Avant d'aborder le sujet de la possession, une photo de Michael Renfrow dans l'Oregon - Columbia Gorge, illustrée d'une citation, cela devrait constituer un bon talisman :
Le sujet en question : il s'agit d'une BD qui traite intelligemment d'après le critique (car ne l'ai pas encore lue) du thème de la possession. Extrait de la critique :
"Quand Robert Kirkman délaisse ses zombies de Walking Dead pour rejouer L’Exorciste, le pari est excitant et les risques de se planter tout aussi grands. Mais ce premier tome d’Outcast confirme tout le talent du scénariste pour composer des personnages intéressants, dans leur fragilité et leurs doutes, dans un décor horrifique."
Intégral :
http://www.bodoi.info/outcast-1/
jeudi 30 avril 2015
La découverte d'un article sur le partage en jardinage... attitude propre à en apaiser beaucoup
Photo de S-A Cember, Pocantico Hills, New York
Le Daily Ray l'a agrémentée de cette pensée de Ram Dass : The quieter you become, the more you can hear.
J'ai fait la découverte ce matin d'un article sur les jardins partagés. Quelle bonne idée, saine et généreuse ! En fin de cet article il est dit : "les jardins sont aussi de véritables centres sociaux de plein air mêlant femmes et hommes de tous âges et de tous horizons. Ils sont enfin des endroits gais et chaleureux, où l'on prend enfin le temps de la limonade de sureau et du bouquet de coquelicots"
Petit bémol avant de vous faire partager l'article : éviter le bouquet de coquelicots ou de toutes autres fleurs sauvages parce qu'il vaut mieux les laisser vivre leur vie tranquillement et qu'elles meurent de leur belle mort. D'autant qu'elles jouent un rôle dans l'équilibre de l'écosystème... pour nourrir les abeilles notamment, elles donnent aussi de précieux renseignements sur les sols.
Ensuite, à propos des friches industrielles, si dans certaines les sols ont été pollués de sorte qu'il n'est pas recommandé d'y faire pousser des légumes, au moins peut-on laisser la nature réparer à sa façon, tout en ne la laissant pas devenir broussailleuse. Pour ces friches-là, elle peuvent se transformer en simples lieux d'études botaniques, et espaces de respiration... profonde, où l'on installerait des bancs pour les promeneurs de toutes conditions, notamment ceux que les citoyens ordinaires ont pour mauvaise habitude de tenir enfermés.
Proposition de citoyenne, pour une démocratie participative .
L'article en question sur les jardins partagés, ici :
http://fleursetidees.blogspot.fr/
mercredi 29 avril 2015
Le cerveau à remonter le temps : James Ellroy
Je parle de celui de James Ellroy dont j'ai lu l'interview dans Télérama ce matin. Un extrait :
"Je suis né en 1948 et je me souviens d'une discussion avec ma mère, quand j'avais 8 ans, où elle a compris que je nous croyais encore en guerre. "Tu sais, la paix est signée depuis un moment", m'a-t-elle dit. Le conflit était tellement ancré dans l'imaginaire américain que je ne l'ai pas crue, je ne sais même pas si je la crois aujourd'hui. Je vis toujours sous l'emprise de mon imagination. Le Los Angeles où j'ai grandi a été façonné par la guerre. C'était une ville en plein boom au début des années 1940. Un port, face au Pacifique, d'où venaient nos ennemis et où partaient nos soldats. L'industrie de la défense y avait établi ses quartiers, les troupes logeaient dans la ville. [...]
plus loin à la question : Comment faites-vous pour vous immerger dans le passé sur lequel vous écrivez ?
[...] je n'ai aucun mal à me plonger dans ce passé, car j'y ai vécu toute ma vie. Je sors rarement de ce monde imaginaire, je me projette en permanence des images de Wilshire Boulevard dans les années 1940. Toutes les rues, tous les bâtiments de la ville, je les sens près de moi. Regardez cet hôpital, là-bas : il est en moi. Le restaurant où nous nous trouvons a ouvert en 1921, et j'y viens toujours parce que je m'y sens en paix. Ma maison pas loin de Griffith Park, a été construite en 1926. J'ai besoin de rester au contact du passé et de le réinventer sans cesse, c'est ma manière de l'affronter. Et puis, je suis extrêmement concentré quand je travaille. Et je travaille tout le temps. Après vous avoir quitté, j'irai faire une sieste, j'aboierai un peu avec le chien du voisin, je me ferai une tasse de café et je retournerai en 1942..."
Télérama de cette semaine Extrait de l'interview de James Ellroy
Dans beaucoup de mes rêves mon cerveau me fait remonter le temps à l'époque de mon fils vers un âge variant de quelques mois à six-sept ans ; je le tiens dans mes bras, contre mon cœur. Les vivants voient souvent les choses rétrospectivement, comme pour interroger le passé. James Ellroy dit qu'il ne voit pas sa ville, Los Angeles comme elle est aujourd'hui. Ça ne l'intéresse pas, du moins, toujours pas. Comme s'il ne voulait pas se laisser distraire de quelque chose d'essentiel qui est le sujet qu'il veut traiter, qu'une histoire porte, et cette histoire se déroule dans le passé. J'ai dit "les vivants" un peu plus haut, mot qui m'est venu spontanément, sans doute pour dire qu'à mon sens, ce retour constant dans le passé n'est pas une attitude morbide chez James Ellroy, cela tient d'un travail, lequel n'est pas laborieux mais inspiré. Et pour une large part, il semblerait que sa mère y collabore, ou du moins, qu'elle soit toujours présente. Est-ce de cette présence-là qu'il ne veut pas se distraire ? Je ne le pense pas car James Ellroy semble écouter ce qu'il appelle Dieu. Il l'interroge sans doute...
"Je suis né en 1948 et je me souviens d'une discussion avec ma mère, quand j'avais 8 ans, où elle a compris que je nous croyais encore en guerre. "Tu sais, la paix est signée depuis un moment", m'a-t-elle dit. Le conflit était tellement ancré dans l'imaginaire américain que je ne l'ai pas crue, je ne sais même pas si je la crois aujourd'hui. Je vis toujours sous l'emprise de mon imagination. Le Los Angeles où j'ai grandi a été façonné par la guerre. C'était une ville en plein boom au début des années 1940. Un port, face au Pacifique, d'où venaient nos ennemis et où partaient nos soldats. L'industrie de la défense y avait établi ses quartiers, les troupes logeaient dans la ville. [...]
plus loin à la question : Comment faites-vous pour vous immerger dans le passé sur lequel vous écrivez ?
[...] je n'ai aucun mal à me plonger dans ce passé, car j'y ai vécu toute ma vie. Je sors rarement de ce monde imaginaire, je me projette en permanence des images de Wilshire Boulevard dans les années 1940. Toutes les rues, tous les bâtiments de la ville, je les sens près de moi. Regardez cet hôpital, là-bas : il est en moi. Le restaurant où nous nous trouvons a ouvert en 1921, et j'y viens toujours parce que je m'y sens en paix. Ma maison pas loin de Griffith Park, a été construite en 1926. J'ai besoin de rester au contact du passé et de le réinventer sans cesse, c'est ma manière de l'affronter. Et puis, je suis extrêmement concentré quand je travaille. Et je travaille tout le temps. Après vous avoir quitté, j'irai faire une sieste, j'aboierai un peu avec le chien du voisin, je me ferai une tasse de café et je retournerai en 1942..."
Télérama de cette semaine Extrait de l'interview de James Ellroy
Dans beaucoup de mes rêves mon cerveau me fait remonter le temps à l'époque de mon fils vers un âge variant de quelques mois à six-sept ans ; je le tiens dans mes bras, contre mon cœur. Les vivants voient souvent les choses rétrospectivement, comme pour interroger le passé. James Ellroy dit qu'il ne voit pas sa ville, Los Angeles comme elle est aujourd'hui. Ça ne l'intéresse pas, du moins, toujours pas. Comme s'il ne voulait pas se laisser distraire de quelque chose d'essentiel qui est le sujet qu'il veut traiter, qu'une histoire porte, et cette histoire se déroule dans le passé. J'ai dit "les vivants" un peu plus haut, mot qui m'est venu spontanément, sans doute pour dire qu'à mon sens, ce retour constant dans le passé n'est pas une attitude morbide chez James Ellroy, cela tient d'un travail, lequel n'est pas laborieux mais inspiré. Et pour une large part, il semblerait que sa mère y collabore, ou du moins, qu'elle soit toujours présente. Est-ce de cette présence-là qu'il ne veut pas se distraire ? Je ne le pense pas car James Ellroy semble écouter ce qu'il appelle Dieu. Il l'interroge sans doute...
mardi 28 avril 2015
Suite de l'extrait d'hier ESSAIS 1 Walter Benjamin
ESSAIS 1 Walter Benjamin
"Usant d'une image paradoxale mais claire, Gœthe avait défini les couleurs comme "les actions et les passions de la lumière" ; Gundolf transpose la métaphore de façon très confuse ; il compare la vie même de l'écrivain à cette lumière qui, finalement serait identique à ses couleurs, c'est-à-dire à ses œuvres. Cette position lui permet à la fois d'écarter de sa perspective toute notion d'ordre moral et, en attribuant au héros victorieux des attributs propres au Créateur, d'atteindre à une profondeur blasphématoire. Il va jusqu'à prétendre qu'en écrivant les Affinités Gœthe "a médité sur la conduite législatrice de Dieu". La vie d'un homme — même lorsqu'il produit des œuvres — n'est jamais celle d'un Créateur. On ne peut davantage l'assimiler à celle d'un héros qui sculpte sa propre statue. C'est bien ainsi pourtant que l'interprète Gundolf. Au lieu de considérer les teneurs chosales de cette vie avec l'état d'esprit d'un fidèle biographe qui n'omet rien, même ce qu'il ne comprend pas, — au lieu de s'astreindre à un modeste travail d'archiviste qui ne fait fi d'aucun document, même s'il ne réussit pas à le déchiffrer, Gundolf exige que les teneurs chosales et les teneurs de vérité présentent une égale évidence et que, dans la vie du poète comme dans celle du héros, il y ait entre elles parfaite correspondance. En fait, dans une vie d'homme, les teneurs chosales sont les seules manifestes ; la teneur de vérité est cachée. Sans doute on peut mettre en lumière le trait isolé, la relation isolée, mais non la totalité, à moins de ne la saisir que dans une relation finie. Or elle est en elle-même infinie. C'est pourquoi, dans le domaine de la biographie, il n'est ni critique ni commentaire. Pour contrevenir à ce principe fondamental se rencontrent étrangement deux livres qui par ailleurs pourraient être nommés les antipodes de la littérature consacrée à Gœthe : celui de Gundolf et l'étude de Baumgartner. Alors que ce dernier entreprend directement l'exploration de la teneur de vérité, sans même soupçonner le lieu de sa sépulture, et se trouve ainsi forcé d'entasser sans mesure les résidus critiques, Gundolf se plonge dans le monde que constituent les teneurs chosales de la vie de Gœthe, dans lesquelles cependant il ne peut présenter que de façon putative la teneur de vérité de cette vie. Car une vie humaine ne saurait se considérer par analogie avec une œuvre d'art. Dans son étude critique des sources, Gundolf se tient résolument à cette déformation."
