C'était lundi dernier, j'étais à la caisse de la grande surface (encore!) et je lisais les gros titres de La Voix du Nord (j'ai ach'té le canard cela dit) quand un bébé, mignon comme une immense majorité de bébés tend le bras vers mon journal. Manifestement, assis qu'il était sur le porte bébé du caddy précédent, il voulait attirer mon attention, histoire de s'amuser un peu pour tromper l'ennui. Le petit papa aux commandes du caddy de bébé, fluet "gamin" d'une petite vingtaine d'années, châtain foncé de cheveux et de yeux, au teint pâle, dit au petit quelque chose du genre, "comme quoi il ne faut pas lire le journal de madame, que le journal n'était pas à lui mais à madame" ... stupidités que l'on dit juste pour parler tendrement à son petit, car évidemment qu'à dix mois le petiot ne savait pas lire, je réponds à son papa sur le même ton, qu'en outre il y a des choses plus intéressantes à lire à son âge que les faits divers qui émaillent les journaux. Nous débitons l'un et l'autre quelques absurdités du même acabit, et fadaises comme :
— c'est un garçon ou une fille ?
— Un garçon.
— Mince ! J'aurais cru une fille... quand ils sont mignons comme ça etc. ( tellement que c'est gnangnan que je ne termine pas)
— ☺ c'est-à-dire qu'il a pas les cheveux coupés non plus. Mais je vais le faire. Dis merci à madame pour le compliment.
Voyant que ma baliverne a fait chaud au cœur du papa (car si je pense réellement que le petit est mignon cela m'indiffère assez qu'il le soit), je sens qu'il faut lui donner encore un petit coup de chaud à ce papa-là et lui dis tout de go, que ce n'est pas la peine que son petit me remercie (vu qu'à son âge d'abord on ne remercie pas comme ça me pense-je intérieurement) car il en recevra encore beaucoup des compliments, "vu comment il est sage comme une image qui plus est."
Soudain, au détour de ces propos insipides, le frêle petit jeune homme me déclare tout net, non point sa flamme, tant que nous y étions pourquoi pas ? mais que la maman du petit "s'était barrée" peu de temps après la naissance de cette merveille.
Encouragements de ma part, qui tenaient encore un peu au début d'une certaine gnagnatise car j'étais désarçonnée par la confidence. Le papa m'a fait tranquillement part, comme ça, alors que nous attendions notre tour à la caisse de son désarroi à l'époque où il constata le départ de sa femme, encore trop jeune selon lui pour supporter une telle responsabilité. Coup de bol, l'enfant est facile ! lui fais-je remarquer. Et c'est peu de le dire car en effet il semble qu'il soit toujours bien dans son élément. Le papa confirme qu'il pleure rarement, est facilement content, à l'aise partout. Un bébé qui rassure son papa. Ou un papa qui en dépit des circonstances n'a pas paniqué. Il me confie encore que, pris au dépourvu, il a dû s'arrêter de travailler, l'enfant n'étant pas inscrit à la crèche, et qu'il touchait une allocation de parent isolé en attendant que le petit intègre une école et qu'il puisse retrouver du travail. Arrivé à ce point de la conversation, le bébé me regardant avec des yeux souriants tandis que son papa causait, arrive leur tour de passer à la caisse. Le papa soulève un énorme paquet de croquettes pour chien et une autre bricole. Va-t-il m'oublier en partant, en ne saluant que la caissière ? Non. Il se retourne sur moi, me dit merci avec un bon sourire et s'en retourne chez lui à Tourcoing, car il a dit aussi à sa confidente du hasard, comme souvent heureux, le nom de sa ville. Le souriant garçonnet s'appelle Maxime. Maxime, le bon ange !
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