Je parle de celui de James Ellroy dont j'ai lu l'interview dans Télérama ce matin. Un extrait :
"Je suis né en 1948 et je me souviens d'une discussion avec ma mère, quand j'avais 8 ans, où elle a compris que je nous croyais encore en guerre. "Tu sais, la paix est signée depuis un moment", m'a-t-elle dit. Le conflit était tellement ancré dans l'imaginaire américain que je ne l'ai pas crue, je ne sais même pas si je la crois aujourd'hui. Je vis toujours sous l'emprise de mon imagination. Le Los Angeles où j'ai grandi a été façonné par la guerre. C'était une ville en plein boom au début des années 1940. Un port, face au Pacifique, d'où venaient nos ennemis et où partaient nos soldats. L'industrie de la défense y avait établi ses quartiers, les troupes logeaient dans la ville. [...]
plus loin à la question : Comment faites-vous pour vous immerger dans le passé sur lequel vous écrivez ?
[...] je n'ai aucun mal à me plonger dans ce passé, car j'y ai vécu toute ma vie. Je sors rarement de ce monde imaginaire, je me projette en permanence des images de Wilshire Boulevard dans les années 1940. Toutes les rues, tous les bâtiments de la ville, je les sens près de moi. Regardez cet hôpital, là-bas : il est en moi. Le restaurant où nous nous trouvons a ouvert en 1921, et j'y viens toujours parce que je m'y sens en paix. Ma maison pas loin de Griffith Park, a été construite en 1926. J'ai besoin de rester au contact du passé et de le réinventer sans cesse, c'est ma manière de l'affronter. Et puis, je suis extrêmement concentré quand je travaille. Et je travaille tout le temps. Après vous avoir quitté, j'irai faire une sieste, j'aboierai un peu avec le chien du voisin, je me ferai une tasse de café et je retournerai en 1942..."
Télérama de cette semaine Extrait de l'interview de James Ellroy
Dans beaucoup de mes rêves mon cerveau me fait remonter le temps à l'époque de mon fils vers un âge variant de quelques mois à six-sept ans ; je le tiens dans mes bras, contre mon cœur. Les vivants voient souvent les choses rétrospectivement, comme pour interroger le passé. James Ellroy dit qu'il ne voit pas sa ville, Los Angeles comme elle est aujourd'hui. Ça ne l'intéresse pas, du moins, toujours pas. Comme s'il ne voulait pas se laisser distraire de quelque chose d'essentiel qui est le sujet qu'il veut traiter, qu'une histoire porte, et cette histoire se déroule dans le passé. J'ai dit "les vivants" un peu plus haut, mot qui m'est venu spontanément, sans doute pour dire qu'à mon sens, ce retour constant dans le passé n'est pas une attitude morbide chez James Ellroy, cela tient d'un travail, lequel n'est pas laborieux mais inspiré. Et pour une large part, il semblerait que sa mère y collabore, ou du moins, qu'elle soit toujours présente. Est-ce de cette présence-là qu'il ne veut pas se distraire ? Je ne le pense pas car James Ellroy semble écouter ce qu'il appelle Dieu. Il l'interroge sans doute...
mercredi 29 avril 2015
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