Walter Benjamin
Mon commentaire :
Dans la vie un individu peut et même il est préférable qu'il fasse "œuvre de" mais la vie en elle-même d'un homme ou d'une femme n'est pas une création, elle est faite de contraintes et d'exigences parmi lesquelles les plus hautes dépassent la volonté humaine selon Walter Benjamin qui pense ici en homme de foi. Une œuvre d'art serait le jaillissement de quelque chose qui tient plus de la teneur de vérité quant à l'essence de l'auteur que de ce de quoi sa vie est faite. Pour Walter Benjamin dire des artistes qu'ils sont des créateurs tient juste de la métaphore qu'il ne faut surtout pas prendre au pied de la lettre, comme le fait Gundolf avec Gœthe, qu'il érige ou réduit selon l'appréciation de chacun à une sorte de demi-dieu.
Je pense qu'un écrivain se sert éventuellement de sa vie comme d'un matériau pour son œuvre mais en effet cela ne dit pas l'essentiel sur son être en profondeur. Walter Benjamin oblige à creuser la réflexion, lecture très intéressante que ses commentaires !
"Usant d'une image paradoxale mais claire, Gœthe avait défini les couleurs comme "les actions et les passions de la lumière" ; Gundolf transpose la métaphore de façon très confuse ; il compare la vie même de l'écrivain à cette lumière qui, finalement serait identique à ses couleurs, c'est-à-dire à ses œuvres. Cette position lui permet à la fois d'écarter de sa perspective toute notion d'ordre moral et, en attribuant au héros victorieux des attributs propres au Créateur, d'atteindre à une profondeur blasphématoire. Il va jusqu'à prétendre qu'en écrivant les Affinités Gœthe "a médité sur la conduite législatrice de Dieu". La vie d'un homme — même lorsqu'il produit des œuvres — n'est jamais celle d'un Créateur. On ne peut davantage l'assimiler à celle d'un héros qui sculpte sa propre statue. C'est bien ainsi pourtant que l'interprète Gundolf. Au lieu de considérer les teneurs chosales de cette vie avec l'état d'esprit d'un fidèle biographe qui n'omet rien, même ce qu'il ne comprend pas, — au lieu de s'astreindre à un modeste travail d'archiviste qui ne fait fi d'aucun document, même s'il ne réussit pas à le déchiffrer, Gundolf exige que les teneurs chosales et les teneurs de vérité présentent une égale évidence et que, dans la vie du poète comme dans celle du héros, il y ait entre elles parfaite correspondance. En fait, dans une vie d'homme, les teneurs chosales sont les seules manifestes ; la teneur de vérité est cachée. Sans doute on peut mettre en lumière le trait isolé, la relation isolée, mais non la totalité, à moins de ne la saisir que dans une relation finie. Or elle est en elle-même infinie. C'est pourquoi, dans le domaine de la biographie, il n'est ni critique ni commentaire. Pour contrevenir à ce principe fondamental se rencontrent étrangement deux livres qui par ailleurs pourraient être nommés les antipodes de la littérature consacrée à Gœthe : celui de Gundolf et l'étude de Baumgartner. Alors que ce dernier entreprend directement l'exploration de la teneur de vérité, sans même soupçonner le lieu de sa sépulture, et se trouve ainsi forcé d'entasser sans mesure les résidus critiques, Gundolf se plonge dans le monde que constituent les teneurs chosales de la vie de Gœthe, dans lesquelles cependant il ne peut présenter que de façon putative la teneur de vérité de cette vie. Car une vie humaine ne saurait se considérer par analogie avec une œuvre d'art. Dans son étude critique des sources, Gundolf se tient résolument à cette déformation."
Walter Benjamin
Mon commentaire :
Dans la vie un individu peut et même il est préférable qu'il fasse "œuvre de" mais la vie en elle-même d'un homme ou d'une femme n'est pas une création, elle est faite de contraintes et d'exigences parmi lesquelles les plus hautes dépassent la volonté humaine selon Walter Benjamin qui pense ici en homme de foi. Une œuvre d'art serait le jaillissement de quelque chose qui tient plus de la teneur de vérité quant à l'essence de l'auteur que de ce de quoi sa vie est faite. Pour Walter Benjamin dire des artistes qu'ils sont des créateurs tient juste de la métaphore qu'il ne faut surtout pas prendre au pied de la lettre, comme le fait Gundolf avec Gœthe, qu'il érige ou réduit selon l'appréciation de chacun à une sorte de demi-dieu.
Je pense qu'un écrivain se sert éventuellement de sa vie comme d'un matériau pour son œuvre mais en effet cela ne dit pas l'essentiel sur son être en profondeur. Walter Benjamin oblige à creuser la réflexion, lecture très intéressante que ses commentaires !
lundi 27 avril 2015
Suite de l'extrait mis en ligne hier ESSAIS 1 de Walter Benjamin
La façon d'appréhender une œuvre et de s'en faire une idée qu'on tente plus ou moins d'imposer aux autres, par le biais d'une simple perception du travail de l'auteur au regard de la vie qu'il a menée, est un exercice périlleux sur le plan moral. Suite de l'extrait que j'ai mis en ligne hier des ESSAIS 1 de Walter Benjamin sur les Affinités électives de Gœthe :
"Cette façon de traiter le poète en héros, si chère au Cercle de George et sur laquelle se fonde tout le livre de Gundolf, révèle, à sa source, une seconde erreur, tout aussi grave, qui entraîne de très grandes confusions et peut conduire à des conséquences fatales. Quand on parle, en effet, du poète comme d'un créateur, bien qu'on ne puisse évidemment l'assimiler au Créateur, c'est à pareille confusion que tendent néanmoins ceux qui négligent le caractère métaphorique de l'épithète. À dire vrai, l'artiste est moins fondement originaire et créateur que source jaillissante et qui donne figure ; à aucun prix on de doit considérer son œuvre comme une créature, mais bien plutôt assurément, comme une image façonnée. Image qui vit, sans doute, comme vit la créature. Mais ce qui les distingue de façon fondamentale est que seule la vie de la créature, non point jamais celle de l'image façonnée, participe pleinement à l'intention rédemptrice. Ainsi, de quelque manière qu'on puisse parler de "création" à propos des œuvres d'un artiste, le terme ne prend toute sa force — celle qui implique une véritable causalité originelle — qu'appliqué à des créatures, non point à des fictions. C'est pourquoi l'usage irréfléchi d'un tel vocabulaire conduit naturellement à voir dans la vie même de l'auteur, et non point dans son œuvre, la réalité qui traduit sa puissance productrice. Mais, si en effet, dans la vie du héros — en raison du caractère symbolique qu'il assume en pleine clarté — s'exprime la perfection d'une figure qui est elle-même une lutte, non seulement la vie du poète, tout comme celle de n'importe quel homme, ne contient pas l'idée univoque d'une tâche à remplir, mais on n'y trouve pas davantage, sans équivoque et clairement décelable, celle d'une lutte à mener. Comme on tient cependant à évoquer une figure, il s'agira dès lors, non point d'une figure vivante qui s'impose dans la lutte, mais d'une figure qui s'est durcie dans les écrits. Et ainsi se parfait un dogme qui, après avoir mué magiquement l'œuvre en vie, par une erreur qui n'est pas moins trompeuse, fige de nouveau cette vie en œuvre et fait de la fameuse "figure" du poète un hybride de héros et de Créateur, où l'on ne peut plus rien discerner et dont on peut tout affirmer avec les apparences de la profondeur. Le Gœthe de Gundolf a accepté le dogme le plus creux du culte Gœthéen, la plus pâle profession de foi de ses adeptes : l'idée que, de toutes les œuvres du poète, la plus grande serait sa vie elle-même. On s'interdit par là toute distinction précise ente la vie et l'œuvre."
Walter Benjamin
"Cette façon de traiter le poète en héros, si chère au Cercle de George et sur laquelle se fonde tout le livre de Gundolf, révèle, à sa source, une seconde erreur, tout aussi grave, qui entraîne de très grandes confusions et peut conduire à des conséquences fatales. Quand on parle, en effet, du poète comme d'un créateur, bien qu'on ne puisse évidemment l'assimiler au Créateur, c'est à pareille confusion que tendent néanmoins ceux qui négligent le caractère métaphorique de l'épithète. À dire vrai, l'artiste est moins fondement originaire et créateur que source jaillissante et qui donne figure ; à aucun prix on de doit considérer son œuvre comme une créature, mais bien plutôt assurément, comme une image façonnée. Image qui vit, sans doute, comme vit la créature. Mais ce qui les distingue de façon fondamentale est que seule la vie de la créature, non point jamais celle de l'image façonnée, participe pleinement à l'intention rédemptrice. Ainsi, de quelque manière qu'on puisse parler de "création" à propos des œuvres d'un artiste, le terme ne prend toute sa force — celle qui implique une véritable causalité originelle — qu'appliqué à des créatures, non point à des fictions. C'est pourquoi l'usage irréfléchi d'un tel vocabulaire conduit naturellement à voir dans la vie même de l'auteur, et non point dans son œuvre, la réalité qui traduit sa puissance productrice. Mais, si en effet, dans la vie du héros — en raison du caractère symbolique qu'il assume en pleine clarté — s'exprime la perfection d'une figure qui est elle-même une lutte, non seulement la vie du poète, tout comme celle de n'importe quel homme, ne contient pas l'idée univoque d'une tâche à remplir, mais on n'y trouve pas davantage, sans équivoque et clairement décelable, celle d'une lutte à mener. Comme on tient cependant à évoquer une figure, il s'agira dès lors, non point d'une figure vivante qui s'impose dans la lutte, mais d'une figure qui s'est durcie dans les écrits. Et ainsi se parfait un dogme qui, après avoir mué magiquement l'œuvre en vie, par une erreur qui n'est pas moins trompeuse, fige de nouveau cette vie en œuvre et fait de la fameuse "figure" du poète un hybride de héros et de Créateur, où l'on ne peut plus rien discerner et dont on peut tout affirmer avec les apparences de la profondeur. Le Gœthe de Gundolf a accepté le dogme le plus creux du culte Gœthéen, la plus pâle profession de foi de ses adeptes : l'idée que, de toutes les œuvres du poète, la plus grande serait sa vie elle-même. On s'interdit par là toute distinction précise ente la vie et l'œuvre."
