lundi 13 juin 2016

L'individualisme et les intellectuels ♣♣♣ Un poème de Francis Jammes


À écouter dès que possible, une analyse d'Emile Durkheim.

"« Non seulement l’individualisme n’est pas l’anarchie, mais c’est désormais le seul système de croyances qui puisse assurer l’unité morale du pays. On entend souvent dire aujourd’hui que, seule, une religion peut produire cette harmonie. Cette proposition, que de modernes prophètes croient devoir développer d’un ton mystique, est, au fond, un simple truisme sur lequel tout le monde peut s’accorder. […] Or tout concourt précisément à faire croire que la seule possible est cette religion de l’humanité dont la morale individualiste est l’expression rationnelle. »


Émile Durkheim écrit ce texte en 1898, en pleine affaire Dreyfus, alors que vient de paraître le pamphlet J’accuse ! d’Émile Zola (le « littérateur » évoqué dans les premières lignes du texte).
Sans évoquer directement l’affaire, Durkheim s’interroge sur ce qui peut constituer la cohérence d’une société quand la religion ne peut plus jouer ce rôle, esquissant, en quelques pages, une réflexion inspirante sur l’humanisme, le difficile usage de la liberté et le rôle des institutions politiques."



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♣♣♣

« Il y a une armoire à peine luisante
qui a entendu les voix de mes grand-tantes
qui a entendu la voix de mon grand-père,
qui a entendu la voix de mon père.
À ces souvenirs l’armoire est fidèle.
On a tort de croire qu’elle ne sait que se taire,
car je cause avec elle.

Il y a aussi un coucou en bois.
Je ne sais pourquoi il n’a plus de voix.
Je ne peux pas le lui demander.
Peut-être bien qu’elle est cassée,
la voix qui était dans son ressort,
tout bonnement comme celle des morts.

Il y a aussi un vieux buffet
qui sent la cire, la confiture,
la viande, le pain et les poires mûres.
C’est un serviteur fidèle qui sait
qu’il ne doit rien nous voler.

Il est venu chez moi bien des hommes et des femmes
qui n’ont pas cru à ces petites âmes.
Et je souris que l’on me pense seul vivant
quand un visiteur me dit en entrant :
- comment allez-vous, monsieur Jammes ?

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