je les regardais vaguement, j'écoutais plutôt le patient, qui se confiait à voix très haute à l'infirmière : "J'ai peur de mourir vous savez ! J'ai tellement mal au ventre. Ah, j'ai peur de mourir." L'infirmière lui répondit qu'il ne mourrait pas, qu'il était trop jeune encore pour mourir.
Quelques temps auparavant, lors d'une écoute radio j'avais entendu "proférer" que seul l'attachement pouvait enrayer la peur primale. L'attachement à la personne, personne qui dès lors aurait moins peur, n'aurait plus la panique de la mort. Le fait que quelqu'un vous aime vous distingue et vous n'avez plus peur de disparaître, vous craignez moins la mort, tels étaient les propos tenus. Un orphelin peut quelquefois attendre longtemps avant que quelqu'un ne le "distingue" suffisamment pour juguler sa peur de la mort. Les orphelins ont-ils donc de grandes paniques de la mort ? Ou le personnel des orphelinats et autres familles d'accueil est-il suffisamment affectueux envers eux pour les garder de cette panique ? Un enfant mérite toujours qu'on l'aime, quel qu'il soit il est don de Dieu, ou don tout court pour les non croyants... le regarder en tant que don, quoi qu'il arrive et se faire digne de ce don. Dans les familles sans culture et/ou sans argent suffisant, où les enfants sont nombreux, ils se révèlent parfois interchangeables aux yeux de parents indigents en amour. Je comprends mieux à l'aune de l'explication de l'homme de la radio, que certaines fratries soient de véritables nœuds de vipères, ce serait en fait la course à qui se distinguera aux yeux de ces pingres de parents entre les pauvres frères et sœurs, cette triste lutte entre eux par simple peur de la mort, si l'on remonte le mécanisme.... Dans la famille de Proust, qui n'était pas désargentée et qui se composait de deux enfants seulement, Marcel Proust, et son frère aîné qui se sentait la vocation de faire médecine comme son père, le problème de la rivalité entre frères s'est-il quand même posé ? J'ai ouï dire que oui. Mais le père ayant pris sous son aile l'aîné de ses fils, doué pour la médecine, ce dernier n'est plus resté rival de son cadet Marcel, s'il s'était jamais senti en rivalité avec lui, mais s'est plutôt manifesté comme protecteur de son frère cadet (à vérifier en lisant Proust)... par contre Proust aurait désiré avoir la préférence de sa mère. D'une façon maladive ? Que de distinction par l'attachement autrement dit l'affection il faudrait pour qu'un être n'ait plus peur !
Nous serions tous de grands trouillards à la base. La vie c'est vrai est impressionnante !
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