Walter Benjamin
dimanche 26 avril 2015
demi-dieu ou citoyen ? Extrait des ESSAIS 1 de Walter Benjamin
"Dans l'image qu'elle présente du poète, l'école de George transpose de façon particulière le canon correspondant à la vie du demi-dieu. Comparant l'œuvre du poète à la tâche du héros, elle lui attribue ainsi une mission d'origine divine. Mais Dieu n'impose aux hommes aucune tâche, il ne leur signifie que des exigences ; devant Dieu il ne faut donc accorder à la vie du poète aucune valeur spéciale. Même du point de vue de l'écrivain, la notion de tâche est inadéquate ici. On ne peut parler d'œuvre littéraire, au sens propre du terme, que là où le langage échappe au cercle magique de la plus grande tâche à remplir. Ce n'est pas Dieu qui dicte l'œuvre d'en haut ; elle surgit des parties abyssales de l'âme, elle participe au soi le plus profond de l'homme même. La prenant au contraire pour un message divin, les membres du Cercle de George ne se contentent pas de situer le poète, dans son pays, à un niveau où il échapperait à toute critique, mais qui resterait cependant relatif : c'est à sa qualité d'homme et à sa vie, en face de Dieu, qu'ils attribuent de façon très contestable une primauté absolue, comme si l'écrivain érigé en surhomme pouvait se mesurer à Dieu. En réalité, si le poète est une manifestation de l'essence humaine antérieure au saint, ce n'est point en degré, mais en nature. L'essence du poète n'implique, en effet, qu'un rapport entre l'individu et la communauté nationale ; celle du saint traduit une relation entre l'homme et Dieu."
Walter Benjamin ESSAIS 1 sur Les affinités électives, de Gœthe
Walter Benjamin ESSAIS 1 sur Les affinités électives, de Gœthe
samedi 25 avril 2015
Mad Max
" Dans l'avenir écologiquement dégradé dépeint dans le film Mad Max : Fury Road, l'huile est précieuse, les voitures sont vénérées comme des objets de culte et des garçons en guerre la moitié du temps parcourent le désert en groupes synchrones.
Imaginez ce que serait le monde d'ici 50 ans si toutes les tendances relatives aux choix sur l'environnement devaient perdurer : changement climatique, déforestation, pénurie d'eau — plus quelques coups thermonucléaires tant que nous y sommes. C'était la mission que confiait le réalisateur australien Georges Miller à son équipe pour le nouveau Mad Max : Fury Road, film d'action pleins gaz (devant sortir en salle le 15 Mai) qui se déroule dans un désert post apocalypse où des cinglés dotés d'engins extravagants se battent pour de l'eau ou de l'huile. Miller a déclaré : "à savoir que tous les scénarios les plus défavorables que vous lisez dans les news vont se passer.""
C'était un peu de traduction de l'article lu dans Green Life. Catastrophisme qui pourrait produire le sursaut qui sauve, espérons-le pour les générations futures.
Le lien pour l'article intégral :
http://sierraclub.org/sierra/2015-3-may-june/feature/fury-road-all-your-darkest-environmental-nightmares-come-true?suppress=true&src=1link&utm_source=greenlife&utm_medium=email&utm_campaign=newsletter
Imaginez ce que serait le monde d'ici 50 ans si toutes les tendances relatives aux choix sur l'environnement devaient perdurer : changement climatique, déforestation, pénurie d'eau — plus quelques coups thermonucléaires tant que nous y sommes. C'était la mission que confiait le réalisateur australien Georges Miller à son équipe pour le nouveau Mad Max : Fury Road, film d'action pleins gaz (devant sortir en salle le 15 Mai) qui se déroule dans un désert post apocalypse où des cinglés dotés d'engins extravagants se battent pour de l'eau ou de l'huile. Miller a déclaré : "à savoir que tous les scénarios les plus défavorables que vous lisez dans les news vont se passer.""
C'était un peu de traduction de l'article lu dans Green Life. Catastrophisme qui pourrait produire le sursaut qui sauve, espérons-le pour les générations futures.
Le lien pour l'article intégral :
http://sierraclub.org/sierra/2015-3-may-june/feature/fury-road-all-your-darkest-environmental-nightmares-come-true?suppress=true&src=1link&utm_source=greenlife&utm_medium=email&utm_campaign=newsletter
vendredi 24 avril 2015
mercredi 22 avril 2015
mardi 21 avril 2015
lundi 20 avril 2015
Baby please, don't go
Une musique qui recèle un tonus discret mais efficace dans le sens noble du terme :
https://www.youtube.com/watch?v=f4mBTjJ_Yrg
https://www.youtube.com/watch?v=f4mBTjJ_Yrg
L'extrait promis de Walter Benjamin ESSAIS 1 1922-1934
Commentaires des Affinités électives de Gœthe par Walter Benjamin :
"Si tout ouvrage, aussi bien que les Affinités électives, peut éclairer la vie de l'auteur et son œuvre, la manière usuelle de le considérer le manque d'autant plus qu'elle croit se tenir plus près de lui. Car s'il est rare qu'une édition classique omette d'affirmer dans son introduction que précisément le texte qu'elle présente, plus que tout autre, ou presque, ne serait compréhensible qu'à partir de la vie de l'auteur, ce jugement contient déjà fondamentalement le (NP : ici, Walter Benjamin a écrit en grec, définition en bas de page : l'erreur initiale qui vicie tout le raisonnement) de la méthode qui cherche à représenter dans l'auteur le devenir de son œuvre grâce au cliché d'une image essentielle et d'une expérience vécue, vide ou insaisissable. Ce (NP les mêmes caractères grecs signifiant : erreur initiale qui vicie le raisonnement) de presque toute la philologie moderne, c'est-à-dire de de celle qui ne se détermine pas encore par une recherche portant sur les mots et les choses, est de partir de l'essence et de la vie, sinon pour en inférer l'œuvre comme un produit, du moins pour établir entre elles une oiseuse concordance. mais dans la mesure où il est incontestablement indiqué de fonder la connaissance sur ce qui est le plus assuré, sur ce qui peut être prouvé, partout où le discernement s'oriente vers la teneur et l'essence, l'œuvre nécessairement est mise au premier plan. Car nulle part cette teneur et cette essence n'apparaissent au jour de façon plus durable, plus marquée, mieux saisissable que dans l'œuvre Que même là elles ne se manifestent qu'assez difficilement et restent inaccessibles à beaucoup, ce puisse être pour ces derniers une raison suffisante pour fonder l'histoire de l'art sur la recherche concernant la personne et ses relations, et non sur un discernement précis de l'œuvre, mais cela n'autorise pas pour autant celui qui porte un jugement à leur accorder créance, moins encore à suivre leur exemple. Au contraire il ne perdra jamais de vue que la seule corrélation rationnelle entre le créateur et l'œuvre consiste dans le témoignage qui libère celle-ci de celui-là (NP : qui libère l'œuvre de l'auteur ). De l'essence d'un homme, non seulement on ne sait rien que par ses expressions, auxquelles, en ce sens, appartiennent aussi les œuvres, mais cette essence même ne se détermine dès l'abord que par elles. Les œuvres ne s'infèrent pas plus que les actes, et toute étude qui accepte en gros ce principe pour y contredire dans le détail perd toute prétention à atteindre la teneur."
Walter Benjamin
Quand je vous disais que c'était ardu même sans "gros mots". Ce que j'ai cru comprendre est qu'on ne tire pas de conclusions en analysant une œuvre à propos de l'homme qui l'a créée, de même que certains actes de celui-ci ne diraient rien ou pas grand-chose de son essence... ? La teneur d'une œuvre pour Benjamin Walter, s'aborde autrement qu'en passant par une biographie de l'auteur, message immédiatement compréhensible que celui-ci, par contre.
vendredi 17 avril 2015
Trouble in mind
Ici :
https://www.youtube.com/watch?v=eMuzFQTpjDE
Read more: Jerry Lee Lewis - Trouble In Mind Lyrics | MetroLyrics
https://www.youtube.com/watch?v=eMuzFQTpjDE
Troubled in mind, I'm little blue
Bet you I won't be blue always
'Cause that ol' sun's gonna shine
On Jerry Lee Lewis's back door step someday
Bet you I won't be blue always
'Cause that ol' sun's gonna shine
On Jerry Lee Lewis's back door step someday
I'm gonna lay my head
On somebody's lonesome railroad line
Let that ol' midnight special
Ease my troubled mind
On somebody's lonesome railroad line
Let that ol' midnight special
Ease my troubled mind
Well, they tell me that old graveyard
Is a mighty lonesome place
Lord they put you six feet under
Shovellin' mud directly in your face
Is a mighty lonesome place
Lord they put you six feet under
Shovellin' mud directly in your face
Well, goodbye baby, may God bless you
And may He bless ol' Killer a little bit too
Oh, don't meet you over yonder, baby
When they throw that Jerry right over you
And may He bless ol' Killer a little bit too
Oh, don't meet you over yonder, baby
When they throw that Jerry right over you
Troubled in mind, when I'm little blue
Bet you I won't be blue always
'Cause the sun's gonna shine
On, on my back door step
Some lowdown, lonesome, mother humpin' day
Bet you I won't be blue always
'Cause the sun's gonna shine
On, on my back door step
Some lowdown, lonesome, mother humpin' day
Songwriters
VALENTINE, JIMMY /
VALENTINE, JIMMY /
Read more: Jerry Lee Lewis - Trouble In Mind Lyrics | MetroLyrics
jeudi 16 avril 2015
mercredi 15 avril 2015
Zébra eut ce rêve la nuit qui suivit sa journée dans le désert, seule et sans eau
Heureusement des nomades passant par là trouvèrent Zébra au petit matin, fortement déshydratée, et contactèrent son ambassade, car étant donné les remous politiques graves, ils ne pouvaient, à regret et pour sa sécurité, la recueillir dans leur magnifique pays.
Le rêve de Zébra lors de la nuit de tous les dangers, dans le désert :
Le rêve de Zébra lors de la nuit de tous les dangers, dans le désert :
mardi 14 avril 2015
lundi 13 avril 2015
Recherche du prestige ? Sport de compensation en raison d'un déclassement social ? Simple recherche d'émotions fortes ? "L'avoir grosse" ?
