mardi 23 décembre 2014

La distinction

Suivant le cours des pensées du billet précédent, en fait de distinction me revient que l'on peut se faire distinguer aussi par la haine que l'on a inspiré bien malgré soi à par exemple sa grand-mère. Ce qui m'est arrivé : la belle ne pouvant pas me sacquer m'inspirait une frayeur inouïe, j'ai passé des heures "au bord d'un fossé" à attendre l'arrivée de ma grande sœur pour rentrer chez moi, après la visite à la grand-mère qui m'avait flanquée dehors. Pourquoi je ne rentrais-je pas de moi-même chez mes parents ? C'était à cinquante mètres de là, tout droit. Parce que l'on m'avait averti de la possibilité en cas de tentative d'évasion de me faire choper par les bras à rallonge de Marie Groëtte, être maléfique qui hantait les fossés et ne faisait pas de quartier aux enfants seuls. Il paraît qu'un jour j'aurais bravé l'interndit et que, sans attendre ma sœur je serais rentrée en sanglots chez Marie, ma mère et lui aurait dit d'une voix entrecoupée qu'on ne voulait pas de moi là-bas. Tels sont les propos rapportés par ma mère durant longtemps avant qu'elle ne mette une chape de silence là-dessus.   Savez-vous que Juliette Gréco, sa propre mère la rejetait de façon assez acide, acerbe. Comme elle s'en est bien sortie ! Au début, avant que Sartres ne la rencontre et ne la prenne sous son aile, elle était terriblement timide... une peureuse. Comme quoi la "distinction" par l'attachement que quelqu'un vous porte, autrement dit l'affection, colmate effectivement les fragilités car la belle Juliette a beaucoup d'assurance depuis.
 
Me concernant, tout le temps que j'étais sous  la protection des Sœurs, qui m'avaient à la bonne, je suis effectivement sortie de ma coquille...  grandement, mais un fond de frayeur est resté, il faut en avoir conscience pour en venir à bout. Pour ma grand-mère, il s'agissait d'un délit de faciès à mon encontre : elle n'aimait pas ma bobine disait-elle avant de me crier dessus et de me mettre dehors. Une frayeur voisine de la paralysie. Me concernant je n'ai jamais rejeté une bobine d'enfant. N'était une qui m'inspira pitié parce que l'enfant handicapé ne pouvait rentrer sa langue qu'il gardait pendante, en plus de baver. Et aussi un jeune hydrocéphale aperçu un jour, dont je ne sais comment il pouvait la garder droite. Les bobines d'enfants, de tous les styles, sont attendrissantes à mes yeux, de la tête de souris ou d'oiseau à celles de gros baigneur joufflu, je les trouve belles. Vrai, un enfant, c'est l'innocence. Et ces bobines la respirent à plein nez. Ma grand-mère quand j'avais dix ans environs ou plus peut-être, m'apporta un jour un mini vélo flambant neuf, alors que je jouais avec une copine au bord de la route où ne passaient que de rares voitures à l'époque et encore aujourd'hui. Elle pleurait en me serrant dans ses bras et me chuchotait "Pardon ! je te demande pardon !"  Pardon accordé mais je n'aurais pas survécu à ça sans les Sœurs ma vieille !
 
La distinction que produit l'attachement, distinction nécessaire pour sortir la tête de l'eau, autrement dit : affection. Celui qui déclara cela tantôt à la radio m'a quelque peu interpelée... Il a dit là quelque chose qui me parle. Car c'est ça qui importe : si ça vous parle ou pas.
 
par exemple j'ai lu tout à l'heure le texte du jour de Jubilate deo, je l'ai juste trouvé élitiste, si bien que cela ne m'a rien dit... alors que d'autres textes du même livre peuvent je pense éventuellement me parler. Idem Pour certaines paraboles du Christ : le coup de l'arbre que Jésus aurait maudit, eh bien, ça ne me dit toujours rien, ça tombe même complètement à plat. Alors que d'autres paroles de lui prennent sens, j'aime. Pour tout il faut garder l'esprit critique à mon sens... sentir si cela vous sonne juste ou pas, ou vous indiffère tout simplement, et en l'occurrence, ça ne sonne pas du tout.   

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