samedi 9 mai 2015

Relativiser

Il faut savoir relativiser, ne pas se laisser contrarier par des futilités. Les courses  me stressent, et  ça ne s'arrange pas avec le temps. Aujourd'hui particulièrement. Et alors ? Un paquet de semences perdu, dix de etc. Le paquet de  semences de fleurs en question  n'a pas été retrouvé lorsque, rentrée à la maison, j'ai rangé les provisions de la semaine. Sous l'effet de la contrariété j'ai revu le minois de la caissière à qui j'avais eu affaire. Je l'avais choisie parce qu'il n'y avait pas de file d'attente à sa caisse, la voyant je me suis souvenue du client qui lui avait déclaré haut et fort à une période de carnaval "j'admire votre beauté", à quoi la jeune femme avait répondu un simple "merci"*,  humble et sérieux. Que je n'avais pas interprété à l'époque, mais qui avait suscité une certaine considération de ma part car j'avais pu constater que la fille, arborant une moustache de chat dessinée d'un trait noir, recourbé en boucle de chaque côté, ne se la jouait pas mégalo, ce qui est reposant pour les autres à mon sens. Maintenant que je lui reproche d'être allée trop vite, de m'être fait me dépêcher au point que je ne me rappelle plus d'avoir eu en main, une fois à la caisse,  le petit paquet de graines, à peine plus grand et épais qu'une carte d'identité, elle m'agace. Pas que je sois grippe-sous mais c'est râlant de perdre bêtement quatre euros soixante et surtout j'avais envie de voir pousser ces fleurs. Je projette de boire un déca à une terrasse avec mon précieux livre du moment en guise de consolation. Mais d'abord, je suis retournée à la grande surface espérant que l'hôtesse m'en proposerait un autre en voyant mon ticket de caisse, gage que j'avais bien payé l'article. Elle pouvait toujours s'imaginer que j'en voulais deux pour le prix d'un, ou autre chose. Elle me dit " "Il sera passé par les interstices du caddy." Je lui réponds "Non, je ne pense pas. Il faudrait surtout que les caissières arrêtent le tapis quand il est plein. Bonne journée quand même." Je suis allée en acheter un autre, et enfin me suis dirigée vers le lieu où il  aurait dû y avoir une terrasse. À cause des gros nuages, une seule table à laquelle étaient installés deux hommes discutant ferme, était sortie. Je m'attable à l'intérieur, relativement contrariée encore une fois et m'aperçois que parmi les babioles emportées dans mon sac,  il n'y a pas le livre que je voulais lire. Même pas de gros soupir. De la résignation puis de l'inquiétude. Je l'aurais égaré comme le paquet de semences, ce livre ? Je rentre en appuyant  énergiquement, sur les pédales. Perdre un livre qu'il faut rendre à la bibliothèque, bonjour les ennuis ! C'est bien plus ennuyeux que la perte d'un paquet de semences. De plus, en recopient des pages et des pages de propos philosophiques de l'auteur du livre en question, que je trouvais trop abstrait pour moi au début, j'ai fini par  comprendre. Le ralenti de l'écriture fut propice à l'ouverture de mon esprit à des propos qui avaient l'air si abscons quand je les lisais  de façon ordinaire. J'attendais la suite et je l'aurais perdu....  Je l'aurais perdu  en retournant à la grande surface pour tenter de récupérer les graines, probablement au moment où j'étais à la machine distributrice de sachets transparents, en train d'envelopper ce que j'avais dans mon sac dans le but d'entrer dans leur antre et de m'en procurer d'autres.  Le livre sera tombé. Adieu veaux, vaches....  Arrivée à la maison, je plante mon vélo, sans antivol, dans ce quartier "du Bronx" (paraît-il) contre le mur de la façade, je trouve mes clés sans peine, ouvre la porte, traverse le petit couloir, avance dans la salle, et vois sur le canapé la couverture du livre que je croyais égaré dans la poche du surveillant de la grande surface, en mal de lecture. Sourire serein de Walter Benjamin sur la photo. Quatre euros soixante de perdus mais le livre, non, et il y a la photo, toujours là. Donc, finalement, c'est une bonne journée... mais j'ai besoin d'un peu de repos et cela me relaxe beaucoup, tout en favorisant ma  concentration, le ralenti de la lecture par l'écriture.


* après relecture de ce texte je me souviens qu'elle avait dit exactement "merci, c'est gentil."

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