On voit trois jeunes adultes s'essayer à la chute libre dans la Leçon Englistown du jour... en fait, un saut en parachute. L'un des trois étudiants, au dernier moment, refuse de monter dans l'avion. Non pas qu'il ait été effrayé dira-t-il plus tard, par la perspective d'avoir à sauter dans le vide, mais parce qu'il n'est pas un chercheur sous-entendu ici, d'émotions, et qu'il trouve ce sport inutilement dangereux. J'ai fait une recherche sur ce sport et j'ai trouvé une analyse intéressante sur le sujet. Sous mon dessin de Zébra en parachute, les extraits, (que j'ai trouvés drôles, chose rare de la part des sociologues) et le lien :
"Pratiquants souvent animés par la conviction éminemment virilisante qu’être parachutiste « c’est l’avoir grosse par équivalence », la prise de risque inhérente au saut en parachute leur suffit généralement à elle seule pour les conduire à se penser eux-mêmes comme membres d’une élite restreinte dans le droit-fil des représentations chevaleresques et militaristes classiques des parachutistes : « Ils sont unis par ce lien que crée cette épreuve initiatique commune qu’est la victoire sur soi-même quand il faut vaincre, dans un choix délibéré, la peur des premiers sauts. Ainsi, jadis, dans les sociétés qui se voulaient fortes ceux destinés à être des élites devaient-ils s’imposer des épreuves et en triompher »" Romain-Desfossé
Initialement envisagé et valorisé sur le mode de l’« épreuve » à la fois physique et morale en raison même de l’exposition au risque qu’il implique, le saut en parachute a ainsi subi une « idéalisation déréalisante » [5] Au sens où l’entend Marie-José Chombart de Lauwe :... [5] qui a abouti à le présenter à la face du monde en tant qu’activité destinée à échapper à la médiocrité, à s’élever au propre comme au figuré, en même temps qu’à le définir comme une pratique héroïque permettant de s’extraire d’un monde vulgaire et « bas ». Jusqu’au milieu des années quatre-vingt, l’affinité qui s’observe entre classes populaires et parachutisme naît d’ailleurs clairement de cette possibilité de vivre une aspiration à s’élever à travers des prouesses vécues comme risquées et dignes d’une « élite restreinte » [6] En 1982, au cepo, les ouvriers, employés et militaires... [6] . Étroitement lié à cette identification à l’« élite » – voire, parfois, à la « race supérieure » – et au retrait symbolique « hors du monde » qu’elle génère, le mépris du « prolo » enfermé dans sa condition sans volonté d’en sortir par le haut reste alors un sentiment relativement partagé par les pratiquants issus des couches populaires : « Quand je suis pendu [sous mon parachute] et que, dans le soleil couchant, je vois ces colonnes de larves dans les bouchons, eh bien je suis content d’être au-dessus, dans le calme. Je me sens supérieur à tous ces guignols du dimanche soir qui vont crever dans les embouteillages… C’est bien une mort de prolo, ça ! »
Autre extrait :
"Discipline sportive institutionnalisée, le parachutisme est en quelque sorte tout entier organisé pour offrir à ceux qui le pratiquent la possibilité d’éprouver une expérience émotionnelle de forte intensité dans laquelle le risque librement consenti, même statistiquement limité, fait partie intégrante d’un plaisir certain. Un plaisir qui n’est en vérité pleinement ressenti et vécu comme tel qu’une fois chaque saut achevé. Le bruit de l’avion, le souffle de l’hélice à l’embarquement, l’odeur de l’essence, la tension visible du pilote au moment délicat du décollage, les consignes données en vol par l’instructeur en criant (en raison du niveau sonore), la hauteur par rapport au sol qui augmente à chaque tour de piste, les virages serrés, l’annonce radio de l’arrivée sur le point de largage, la coupure brutale des gaz, le placement à la porte avant l’impulsion de saut, le froid en altitude… tout contribue à susciter une montée continue d’émotion, d’excitation, de tension et de peur. Une peur tellement intense qu’elle peut parfois aboutir chez les moins aguerris à un total dessaisissement de la maîtrise de soi capable de provoquer une véritable amnésie du déroulement du saut. On peut évoquer sur ce point, entre autres, le cas de cette jeune femme de vingt-deux ans qui, lors de son neuvième saut à ouverture automatique – mais après plusieurs « refus de saut » –, est restée si longtemps accrochée, complètement tétanisée, au hauban de l’aile de l’avion qu’elle commençait à compromettre la stabilité et la sécurité de l’appareil. Face à l’impossibilité de la faire rentrer dans l’habitacle (en raison de la vitesse élevée de vol), l’instructeur et le pilote se sont unis, qui à coups de poing, qui à coups de pied, pour lui faire lâcher prise. Ce qu’elle fera finalement pour heurter aussitôt de la tête le marchepied situé au-dessus du train d’atterrissage. S’étant posée par la suite sans encombre, blessée au menton dans le choc de sa sortie d’avion, elle restituera pourtant son saut avec la certitude et la fierté d’avoir effectué une « bonne sortie, pour une fois » et affichera avec un bonheur manifeste la volonté de recommencer au plus vite. Elle réalisera ainsi un autre saut dans la même journée sans que nul ne l’ait dissuadée d’imputer plus longtemps à son seul atterrissage sa blessure au visage, son hématome à la cuisse et ses quelques douleurs aux mains."
http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=ETHN_064_0625
"Pratiquants souvent animés par la conviction éminemment virilisante qu’être parachutiste « c’est l’avoir grosse par équivalence », la prise de risque inhérente au saut en parachute leur suffit généralement à elle seule pour les conduire à se penser eux-mêmes comme membres d’une élite restreinte dans le droit-fil des représentations chevaleresques et militaristes classiques des parachutistes : « Ils sont unis par ce lien que crée cette épreuve initiatique commune qu’est la victoire sur soi-même quand il faut vaincre, dans un choix délibéré, la peur des premiers sauts. Ainsi, jadis, dans les sociétés qui se voulaient fortes ceux destinés à être des élites devaient-ils s’imposer des épreuves et en triompher »" Romain-Desfossé
Initialement envisagé et valorisé sur le mode de l’« épreuve » à la fois physique et morale en raison même de l’exposition au risque qu’il implique, le saut en parachute a ainsi subi une « idéalisation déréalisante » [5] Au sens où l’entend Marie-José Chombart de Lauwe :... [5] qui a abouti à le présenter à la face du monde en tant qu’activité destinée à échapper à la médiocrité, à s’élever au propre comme au figuré, en même temps qu’à le définir comme une pratique héroïque permettant de s’extraire d’un monde vulgaire et « bas ». Jusqu’au milieu des années quatre-vingt, l’affinité qui s’observe entre classes populaires et parachutisme naît d’ailleurs clairement de cette possibilité de vivre une aspiration à s’élever à travers des prouesses vécues comme risquées et dignes d’une « élite restreinte » [6] En 1982, au cepo, les ouvriers, employés et militaires... [6] . Étroitement lié à cette identification à l’« élite » – voire, parfois, à la « race supérieure » – et au retrait symbolique « hors du monde » qu’elle génère, le mépris du « prolo » enfermé dans sa condition sans volonté d’en sortir par le haut reste alors un sentiment relativement partagé par les pratiquants issus des couches populaires : « Quand je suis pendu [sous mon parachute] et que, dans le soleil couchant, je vois ces colonnes de larves dans les bouchons, eh bien je suis content d’être au-dessus, dans le calme. Je me sens supérieur à tous ces guignols du dimanche soir qui vont crever dans les embouteillages… C’est bien une mort de prolo, ça ! »
Autre extrait :
"Afin de se donner la possibilité d’échapper aux généralisations hâtives qui marquent les explications les plus courantes de la prise de risques sportifs, ou encore à ces « régressions à l’infini qui caractérisent les formes d’interprétation fondées sur le postulat d’un inconscient de type analytique » [Boltanski, 1990 : 133], une sociologie de l’engagement dans ces « actes » réputés « quasi suicidaires » et qui « fascinent d’autant plus [qu’ils] peuvent se solder par la mort » [Vigarello et Mongin, op. cit. : 71] doit sans doute renoncer à expliquer d’emblée les raisons et causes de la prise de risques sportifs par des déterminations supérieures et extérieures à la pratique elle-même (dans la « société », dans ses « crises », dans des « positions sociales », dans des « pulsions » sociologiquement explicables, etc.). Tel qu’on a pu l’observer sur un temps relativement long, la diversité des rapports au parachutisme comme la variété des positions et trajectoires sociales des pratiquants ne permettent pas de soutenir, faute de preuves sérieuses à l’appui, que « s’amuser à sauter d’un avion », « s’envoyer en l’air pour de vrai », serait individuellement ou collectivement une réponse en acte à une profonde « crise anthropologique » conçue comme typique des sociétés occidentales modernes depuis le début des années quatre-vingt [Le Breton, 1991 ; Sobry, 1987] [2] Sur ce point, le cas particulier du parachutisme sportif... [2] . De la même manière, et bien qu’il y ait toujours quelque « prestige » à pratiquer une activité rare et relativement risquée telle que le parachutisme (au moins pour soi), rien dans les observations réalisées et les expériences personnellement vécues n’autorise à conclure que le principe majeur susceptible d’expliquer l’engouement pour ce sport à risque se situerait dans une quelconque recherche « inconsciente » de distinction posée, de surcroît, comme caractéristique de sous-groupes déclassés ou en voie de déclassement social [Pociello, 1995 : 48]. En fait, la fréquentation indigène d’un centre école de parachutisme invite à décrire quelles fonctions peut bien remplir le saut en parachute pour ses adeptes au moment précis où il s’accomplit plutôt qu’à rechercher, en amont ou en aval, les fonctions sociales de la prise de risque pour la société en général ou, plus individuellement, au titre d’activité « compensatoire » supposée agir comme une sorte d’antidote à un quelconque « déclassement »."
Autre extrait :
Autre extrait :
"Discipline sportive institutionnalisée, le parachutisme est en quelque sorte tout entier organisé pour offrir à ceux qui le pratiquent la possibilité d’éprouver une expérience émotionnelle de forte intensité dans laquelle le risque librement consenti, même statistiquement limité, fait partie intégrante d’un plaisir certain. Un plaisir qui n’est en vérité pleinement ressenti et vécu comme tel qu’une fois chaque saut achevé. Le bruit de l’avion, le souffle de l’hélice à l’embarquement, l’odeur de l’essence, la tension visible du pilote au moment délicat du décollage, les consignes données en vol par l’instructeur en criant (en raison du niveau sonore), la hauteur par rapport au sol qui augmente à chaque tour de piste, les virages serrés, l’annonce radio de l’arrivée sur le point de largage, la coupure brutale des gaz, le placement à la porte avant l’impulsion de saut, le froid en altitude… tout contribue à susciter une montée continue d’émotion, d’excitation, de tension et de peur. Une peur tellement intense qu’elle peut parfois aboutir chez les moins aguerris à un total dessaisissement de la maîtrise de soi capable de provoquer une véritable amnésie du déroulement du saut. On peut évoquer sur ce point, entre autres, le cas de cette jeune femme de vingt-deux ans qui, lors de son neuvième saut à ouverture automatique – mais après plusieurs « refus de saut » –, est restée si longtemps accrochée, complètement tétanisée, au hauban de l’aile de l’avion qu’elle commençait à compromettre la stabilité et la sécurité de l’appareil. Face à l’impossibilité de la faire rentrer dans l’habitacle (en raison de la vitesse élevée de vol), l’instructeur et le pilote se sont unis, qui à coups de poing, qui à coups de pied, pour lui faire lâcher prise. Ce qu’elle fera finalement pour heurter aussitôt de la tête le marchepied situé au-dessus du train d’atterrissage. S’étant posée par la suite sans encombre, blessée au menton dans le choc de sa sortie d’avion, elle restituera pourtant son saut avec la certitude et la fierté d’avoir effectué une « bonne sortie, pour une fois » et affichera avec un bonheur manifeste la volonté de recommencer au plus vite. Elle réalisera ainsi un autre saut dans la même journée sans que nul ne l’ait dissuadée d’imputer plus longtemps à son seul atterrissage sa blessure au visage, son hématome à la cuisse et ses quelques douleurs aux mains."
http://www.cairn.info/zen.php?ID_ARTICLE=ETHN_064_0625
dimanche 12 avril 2015
Poe, quelque peu critique envers La Fontaine que moi j'aime aussi pour son don d'expression de la langue
D'aucuns ont accusé Poe de n'être pas moral, lui s'en défend par un conte que je vais lire incessamment sous peu. J'ai eu le temps de lire le début dont voici un extrait :
"Un romancier, par exemple, n’a nul besoin de se creuser la cervelle au sujet de sa morale. Elle est là, c’est à dire elle est quelque part. La morale et les critiques n’ont qu’à s’arranger entre eux. Quand le moment sera venu, tout ce que ce Monsieur a voulu dire et tout ce qu’il n’a pas voulu dire, seront mis en pleine lumière dans le Quotidien et la Revue du temps, à ne pas oublier tout ce qu’il aurait dû vouloir dire et tout ce qu’il avait évidemment l’intention de vouloir dire ; en sorte que finalement tout ira pour le mieux.
