mardi 19 avril 2016
La journée de la critique ♣♣♣ Le théâtre et ses bienfaits ♣♣♣ lu ce jour, au sujet de l'amour qui cause le bien
Le poème de Desnos mis en ligne hier est élégamment écrit et mieux, sait faire surgir une ambiance, un climat, comme dirait Bachelard, on est dans l'image vécue qu'on ne peut faire advenir qu'en poésie, en état de rêverie consciente. Mais ce poème dégage trop de tristesse à mon goût. Bachelard pense qu'on ne peut créer en état de souffrance, Desnos dément par ce poème, mais pas totalement cependant car la souffrance de Desnos, à mon sens, n'est pas dans ce poème-ci sublimée totalement. À partir du moment où un lecteur peut éventuellement se prendre un bon coup de blues non sublimé celui-là, après lecture du poème, c'est qu'il est quand même trop peu créatif, si créatif avait à voir avec "chanter le cri", et non plus "souffrir comme une bête" à qui on vient de voler ses petits.
Hier aux infos, j'ai vu des gens, dont la famille est ensevelie sous des décombres de maison, souffrir comme des bêtes, justement, car le niveau de souffrance est trop élevé... et oblige à passer par la phase animale en nous... l'art ne pourra faire quelque chose pour eux que bien plus tard, pour les aider à se reconstruire. Pour l'heure s'agissant des gens dont la famille est ensevelie sous les décombres, morte ou vivante, ou ils seront capables de prier si une foi forte les habite, ou ils souffrent de façon animale, ce qui n'est pas honteux du tout, mais la douleur alors est à son comble et peut rendre fou un humain.
Évidemment qu'à ce niveau de souffrance, on ne peut créer. Desnos lui, souffre mais c'est comme si la souffrance elle-même était endolorie, qu'il s'y était habitué, ne l'empêchant pas d'être un être organisé, mais cette souffrance n'est pas assez endolorie cependant pour que la tristesse soit dépassée.
Il y a des seuils en somme à la souffrance.
Ceux qui créent les chansons de blues ont fait ce travail de dépassement, car le blues en général, stimule l'auditeur. Et sûrement, en effet, alors que les auteurs composent la chanson, ils ne souffrent pas, plus, déjà, du fait d'avoir cette défense, cet art. Le blues peut être spirituel autant qu'un gospel, tout dépend du texte pour faire la différence du point de vue de la spiritualité.
Et notre fameux cri chanté du Miserere montre aussi que la personne ne souffre plus lorsqu'elle compose et chante en elle-même le cri. Elle est même au plein de sa forme, en plein dépassement de la douleur qui se transforme en appel à une entité supérieure et en offrande. Ce chant en lui-même est déjà une offrande, déjà de l'encens offert à Dieu pour demander miséricorde.
Donc Bachelard a raison en général, sauf dans le cas de poèmes comme celui de Desnos, qui a clairement composé celui-là, mis en ligne hier, alors que la souffrance n'était pas dépassée à mon sens, mais, percevant ce poème comme juste un peu raté, à mes yeux, je pense de ce fait qu'il ne dément pas complètement cette pensée de Bachelard qui veut qu'on ne puisse pas créer alors qu'on souffre... je nuancerais alors avec "pleinement créer". Évidemment cela reste suggestif et je ne vois aucun inconvénient à ce que des lecteurs du poème en question le trouvent pleinement réussi.
Alors, pourquoi l'ai-je mis en ligne hier ?
Parce que les "choses" juste un peu ratées ont leur charme (voyez mes dessins), on ne peut pas tout dépasser après tout et malheureusement pour les auteurs des trucs un peu ratés, oui mais, pleins de charme. Et aussi parce que ça n'avait pas décanté complètement et que j'avais juste vaguement senti que j'aurais quelque chose à dire à ce sujet par rapport à la pensée de Bachelard. Par ailleurs si je prenais connaissance du conte de Poe, dont parle Bachelard pour affirmer qu'on ne peut créer que lorsqu'on ne souffre pas, et que le texte me plombait, je penserais que cette création d'Edgar Poe n'est pas non plus aboutie.
Mais être créatif, c'est quoi exactement ? Si c'est juste inventer une histoire ou inventer je ne sais quoi d'autre, ce n'est pas si difficile d'être créatif.
Mais il y a le niveau d'art atteint, de subtilité, qui détermine si la création vaut ou pas d'être présentée comme telle.
Cela dépend de ce que l'on met dans ce mot, "créatif" pour savoir qui l'est et qui ne l'est pas.
Afin d'éviter ce tri par trop sévère, ne vaut-il pas mieux plutôt parler "d'aboutissement" ? Car tout cela a quelque importance pour l'épanouissement personnel aussi, pas seulement d'autrui. Il faut se permettre je pense de cafouiller, de faire ses propres essais, de jouer à composer, à dessiner, comme un enfant... créatif.
Quand j'ai découvert Don Quichotte, ce qui m'a ravie, c'est la tendresse que porte l'auteur à Don Quichotte et Sancho Pança, l'un à moitié fou, l'autre le devenant, sans "créer" de tristesse malgré la situation dramatique. Mais les pièces vraiment dramatiques qui elles, permettent aux auditeurs de la pièce d'extirper une éventuelle souffrance logée en eux, du fait que d'autres l'ont exprimée à leur place, c'est encore de la création de la part des auteurs de ces pièces dramatiques, mais effectivement, Bachelard a raison : il y a une prise de distance par rapport à cette souffrance. Si eux-mêmes étaient en train de vivre ce genre de souffrance, ils n'auraient pas pu écrire la pièce au vif de la douleur morale. Là encore, les pièces, ne sont pas censées plomber les auditeurs mais les aider à prendre de la distance, voire à dépasser quelque chose de lourd. C'est peut-être cela, le propre de l'homme. Que fait la louve au vif de la douleur ? Elle hurle, mais gueule ouverte vers le ciel.... au départ, nous avons cela en nous, aussi. C'est ensuite que cela diffère : la louve oublie, probablement, peu à peu, et l'homme opère un dépassement plus qu'il n'oublie. S'il ne l'opère pas, ... peut-être devient-il psychopathe alors ? ... si, ni la foi en Dieu, ni l'art ne peuvent l'aider ? Et l'on parlera d'un mal qui est en soi comme une fatalité. Mais je n'irai pas plus loin car je me retrouve ici dans la pure supputation.
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Le théâtre et ses bienfaits, à lire, ici :
http://www.talentattitude.com/avis-theatre-bienfaits/
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L'amour et le bien, c'est ici :
http://jubilatedeo.hautetfort.com/archive/2016/04/20/morceaux-choisis-471-jan-van-ruysbroeck-5752984.html
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