"Un romancier, par exemple, n’a nul besoin de se creuser la cervelle au sujet de sa morale. Elle est là, c’est à dire elle est quelque part. La morale et les critiques n’ont qu’à s’arranger entre eux. Quand le moment sera venu, tout ce que ce Monsieur a voulu dire et tout ce qu’il n’a pas voulu dire, seront mis en pleine lumière dans le Quotidien et la Revue du temps, à ne pas oublier tout ce qu’il aurait dû vouloir dire et tout ce qu’il avait évidemment l’intention de vouloir dire ; en sorte que finalement tout ira pour le mieux.
Il n’y a donc aucune justice dans l’imputation lancée contre moi par certains ignorants, qui prétendent que je n’ai jamais écrit de conte moral ou, plus précisément, de conte qui eût une morale. Mes dénigreurs, tout simplement, ne sont pas les critiques prédestinés qui doivent m’interpréter et faire ressortir mes tendances vertueuses. Voilà le secret. Un jour la Somnifère de l’Amérique du Nord leur fera honte de leur stupidité.
Dans l’entre-temps, pour différer mon exécution, pour mitiger les charges qui pèsent sur moi, j’offre à mes détracteurs la triste histoire qui va suivre, histoire dont la moralité ne peut être mise en doute, puisque celui-là même qui se contenterait de parcourir superficiellement mon œuvre, serait forcé de lire dans les lettres capitales du titre, la leçon qu’elle comporte. On me doit même de la reconnaissance pour cette manière de faire, bien plus sage que celle de La Fontaine et de quelques autres, qui retardent la morale jusqu’au dernier moment et la glissent ainsi subrepticement à la queue de leurs fables."
Edgar Allan Poe
Intégral : http://fr.wikisource.org/wiki/Contes_grotesques/Ne_pariez_jamais_votre_t%C3%AAte_au_diable
Edgar Allan Poe
Intégral : http://fr.wikisource.org/wiki/Contes_grotesques/Ne_pariez_jamais_votre_t%C3%AAte_au_diable
samedi 11 avril 2015
La longue phrase
Jusqu'à ce que vous preniez corps sur cet astre-ci,
Je vous invente le rêve, en des astres éternels.
S. George
"Le scandale qui, devant toute critique d'art, sous prétexte qu'elle s'approche trop de l'œuvre, émeut ceux qui ne trouvent pas en cette critique le reflet de leur égoïste familiarité avec l'œuvre, témoigne, quant à l'essence de l'art, d'une telle ignorance qu'un temps pour lequel l'origine strictement définie de cet art est de plus en plus vivante n'est pas tenu d'opposer des arguments à une telle émotion."
Merci Walter Benjamin pour une construction de phrase aussi.... sinueuse.
Autrement dit s'offusquer d'une critique d'art de la part de ceux qui ont tendance à s'approprier d'une œuvre et ne sont pas d'accord avec cette critique, témoigne d'une ignorance totale sur l'essence de l'art de la part des offusqués, si bien qu'on n'est pas tenu d'accorder un temps à opposer des arguments à l'émotion qu'ils manifestent, ce temps sera dédié à l'origine strictement définie de l'art, de plus en plus vivante.
En même temps, vous ai-je bien compris Monsieur Walter Benjamin ? Il n'est pas là pour me rembarrer méchamment "en cas que non".... À moins de m'envoyer un éclaircissement par le biais d'un rêve par exemple. Heureusement toutes les phrases ne sont pas aussi sinueuses chez Walter Benjamin. Parfois cependant, outre la doxa particulière il y a aussi la syntaxe, la métaphore... beaucoup de paramètres à saisir dans l'expression de tel ou tel passage. Mais je ne me lasse pas de tenter de les déchiffrer. Ce matin je suis revenue sur le contexte d'éléments nébuleux... j'étais en train d'attendre mon tour chez le coiffeur alors plutôt que de prendre l'éternel magazine, bref, certaines choses ont fini par s'éclaircir. Quelles découvertes émouvantes et pleines d'enseignements sur l'univers de personnes qui ont beaucoup souffert on fait dans les commentaires de Walter Benjamin ! Je remettrai un autre extrait plus tard.
Je vous invente le rêve, en des astres éternels.
S. George
"Le scandale qui, devant toute critique d'art, sous prétexte qu'elle s'approche trop de l'œuvre, émeut ceux qui ne trouvent pas en cette critique le reflet de leur égoïste familiarité avec l'œuvre, témoigne, quant à l'essence de l'art, d'une telle ignorance qu'un temps pour lequel l'origine strictement définie de cet art est de plus en plus vivante n'est pas tenu d'opposer des arguments à une telle émotion."
Merci Walter Benjamin pour une construction de phrase aussi.... sinueuse.
Autrement dit s'offusquer d'une critique d'art de la part de ceux qui ont tendance à s'approprier d'une œuvre et ne sont pas d'accord avec cette critique, témoigne d'une ignorance totale sur l'essence de l'art de la part des offusqués, si bien qu'on n'est pas tenu d'accorder un temps à opposer des arguments à l'émotion qu'ils manifestent, ce temps sera dédié à l'origine strictement définie de l'art, de plus en plus vivante.
En même temps, vous ai-je bien compris Monsieur Walter Benjamin ? Il n'est pas là pour me rembarrer méchamment "en cas que non".... À moins de m'envoyer un éclaircissement par le biais d'un rêve par exemple. Heureusement toutes les phrases ne sont pas aussi sinueuses chez Walter Benjamin. Parfois cependant, outre la doxa particulière il y a aussi la syntaxe, la métaphore... beaucoup de paramètres à saisir dans l'expression de tel ou tel passage. Mais je ne me lasse pas de tenter de les déchiffrer. Ce matin je suis revenue sur le contexte d'éléments nébuleux... j'étais en train d'attendre mon tour chez le coiffeur alors plutôt que de prendre l'éternel magazine, bref, certaines choses ont fini par s'éclaircir. Quelles découvertes émouvantes et pleines d'enseignements sur l'univers de personnes qui ont beaucoup souffert on fait dans les commentaires de Walter Benjamin ! Je remettrai un autre extrait plus tard.
Zébra fait l'expérience du désert
Zébra n'a finalement pas fait affaire avec la sorcière de l'univers Disney... en dépit de son admiration pour les mains magnifiques de l'entité diabolique. Elle la quitta.... à jamais, on ne saurait dire, car la dessinatrice n'a pas assisté aux adieux... mais enfin, Zébra reprit la route, et non dans le sens d'un retour au pays des souris, après l'horrible déconvenue de son CV déchiré par un agent de police qui ne le trouvait pas convenable... lui signifiant ainsi lourdement sa désormais non-citoyenneté au pays de son enfance où d'un coup, à travers l'odieux geste du gendarme, elle réalisa qu'elle n'était plus, malgré les apparences toujours trompeuses, enfant du pays d'après la force publique qui venait de se manifester si abruptement à elle et qu'elle décida ne pas contrer. Après l'adieu à la sorcière Zébra ne s'en alla pas tout courant comme elle l'avait fait auparavant face au flic. Elle ne courut pas, préférant cette fois suivre les conseils d'un pilote rat qui la cacha dans la cale de son avion. Avion qui par bonheur ne se crasha pas. Zébra se retrouva ainsi débarquée dans un village Tunisien qui longeait le désert. Village, hélas pour elle, touristique. Sans argent que pouvait faire Zébra, sinon la connaissance du désert. Son humble dessinatrice qui la suit avec bienveillance dans ses pérégrinations, est entrée en contact avec elle et Zébra a bien voulu lui apparaitre et délivrer ces quelques paroles, de mon côté je lui ai fait part d'un petit extrait de Walter Benjamin :
vendredi 10 avril 2015
Rien de tel pour se remettre les neurones en phase
que de lire une ou deux pages de Walter Benjamin des Essais 1 sur les Affinités électives (de Gœthe) avant de commencer à faire les choses plus ou moins quotidiennes et routinières qui nous incombent... car cela donne de quoi méditer pour la journée ! C'est profond, je ne suis pas sûre de tout à fait bien comprendre par moments... néanmoins... à mesure que j'avance dans cette lecture, des silhouettes surgissent dans le brouillard, ce sont des propos de Walter Benjamin qui effleurent mon esprit. Fascinante nébuleuse où je ne m'ennuie pas, même "au fond du profond"... même dans ces passages brumeux dont je viens de vous parler à moins que ce ne soit mon esprit qui s'embrume à certains passages.... mais je ne crains pas le rhume, j'ai l'esprit solide si je peux me permettre cet oxymore. La suite de l'extrait sur les Affinités électives, que j'ai mis précédemment en ligne :
"Dès l'origine le propre de ce livre fut une trouble influence capable de s'élever chez des esprits parents, jusqu'à une participation exaltée, et chez des esprits plus étrangers, jusqu'à un bouleversement générateur d'hostilité ; pour l'affronter, il faut un cœur qui, à l'abri d'une raison indéfectible, puisse s'abandonner à sa prodigieuse, à sa magique beauté.
L'incantation veut être le pendant négatif de la création. Elle prétend elle aussi faire naître le monde du néant. Ni avec l'une ni avec l'autre l'œuvre d'art n'a rien de commun. Elle ne naît pas du néant mais du chaos. Elle ne peut cependant surgir de lui comme les théoriciens idéalistes de l'émanation veulent qu'ait surgi l'univers. L'artiste qui produit ne "fait" rien à partir du chaos, il ne pénètre pas en lui ; pas plus en vérité que l'évocation magique, en mélangeant les éléments de ce chaos, il ne crée une apparence. Il y faut la formule. Mais l'ensorcellement de la forme, en un instant, fait de l'œuvre d'art un univers. Aucune, par conséquent, ne saurait paraître vivante sans quelque attache magique ; sinon, elle devient pure apparence, elle cesse d'être œuvre d'art. Il faut que la vie qui s'agite en elle apparaisse figée et comme en un instant ensorcelée. Ce qui est essentiel en elle est cette pure beauté, cette pure harmonie qui se répand à travers le chaos — à travers lui seulement , en vérité, non à travers le monde — mais ne lui donne ainsi que les dehors de la vie. L'inexprimable suspend cette apparence, fige magiquement le mouvement et réduit l'harmonie au mot. Dans l'œuvre, cette vie fonde le mystère, ce durcissement fonde la teneur. En interrompant d'un mot impératif une femme en train de recourir à des faux-fuyants, on peut lui arracher la vérité à l'instant même où se situe l'interruption ; ainsi, l'inexprimable peut retenir une harmonie qui vacille ; par la protestation même qu'elle émet, elle peut de cette harmonie éterniser la vibration. Pour que le beau se justifie, il faut qu'il s'éternise ; mais précisément dans cette justification il semble à présent interrompu, et c'est à la grâce même de cette protestation qu'il doit l'éternité de sa teneur. L'inexprimable est cette puissance critique, qui peut, non point sans doute séparer, au sein de l'art, le faux-semblant de l'essentiel, mais empêcher du moins qu'ils se confondent. S'il est doué d'un tel pouvoir, c'est pare qu'il est parole d'ordre moral. Il manifeste la sublime violence du vrai, telle que la définit, selon les lois du monde moral, le langage du monde réel."
Walter Benjamin
Lu ce matin dans l'actualité à propos de l'antisémitisme qui s'accroît. Sans vouloir dédramatiser à propos de ce qu'ils subissent aujourd'hui, il me semble à lire les infos, que les écoles soient devenues de toute façon, des repaires de harceleurs. Tout ce qui est différent en prend plein la figure. Soit pour une particularité physique qui n'est pas au goût du jour, soit parce que l'on est trop bon en quelque chose, ou alors trop mauvais... car il faut être moyen en tout pour ne pas susciter les foudres des blaireaux que sont devenus moult élèves, probablement enfants de parents eux-mêmes blaireaux et harceleurs. Vous me direz que de mon côté je fais de l'antiblaireautisme...eh bien oui et il est assumé, car le blaireautisme mène à ce genre de harcèlements divers et variés dont les Juifs notamment sont victimes aujourd'hui, harcèlement qui mène au suicide certains adolescents ou au crime certains harceleurs. L'article : http://www.valenciennes.maville.com/actu/actudet_-commentaire-ces-vieux-demons-qui-grondent_fil-2749705_actu.Htm?abo=1063518&serv=173&utm_source=newsletter&utm_medium=email_interne&utm_campaign=lettre_information_maville&utm_content=actualite&xtor=EPR-300-[lettre_information_maville]-20150410-[actualite]-1063518@2
"Dès l'origine le propre de ce livre fut une trouble influence capable de s'élever chez des esprits parents, jusqu'à une participation exaltée, et chez des esprits plus étrangers, jusqu'à un bouleversement générateur d'hostilité ; pour l'affronter, il faut un cœur qui, à l'abri d'une raison indéfectible, puisse s'abandonner à sa prodigieuse, à sa magique beauté.
L'incantation veut être le pendant négatif de la création. Elle prétend elle aussi faire naître le monde du néant. Ni avec l'une ni avec l'autre l'œuvre d'art n'a rien de commun. Elle ne naît pas du néant mais du chaos. Elle ne peut cependant surgir de lui comme les théoriciens idéalistes de l'émanation veulent qu'ait surgi l'univers. L'artiste qui produit ne "fait" rien à partir du chaos, il ne pénètre pas en lui ; pas plus en vérité que l'évocation magique, en mélangeant les éléments de ce chaos, il ne crée une apparence. Il y faut la formule. Mais l'ensorcellement de la forme, en un instant, fait de l'œuvre d'art un univers. Aucune, par conséquent, ne saurait paraître vivante sans quelque attache magique ; sinon, elle devient pure apparence, elle cesse d'être œuvre d'art. Il faut que la vie qui s'agite en elle apparaisse figée et comme en un instant ensorcelée. Ce qui est essentiel en elle est cette pure beauté, cette pure harmonie qui se répand à travers le chaos — à travers lui seulement , en vérité, non à travers le monde — mais ne lui donne ainsi que les dehors de la vie. L'inexprimable suspend cette apparence, fige magiquement le mouvement et réduit l'harmonie au mot. Dans l'œuvre, cette vie fonde le mystère, ce durcissement fonde la teneur. En interrompant d'un mot impératif une femme en train de recourir à des faux-fuyants, on peut lui arracher la vérité à l'instant même où se situe l'interruption ; ainsi, l'inexprimable peut retenir une harmonie qui vacille ; par la protestation même qu'elle émet, elle peut de cette harmonie éterniser la vibration. Pour que le beau se justifie, il faut qu'il s'éternise ; mais précisément dans cette justification il semble à présent interrompu, et c'est à la grâce même de cette protestation qu'il doit l'éternité de sa teneur. L'inexprimable est cette puissance critique, qui peut, non point sans doute séparer, au sein de l'art, le faux-semblant de l'essentiel, mais empêcher du moins qu'ils se confondent. S'il est doué d'un tel pouvoir, c'est pare qu'il est parole d'ordre moral. Il manifeste la sublime violence du vrai, telle que la définit, selon les lois du monde moral, le langage du monde réel."
Walter Benjamin
Lu ce matin dans l'actualité à propos de l'antisémitisme qui s'accroît. Sans vouloir dédramatiser à propos de ce qu'ils subissent aujourd'hui, il me semble à lire les infos, que les écoles soient devenues de toute façon, des repaires de harceleurs. Tout ce qui est différent en prend plein la figure. Soit pour une particularité physique qui n'est pas au goût du jour, soit parce que l'on est trop bon en quelque chose, ou alors trop mauvais... car il faut être moyen en tout pour ne pas susciter les foudres des blaireaux que sont devenus moult élèves, probablement enfants de parents eux-mêmes blaireaux et harceleurs. Vous me direz que de mon côté je fais de l'antiblaireautisme...eh bien oui et il est assumé, car le blaireautisme mène à ce genre de harcèlements divers et variés dont les Juifs notamment sont victimes aujourd'hui, harcèlement qui mène au suicide certains adolescents ou au crime certains harceleurs. L'article : http://www.valenciennes.maville.com/actu/actudet_-commentaire-ces-vieux-demons-qui-grondent_fil-2749705_actu.Htm?abo=1063518&serv=173&utm_source=newsletter&utm_medium=email_interne&utm_campaign=lettre_information_maville&utm_content=actualite&xtor=EPR-300-[lettre_information_maville]-20150410-[actualite]-1063518@2
jeudi 9 avril 2015
Récréation : un admirateur siffle Zébra
Tiens, un lapsus ! Au lieu d'écrire "Nice to meet you" , j'ai écrit "please", ce qui donne "vous rencontrer s'il vous plaît" Zébra serait-elle tentée par le satanisme ? L'apprentissage de la méchanceté pour Zébra ? Il faut que le flic l'ait bien azimutée, qui la poursuivait sans relâche au pays des souris afin probablement de la réduire à néant, rien moins que cela ! Poor Zébra ! Je vais essayer de la remettre sur le droit chemin ! La vengeance étant parfaitement inutile ! Oublie ma Zibounette ! Et sache que ce n'est pas toi qui me mènera par le bout du nez en de telles circonstances, si atténuantes soient-elles.
J'ai très peu de temps pour lire Walter Benjamin ces temps-ci et je le regrette...
mais je m'octroie ce moment précieux ce matin et vous le fais partager. Voici un extrait des Essais 1 1922-1934 des Affinités électives :
"En traitant de l'épisode où interviennent les Grecs, Gœthe est resté parfaitement maître de son art, car c'est dans le cadre même d'un spectacle dramatique qu'il fait paraître la nécromancie en transparence, — et ce n'est certes point un hasard s'il n'a jamais écrit la scène où Faust devait réclamer Hélène à Perséphone. Mais, avec les Affinités électives, les principes démoniques de la magie incantatoire font irruption dans l'œuvre littéraire elle-même. Ce qui est évoqué n'y est jamais de part en part, qu'une apparence, cette beauté incarnée en Ottilie, qui s'est imposée comme une "matière" au sens le plus fort du terme, puissante, mystérieuse, à l'état brut. Ainsi voyons-nous confirmé le caractère infernal que l'auteur impose à la succession des événements. Devant les profondeurs de son art d'écrivain, il ressemble à Ulysse, debout, le glaive nu, devant la fosse pleine de sang, et, comme lui, repoussant les ombres assoiffées pour ne souffrir que celles dont il cherche le parcimonieux discours, signe de leur origine fantomatique. À cette origine la disposition du récit et son développement doivent ce caractère translucide, qui touche parfois à la préciosité. Le goût de la formule, qui apparaît surtout dans la seconde partie — sensiblement plus longue que ne le comportait la première ébauche — se manifeste par allusions dans le style de Gœthe, avec cette infinie multiplicité de parallélismes, de comparaisons, de restrictions, qui font déjà songer à la manière de ses derniers ouvrages. En ce sens Gœrres pouvait dire à Armin qu'il trouvait dans les affinités beaucoup de choses "plus astiquées que ciselées". La formule vaut surtout pour les maximes concernant la vie pratique. Font encore plus problème les traits qui ne peuvent se révéler à aucune visée intentionnelle de caractère purement réceptif : ces correspondances, qu'on ne saurait saisir qu'en renonçant au point de vue esthétique et par une investigation d'ordre purement philologique. Il est certain que grâce à elles, le récit pénètre dans le domaine des formules incantatoires. C'est pourquoi il leur manque si souvent ce qui donne à l'art une vie parfaitement instantanée et définitive, c'est-à-dire la forme. Dans le roman, le rôle de la forme est beaucoup moins de façonner des figures, qui assez souvent, de par la perfection propre de leur puissance, en tant que mythiques, s'instaurent sans formes, que de les composer de façon hésitante, jouant avec elles comme on dessine des arabesques, pour les décomposer ensuite en toute justesse. On peut dire que l'effet produit par le roman correspond aux problèmes qui s'y trouvent posés. Alors que d'autres livres doivent au sentiment d'un lecteur non prévenu la meilleure par, sinon le plus haut degré, de l'impression qu'ils produisent, les Affinités ne peuvent émouvoir qu'en bouleversant de fond en comble."
Walter Benjamin
La suite de l'extrait demain.
"En traitant de l'épisode où interviennent les Grecs, Gœthe est resté parfaitement maître de son art, car c'est dans le cadre même d'un spectacle dramatique qu'il fait paraître la nécromancie en transparence, — et ce n'est certes point un hasard s'il n'a jamais écrit la scène où Faust devait réclamer Hélène à Perséphone. Mais, avec les Affinités électives, les principes démoniques de la magie incantatoire font irruption dans l'œuvre littéraire elle-même. Ce qui est évoqué n'y est jamais de part en part, qu'une apparence, cette beauté incarnée en Ottilie, qui s'est imposée comme une "matière" au sens le plus fort du terme, puissante, mystérieuse, à l'état brut. Ainsi voyons-nous confirmé le caractère infernal que l'auteur impose à la succession des événements. Devant les profondeurs de son art d'écrivain, il ressemble à Ulysse, debout, le glaive nu, devant la fosse pleine de sang, et, comme lui, repoussant les ombres assoiffées pour ne souffrir que celles dont il cherche le parcimonieux discours, signe de leur origine fantomatique. À cette origine la disposition du récit et son développement doivent ce caractère translucide, qui touche parfois à la préciosité. Le goût de la formule, qui apparaît surtout dans la seconde partie — sensiblement plus longue que ne le comportait la première ébauche — se manifeste par allusions dans le style de Gœthe, avec cette infinie multiplicité de parallélismes, de comparaisons, de restrictions, qui font déjà songer à la manière de ses derniers ouvrages. En ce sens Gœrres pouvait dire à Armin qu'il trouvait dans les affinités beaucoup de choses "plus astiquées que ciselées". La formule vaut surtout pour les maximes concernant la vie pratique. Font encore plus problème les traits qui ne peuvent se révéler à aucune visée intentionnelle de caractère purement réceptif : ces correspondances, qu'on ne saurait saisir qu'en renonçant au point de vue esthétique et par une investigation d'ordre purement philologique. Il est certain que grâce à elles, le récit pénètre dans le domaine des formules incantatoires. C'est pourquoi il leur manque si souvent ce qui donne à l'art une vie parfaitement instantanée et définitive, c'est-à-dire la forme. Dans le roman, le rôle de la forme est beaucoup moins de façonner des figures, qui assez souvent, de par la perfection propre de leur puissance, en tant que mythiques, s'instaurent sans formes, que de les composer de façon hésitante, jouant avec elles comme on dessine des arabesques, pour les décomposer ensuite en toute justesse. On peut dire que l'effet produit par le roman correspond aux problèmes qui s'y trouvent posés. Alors que d'autres livres doivent au sentiment d'un lecteur non prévenu la meilleure par, sinon le plus haut degré, de l'impression qu'ils produisent, les Affinités ne peuvent émouvoir qu'en bouleversant de fond en comble."
Walter Benjamin
La suite de l'extrait demain.
mercredi 8 avril 2015
mardi 7 avril 2015
Lao Tzu
Life is a series of natural and spontaneous changes. Don't resist them -- that only creates sorrow. Let reality be reality. Let things flow naturally forward in whatever way they like.
lundi 6 avril 2015
Internet : le partage et l'éthique
Une occasion pour moi de rendre hommage à Wikipédia, La Vie des Idées et autres sites qui mettent en partage leur savoir, sites que d'aucuns voudraient privatiser quel dommage ! Sur ce thème, un extrait de l'analyse et le lien pour le texte intégral :
"Contre cette éthique appliquée du partage, ils voient surgir une phalange de grandes entreprises déterminées à privatiser pour leur seul profit les ressources intellectuelles d’un monde interconnecté.
"Contre cette éthique appliquée du partage, ils voient surgir une phalange de grandes entreprises déterminées à privatiser pour leur seul profit les ressources intellectuelles d’un monde interconnecté.
Cette lutte pour la maîtrise de l’univers numérique, fruit des avances technologiques des deux dernières décennies, peut sembler absolument sans précédent ; pourtant, de nombreux militants d’Internet se donnent du mal pour y voir des liens avec les luttes agraires des siècles passés. Le juriste James Boyle désigne l’expansion des droits de propriété intellectuelle dans les médias numériques sous le nom de « second mouvement des enclosures », expression qui renvoie à une étape bien connue de l’histoire agraire de l’Angleterre, lorsque les terres communales furent divisées et clôturées pour un usage privé [1]. D’autres personnes ont adopté la même référence historique et l’ont appliquée non seulement à Internet, mais à une multitude d’autres sphères où des entreprises revendiquent des droits sur des ressources auparavant à accès libre ou partagé. Parfois présentée comme une métaphore, parfois comme une analogie, cette idée selon laquelle nous assistons à une « enclosure des terres communales » intellectuelles a pris racine."
http://www.laviedesidees.fr/Confusion-sur-les-Communs.html
http://www.laviedesidees.fr/Confusion-sur-les-Communs.html
dimanche 5 avril 2015
Les éponges
J'ai bien aimé l'idée des éponges. C'est ici :
http://lejourou130113.hautetfort.com/archive/2015/04/05/j-ai-essore-l-eponge-5597499.html
http://lejourou130113.hautetfort.com/archive/2015/04/05/j-ai-essore-l-eponge-5597499.html
La vivisection se pratique encore
Une marche contre la vivisection sur les animaux va avoir lieu à Strasbourg, le lien sous les dessins (à partir de photos vues sur la toile).
http://unjouressentiel.hautetfort.com/archive/2015/04/04/amis-strasbourgeois-et-amoureux-des-animaux-une-marche-anti-5596907.html
http://unjouressentiel.hautetfort.com/archive/2015/04/04/amis-strasbourgeois-et-amoureux-des-animaux-une-marche-anti-5596907.html
vendredi 3 avril 2015
La jungle
D'aucuns disent "le travail à la chaîne c'est pareil" pour signifier que tout travail qui avilit la personne qui le fait, c'est pareil. Faire un job qui vous pollue l'organisme, "c'est pareil" ? À ce compte-là nous serions dans un monde de victimes consentantes qui mériteraient presque ce qui leur arrive ... Pour commencer, les gens dans l'urgence n'ont pas le loisir de réfléchir. Arrêter de créer de l'urgence pour un monde où respect de soi et de l'autre deviendrait effectif, voilà mon souhait. Mais ce n'est pas gagné car j'ai ouï dire aux alentours par-ci par-là : "on ne peut plus fumer au bistrot, on ne peut plus etc., que les politiques arrêtent de s'immiscer dans la vie des gens ! C'est que de la diversion en plus ! quitte à s'immiscer dans la vie des gens autant que ce soit pour des choses utiles... Depuis qu'on ne peut plus fumer dans les troquets ils ferment les uns après les autres... comme si le bistrot n'était pas un lieu de perdition à la base... pour se refaire une santé, il y a les salles de gym... Si les gens avaient envie d'aller picoler et se perdre, ça les regardait, ils n'allaient pas là pour faire des pompes. Le bistrot c'est l'assommoir de Zola... même dans les salons de thé on pouvait fumer d'ailleurs..." Il se dit ce genre de choses ! Pour autant, mon souhait reste le même, inflexible est-il tel un roseau dans la tempête. Des gens qui ont la volonté de se perdre et qui en ont le droit... comme le droit au suicide même quand la santé est là... c'est une notion étrange du droit par ailleurs, comme le droit à l'erreur maximale en cas de suicide ... étrange !
jeudi 2 avril 2015
Zébra spectatrice, sa tante est en tête
Avec le printemps toutes sortes de courses reprennent, dans l'univers de Zébra, la course de cordes à sauter pour débuter la saison du printemps. Quel dynamisme !
Limpides pour quelques-unes, relativement pour les autres
Voici un passage sans mots difficiles, quelques lignes dont certaines sont limpides comme une eau de roche, d'autres un peu moins selon moi. Un passage de l'essai de Benjamin Walter sur le livre de Goethe, des Affinités électives :
"Pour lui il n'est mariage plus hautement spirituel que celui où la chute même de saurait rabaisser la moralité de ceux qu'elle affecte. Mais, en matière morale, la noblesse s'exprime dans un rapport entre personnes. Si la noble expression n'est pas conforme à ce rapport, la noblesse est sujette à caution. Cette loi, qu'il serait assurément fort erroné de déclarer valable sans limites, s'étend à tous les domaines de la moralité. S'il existe incontestablement des domaines d'expression où la validité des contenus est indépendante de qui les manifeste, si ce sont même les plus élevés de tous, la condition nécessaire qu'on a dite est inéluctable dans le domaine de la liberté au sens le plus large. Lui appartient l'empreinte individuelle de la convenance, l'empreinte individuelle de l'esprit, tout ce qu'on appelle culture. C'est ce qu'attestent surtout ceux qui se sont familiarisés avec elle. Est-ce vraiment conforme à leur situation ? La liberté voudrait moins de tergiversations, la clarté moins de silences, la décision moins de complaisances. La culture ne garde sa valeur que là où elle reste libre de s'attester. C'est bien d'ailleurs ce que montre clairement l'action.
Ses protagonistes, personnes cultivées, sont presque libres de superstitions. Si elle apparaît, ici et là, chez Eduard, c'est au début seulement, sous la forme plus aimable d'un attachement aux présages de bonheur, tandis que le caractère plus banal de Mittler, en dépit de ses attitudes suffisantes, laisse voir les traces d'une peur vraiment superstitieuse, du mauvais omen (Note en bas de page : augure). Il est le seul qu'une crainte superstitieuse, non pieuse, retienne de pénétrer, comme les autres, dans l'enceinte du cimetière, alors qu'il ne paraît aux amis ni scandaleux de s'y promener, ni interdit d'en modifier l'ordonnance. Sans scrupule, disons même sans égards, on transporte les pierres tombales le long du mur de l'église et l'on abandonne au pasteur, pour y semer son trèfle, le terrain aplani que traverse un sentier. Peut-on concevoir, face à la tradition, affranchissement plus caractéristique que de toucher aux tombes des ancêtres qui, sous les pas des vivants, fondent le sol non seulement du mythe mais de la religion ? Où cette liberté conduit-elle ceux qui agissent ainsi ? Bien loin de leur ouvrir des vues nouvelles, elle les rend aveugles devant le réel immanent à ce qu'on craint. Et cela parce qu'elle leur est inadéquate. Pour que des hommes comme ceux-là soient arrêtés devant la nature au milieu de laquelle ils vivent, il leur faudrait la rigoureuse attache à un rituel qu'on ne peut appeler superstitieuse que lorsque, détachée de son vrai contexte, elle n'est que survivance rudimentaire."
Walter Benjamin Essais 1 1922-1934
"Pour lui il n'est mariage plus hautement spirituel que celui où la chute même de saurait rabaisser la moralité de ceux qu'elle affecte. Mais, en matière morale, la noblesse s'exprime dans un rapport entre personnes. Si la noble expression n'est pas conforme à ce rapport, la noblesse est sujette à caution. Cette loi, qu'il serait assurément fort erroné de déclarer valable sans limites, s'étend à tous les domaines de la moralité. S'il existe incontestablement des domaines d'expression où la validité des contenus est indépendante de qui les manifeste, si ce sont même les plus élevés de tous, la condition nécessaire qu'on a dite est inéluctable dans le domaine de la liberté au sens le plus large. Lui appartient l'empreinte individuelle de la convenance, l'empreinte individuelle de l'esprit, tout ce qu'on appelle culture. C'est ce qu'attestent surtout ceux qui se sont familiarisés avec elle. Est-ce vraiment conforme à leur situation ? La liberté voudrait moins de tergiversations, la clarté moins de silences, la décision moins de complaisances. La culture ne garde sa valeur que là où elle reste libre de s'attester. C'est bien d'ailleurs ce que montre clairement l'action.
Ses protagonistes, personnes cultivées, sont presque libres de superstitions. Si elle apparaît, ici et là, chez Eduard, c'est au début seulement, sous la forme plus aimable d'un attachement aux présages de bonheur, tandis que le caractère plus banal de Mittler, en dépit de ses attitudes suffisantes, laisse voir les traces d'une peur vraiment superstitieuse, du mauvais omen (Note en bas de page : augure). Il est le seul qu'une crainte superstitieuse, non pieuse, retienne de pénétrer, comme les autres, dans l'enceinte du cimetière, alors qu'il ne paraît aux amis ni scandaleux de s'y promener, ni interdit d'en modifier l'ordonnance. Sans scrupule, disons même sans égards, on transporte les pierres tombales le long du mur de l'église et l'on abandonne au pasteur, pour y semer son trèfle, le terrain aplani que traverse un sentier. Peut-on concevoir, face à la tradition, affranchissement plus caractéristique que de toucher aux tombes des ancêtres qui, sous les pas des vivants, fondent le sol non seulement du mythe mais de la religion ? Où cette liberté conduit-elle ceux qui agissent ainsi ? Bien loin de leur ouvrir des vues nouvelles, elle les rend aveugles devant le réel immanent à ce qu'on craint. Et cela parce qu'elle leur est inadéquate. Pour que des hommes comme ceux-là soient arrêtés devant la nature au milieu de laquelle ils vivent, il leur faudrait la rigoureuse attache à un rituel qu'on ne peut appeler superstitieuse que lorsque, détachée de son vrai contexte, elle n'est que survivance rudimentaire."
Walter Benjamin Essais 1 1922-1934
Le Mans ce n'est pas que l'automobile
Le Mans était la ville d'attache des Plantagenêt, c'est ici :
http://www.herodote.net/Le_Mans-synthese-2018.php
http://www.herodote.net/Le_Mans-synthese-2018.php
mercredi 1 avril 2015
À propos de Benjamin Walter
J'ai consulté Wikipédia et vu qu'il avait eu à traverser les perturbations effrayantes de la période nazie. Il y a eu une sorte de rétrécissement de l'espace d'un coup en Europe, devenue étau qui se resserrait sur les Juifs et les Gitans.
Quelques lignes de Wikipédia à propos de l'œuvre du philosophe :
Quelques lignes de Wikipédia à propos de l'œuvre du philosophe :
"Le concept du temps
Le point le plus radical des notes « Sur le concept d’histoire » de Walter Benjamin est sans doute la critique du concept de temps comme continu et linéaire, concept aujourd’hui dominant. Car la théologie connaît la possibilité et la nécessité d'interrompre le continuum temporel. La différence entre la théologie et ce que Benjamin saisit en elle consiste en ce qu’il voit la possibilité d'une fracture à l'intérieur de notre monde en immanence. L’ « à-présent » [Jetztzeit] n'est pas le Jugement dernier et il ne faut pas attendre la mort pour s'approcher de la nouvelle conception du temps. L'expérience et la pratique de nombreuses générations dans leurs actes de remémoration vivante et dans les traditions attestent, en quelque façon, ce concept d’à-présent."
Assez flou pour moi.... mais il y a une résonnance presque familière en raison des fantasmes et des prospections dont il est souvent question sur le Temps. Comme je manque d'imagination sur le sujet... j'y remédierai sûrement en persévérant dans une lecture de Walter Benjamin.
Ce n'est pas une farce
Ce n'est pas une farce, j'ai réellement lu ce matin la préface de Maurice de Gandillac d'un essai de Walter Benjamin qui commente une œuvre de Goethe, de Proust, de Valéry et de Kafka. Et ensuite quelques pages de l'essai lui-même. Où j'ai pris conscience de mes limites s'il en était encore besoin, cependant, bien que m'échappèrent évidemment beaucoup de choses en raison notamment de la doxa, d'allusions à des auteurs que je connais au mieux de nom seulement, certains propos trouvèrent écho en moi. Si bien que, outillée d'un dictionnaire un peu spécialisé (non encore choisi sur la toile) et d' encyclopédies diverses et variées que je compte aussi trouver sur le web, l'hermétisme de nombreux passages me paraîtra sans doute moins insurmontable. Maurice de Gandillac pointe du doigt l'hermétisme de Walter Benjamin, mais en fait tout autant preuve.
À propos de Goethe, un extrait du commentaire de Walter Benjamin, que j'ai trouvé abordable :
"Dès le début les personnages sont sous le charme des affinités électives. Or leur action magique — Goethe l'a compris de façon profonde et riche en pressentiments — ne fonde pas un accord spirituel intérieur entre les êtres, mais seulement l'harmonie naturelle des couches naturelles plus profondes. Lesquelles sont entendues avec le léger ratage qui affecte sans exception de tels assemblages. Certes Ottilie s'adapte au jeu d'Eluard jouant de la flûte, mais ce jeu est faux. Certes, lorsque Eduard lit, il souffre d'Ottilie ce qu'il interdisait à Charlotte, mais c'est une mauvaise habitude. Certes il trouve merveilleuse sa conversation, mais elle ne dit rien. Certes ils souffrent ensemble du même mal, mais ce n'est qu'une migraine. Ces personnages ne sont pas naturels, car des humains sont — dans un état de nature fabuleux ou effectif — enfants de la nature. Cependant, au niveau de la culture, ils sont soumis aux forces qu'elle met en circulation, comme dominées, pour impuissante qu'elle soit toujours, on le voit bien, à les retenir sous sa coupe. Elles leur ont laissé le sens de ce qui est convenable, ils ont perdu le sens de ce qui est moral. On ne juge pas ici leur conduite, mais leur langage. Car, doués de sentiment, ils vont leur chemin comme des sourds ; doués de vision, ils vont leur chemin comme des muets. Sourds devant Dieu, et muets devant le monde. Ce qui fait échouer leur compte rendu, ce n'est point leur conduite, c'est leur être. Ils sont frappés de mutité."
Aucun mot difficile ici tiré d'une doxa ardue mais le propos reste énigmatique pour qui comme moi n'a pas lu le livre de Goethe sur les affinités électives. Peut-être qu'après avoir lu ce qu'en dit Walter Benjamin, certains lecteurs perspicaces connaîtront ce livre mieux que son auteur lui-même. Walter Benjamin est de culture juive, une culture que je sens quand il parle notamment des noms de famille, et de la nature aussi. Walter se défiant énormément de l'eau morte (lui non plus n'aimerait pas le canal d'Aire du coup). Dans l'eau résident selon lui des forces démoniques qui ne demandent qu'à engloutir les êtres. Je peux le concevoir d'une façon assez proche concernant une eau qui donnerait envie qu'on y plonge pour éventuellement réserver un tour pendable au nageur (comme l'eau d'une piscine profonde sur certains mauvais nageurs), mais le canal d'Aire n'exerce pas d'attractivité sur moi, tant mieux car je nage très mal, pour moi au contraire ce canal est porteur. Il porte les péniches. Il nourrit la terre qui chemine à ses côtés. L'eau comme un autre élément, le feu, contrôlés, sont extrêmement bénéfiques mais évidemment la nature peut se réveiller de différentes façons : au printemps, de la manière la plus agréable qui soit, mais aussi, beaucoup plus rarement fort heureusement, sous forme d'ouragan, ou de pluies diluviennes et "engloutissantes" comme le seraient une mère ou même un père possessifs et/ou abusifs. Toujours est-il que je suis punk vis-à-vis de penseurs de ce gabarit, un peu comme vis-à-vis de grands matheux... attention donc, le punk doit redoubler de prudence face aux mastodontes !
Je vais entreprendre malgré tout une tentative de lecture, ne serait-ce que du fait de ces choses, comme je le disais plus haut, qui ont fait écho en moi.
À propos de Goethe, un extrait du commentaire de Walter Benjamin, que j'ai trouvé abordable :
"Dès le début les personnages sont sous le charme des affinités électives. Or leur action magique — Goethe l'a compris de façon profonde et riche en pressentiments — ne fonde pas un accord spirituel intérieur entre les êtres, mais seulement l'harmonie naturelle des couches naturelles plus profondes. Lesquelles sont entendues avec le léger ratage qui affecte sans exception de tels assemblages. Certes Ottilie s'adapte au jeu d'Eluard jouant de la flûte, mais ce jeu est faux. Certes, lorsque Eduard lit, il souffre d'Ottilie ce qu'il interdisait à Charlotte, mais c'est une mauvaise habitude. Certes il trouve merveilleuse sa conversation, mais elle ne dit rien. Certes ils souffrent ensemble du même mal, mais ce n'est qu'une migraine. Ces personnages ne sont pas naturels, car des humains sont — dans un état de nature fabuleux ou effectif — enfants de la nature. Cependant, au niveau de la culture, ils sont soumis aux forces qu'elle met en circulation, comme dominées, pour impuissante qu'elle soit toujours, on le voit bien, à les retenir sous sa coupe. Elles leur ont laissé le sens de ce qui est convenable, ils ont perdu le sens de ce qui est moral. On ne juge pas ici leur conduite, mais leur langage. Car, doués de sentiment, ils vont leur chemin comme des sourds ; doués de vision, ils vont leur chemin comme des muets. Sourds devant Dieu, et muets devant le monde. Ce qui fait échouer leur compte rendu, ce n'est point leur conduite, c'est leur être. Ils sont frappés de mutité."
Aucun mot difficile ici tiré d'une doxa ardue mais le propos reste énigmatique pour qui comme moi n'a pas lu le livre de Goethe sur les affinités électives. Peut-être qu'après avoir lu ce qu'en dit Walter Benjamin, certains lecteurs perspicaces connaîtront ce livre mieux que son auteur lui-même. Walter Benjamin est de culture juive, une culture que je sens quand il parle notamment des noms de famille, et de la nature aussi. Walter se défiant énormément de l'eau morte (lui non plus n'aimerait pas le canal d'Aire du coup). Dans l'eau résident selon lui des forces démoniques qui ne demandent qu'à engloutir les êtres. Je peux le concevoir d'une façon assez proche concernant une eau qui donnerait envie qu'on y plonge pour éventuellement réserver un tour pendable au nageur (comme l'eau d'une piscine profonde sur certains mauvais nageurs), mais le canal d'Aire n'exerce pas d'attractivité sur moi, tant mieux car je nage très mal, pour moi au contraire ce canal est porteur. Il porte les péniches. Il nourrit la terre qui chemine à ses côtés. L'eau comme un autre élément, le feu, contrôlés, sont extrêmement bénéfiques mais évidemment la nature peut se réveiller de différentes façons : au printemps, de la manière la plus agréable qui soit, mais aussi, beaucoup plus rarement fort heureusement, sous forme d'ouragan, ou de pluies diluviennes et "engloutissantes" comme le seraient une mère ou même un père possessifs et/ou abusifs. Toujours est-il que je suis punk vis-à-vis de penseurs de ce gabarit, un peu comme vis-à-vis de grands matheux... attention donc, le punk doit redoubler de prudence face aux mastodontes !
Je vais entreprendre malgré tout une tentative de lecture, ne serait-ce que du fait de ces choses, comme je le disais plus haut, qui ont fait écho en moi.
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